Analyse UFAPEC décembre 2012 par A. Pierard

31.12/ Les associations de parents, lieu de fédération et de mobilisation des parents dans l’enseignement spécialisé ?

Introduction

L’enfant est le premier bénéficiaire d’un climat de confiance entre ses éducateurs, les plus importants étant ses parents et ses enseignants. La relation entre parents et enseignants doit être marquée par « Reconnaissance et dialogue pour que l’enfant ne soit pas otage, mais fruit d’une collaboration garante d’une meilleure scolarité[1] ».

Ce partenariat doit être pensé en tenant compte des spécificités de chacun des partenaires éducateurs. Il doit aussi être pensé selon les spécificités de l’enfant, d’autant plus dans l’enseignement spécialisé qui accueille des élèves ayant des besoins particuliers. Ce point a été traité dans une analyse sur la place des parents dans l’enseignement spécialisé.[2]

Les associations de parents peuvent mettre en place des choses pour favoriser la relation entre les parents et l’école de leur enfant. C’est d’ailleurs une de leurs missions. Concernant les associations de parents au sein des établissements scolaires de l’enseignement spécialisé, plusieurs questions se posent. Quelle est leur place dans ces écoles? Comment les associations de parents peuvent-elles favoriser les relations entre les parents et l’équipe éducative ? Quel rôle ont-elles à jouer ?

Concernant la relation parents-école, qu’en est-il du rôle des associations spécifiques du monde du handicap ? Comment peuvent-elles aider les parents face à la scolarité de leurs enfants ? Quelle est leur relation au monde de l’enseignement ?

Place des parents dans l’enseignement spécialisé

La collaboration entre les parents et les enseignants a toute son importance pour répondre aux besoins spécifiques des élèves de l’enseignement spécialisé. Comme explicité dans la circulaire de la Fédération Wallonie-Bruxelles concernant les associations de parents et précisé dans mon analyse à ce sujet[3], « Une véritable « alliance éducative » entre les parents, l’équipe pédagogique et les jeunes contribue à une meilleure compréhension réciproque, favorisant ainsi les apprentissages et l’épanouissement des élèves[4] ».

Un enseignement individualisé s’est mis en place grâce à la mobilisation et aux revendications de parents d’enfants à besoins spécifiques. La création de l’enseignement spécial en 1970 est due à la pression de parents et d’associations de parents demandant des écoles spécialisées pour leurs enfants atteints d’un handicap. Le décret et la mise en place de l’intégration dans l’enseignement ordinaire en 2009 fait suite aussi aux sollicitations de parents, cette fois pour un enseignement inclusif.

Les parents ont une réelle place dans l’enseignement spécialisé :

  • Les parents sont impliqués dans l’élaboration et le suivi du PIA (plan individuel d’apprentissage) de leur enfant. Le PIA est un outil de communication active entre l’équipe éducative et les parents.
  • L’intégration découle d’un libre choix des parents dans l’intérêt de l’enfant, en tenant compte de ses capacités et de son projet de vie, en concertation avec les écoles et les Centres Psycho-Médico-Sociaux.

Associations de parents

Une association de parents est « l'interlocuteur privilégié des directions des établissements scolaires. Les associations de parents sont représentées au sein du Conseil de participation de l'école[5] ».

Cette représentation des parents au sein du Conseil de participation a toute son importance, car il regroupe des représentants des différents partenaires de l’établissement scolaire : le pouvoir organisateur, le chef d’établissement, des enseignants, des parents, du personnel administratif et des élèves. Le Conseil de participation est « un espace de démocratie et de débat. Il offre la possibilité à ses membres de faire des propositions concrètes. Sa première mission est de débattre, compléter, adapter, évaluer la mise en œuvre du projet d’établissement [6] ».

Etre actif au sein de l’association de parents de l’école de ses enfants est une bonne manière de s’intéresser à leur scolarité, d’être partenaire de l’école en favorisant les relations entre l’équipe éducative et les parents et en améliorant l’environnement des enfants.

Maria, une maman : « l’association de parents peut devenir une véritable aide car elle motive les parents à participer et à s’intéresser à la vie de l’école. Grâce à elle, parents et enseignants peuvent progressivement nouer des liens seins et sereins.[7] »

Rôle des associations de parents

Selon le décret[8], les missions d’une association de parents sont les suivantes.

Article 2. - § 1er.Il peut être créé par les parents de tout établissement d'enseignement maternel, primaire, fondamental ou secondaire organisé ou subventionné par la Communauté française, une Association de Parents d'élèves.

L'Association de Parents regroupe exclusivement des parents d'élèves régulièrement inscrits auxquels sont assimilées les personnes qui ont la responsabilité légale d'un ou de plusieurs élèves.

§ 2.L'Association de Parents, qui doit s'inscrire dans le strict cadre du projet pédagogique de l'école, a pour mission de faciliter les relations entre les parents d'élèves et l'ensemble de la communauté éducative, dans l'intérêt de tous les élèves, de leur réussite et de leur épanouissement dans le respect des droits et obligations de chacun.

L'Association de Parents organise une veille passive et active en vue d'informer, le plus objectivement possible, tous les parents d'élèves.

S’impliquer dans l’association de parents de l’établissement scolaire de son enfant permet de mieux connaitre les autres parents d’élèves et les enseignants, de représenter les parents au sein de l’école, d’aider à la réalisation de projets dans la vie de l’école, de débattre sur différents sujets touchant à la vie scolaire.

Antonio, un papa : « Pour moi, le bien-être des élèves est la raison majeure à la création d’une AP. On ne crée pas une Association de Parents pour se retrouver entre amis ou pour se sentir syndiqués, mais bien pour collaborer un maximum avec l’école afin que chaque enfant soit le plus heureux possible ![9]»

Les activités d’une association de parents sont diverses. Une association de parents peut informer et écouter les parents, améliorer le cadre scolaire des élèves, favoriser les relations humaines au sein de l’école, participer au projet éducatif de l’école, organiser des rencontres, des moments d’échange autour du projet d’établissement, désigner des parents délégués de classe, participer à la réalisation d’outils de communication autour de la vie de l’école,… Ces différentes activités sont menées en harmonie avec les projets de l’école, les projets de l’association de parents sont intégrés dans le projet d’établissement.

Les deux rôles essentiels d’une association de parents sont l’organisation d’activités au sein de l’école mais aussi la réflexion sur des sujets touchant le monde scolaire (les sanitaires, le soutien scolaire, les activités parascolaires,…). Il faut pouvoir allier les deux.

Le comité de l’association de parents

Tous les parents d’élèves d’une école sont considérés comme membres de droit de l’association de parents. Pour l’organisation et la gestion de l’association de parents, un comité est constitué et rassemble au moins 3 personnes. Les fonctions au sein de ce comité sont définies ensemble : président, vice-président, secrétaire, trésorier, chargé de relation UFAPEC,…

Les missions de ce comité sont les suivantes.

Le comité représente l’Association de parents entre deux assemblées générales des parents. Il a pour mission :

  • d’organiser, avec la direction, une assemblée générale au moins une fois par an ;
  • d’organiser des réunions de parents afin de débattre notamment des questions soulevées au Conseil de participation ;
  • d’assurer la circulation de l’information entre les parents d’élèves et leurs éventuelles organisations représentatives ;
  • de susciter la participation active de tous les parents d’élèves de l’établissement en vue de leur permettre de jouer pleinement un rôle actif et responsable au sein de l’école et de favoriser la scolarité des enfants ;
  • d’émettre d’initiative des avis et/ou des propositions aux acteurs concernés.[10]

Et dans l’enseignement spécialisé ?

Les associations de parents ont les mêmes rôles dans l’enseignement spécialisé que dans l’enseignement ordinaire. Tout ce qui a été présenté ci-avant concerne les associations de parents d’écoles de l’ordinaire et du spécialisé.

Comme les différents témoignages le confirmeront, il est difficile de mobiliser les parents de l’enseignement spécialisé. Les parents sont avant tout préoccupés par leur enfant et son handicap et cela leur prend beaucoup de temps. Organiser une association de parents dans les écoles de l’enseignement spécialisé se révèle dès lors plus complexe. Pourquoi ?

Premièrement, leur enfant à besoins spécifiques leur demande un investissement important. Selon le handicap ou les troubles (de comportement ou d’apprentissage) de l’enfant, celui-ci aura, en plus du temps scolaire, des rendez-vous potentiels chez des professionnels pouvant répondre à ses besoins spécifiques. Il peut s’agir d’ergothérapeutes, de kinésithérapeutes, de psychologues, de logopèdes, de psychomotriciens,… Les parents qui se mobilisent pour leur enfant vont faire tout ce qu’ils peuvent pour l’aider. Ils manquent donc de temps et d’énergie pour s’investir dans une association de parents.

Une autre explication serait qu’au sein des écoles de l’enseignement spécialisé, on retrouve trois formes d’hétérogénéité parentale : sociale, géographique et selon la typologie par laquelle l’enfant est concerné.[11]

Concernant l’hétérogénéité géographique, un frein à l’élaboration d’une association de parents dans certaines écoles spécialisées est la grande distance qui peut exister entre l’école et le domicile. De plus, cette distance peut impliquer une prise en charge de l’élève par les transports scolaires et donc peu de contacts entre les parents et l’école.

En lien avec l’hétérogénéité sociale, certains parents sont démunis face aux difficultés de leur enfant. On pense aux parents d’origine étrangère et/ou de milieu défavorisé dont il est question dans différents témoignages.[12]

Enfin, comme en témoigne une maman dont le fils est autiste, les parents qui s’investissent rejoignent souvent des associations du monde du handicap ou en créent plutôt que de s’investir dans une association de parents limitée à l’école et ne répondant pas suffisamment à leurs besoins et à ceux de leur enfant.

Rôle des associations du monde du handicap

Comme le dit l’association X-Fragile sur son site Internet[13], les parents s’inscrivent dans les associations du monde du handicap pour recevoir un soutien, une aide, des informations pour leur permettre d’affronter les difficultés liées au handicap de leur enfant. Rappelons que le parcours des parents d’enfant à besoins spécifiques est souvent un parcours du combattant.

A l’origine de plusieurs de ces associations, on retrouve des parents. C’est le cas de l’AFrAHM et l’APEDA, mais aussi sûrement d’autres associations spécifiques de handicap.

Les parents qui se dirigent vers ces associations ont besoin de pouvoir échanger entre parents, de rencontrer des parents vivant la même chose qu’eux, de se soutenir mutuellement. Ces associations sont là pour permettre la rencontre mais aussi aider les parents par rapport à la scolarité de leur enfant.

Quelques exemples :

  • L’AFrAHM (Association francophone d’aide aux handicapés mentaux) rassemble les parents et familles de personnes handicapées mentales.
  • L’APEDA (Association belge de parents d’enfants en difficulté d’apprentissage) fait tout un travail de sensibilisation concernant l’enseignement spécialisé et rassemble parents et enseignants.
  • L’APEDAF (Association des parents d’enfants déficients auditifs francophones) est un lieu d’écoute, de solidarité et d’échange entre parents, un service d’aide pédagogique mais aussi un réseau de parents-relais pour une aide inter parentale.
  • L’APEPA (Association de parents pour l’épanouissement des personnes avec autisme) favorise la rencontre entre parents et professionnels entre autres via son colloque sur l’enseignement, apporte information et soutien aux familles. Les parents se regroupent et s’activent pour l’éducation de leurs enfants.
  • L’ASBL Autisme Liège apporte une aide éducative adaptée et un soutien aux familles, favorise le partenariat entre les différents milieux de vie de l’enfant autiste.
  • L’association X-Fragile (section spécifique de l’AFrAHM) rassemble les familles des personnes concernées par le syndrome de l’X-fragile[14]. Son Service d’Aide à l’Intégration apporte une aide éducative au jeune et à ses parents.

Témoignages de parents et d’associations de parents

Témoignages de parents

Témoignage d’une maman dont le fils autiste est maintenant en intégration dans l’enseignement ordinaire

Mon fils est passé par deux écoles de l’enseignement spécialisé avant d’être maintenant suivi en intégration dans l’ordinaire par la deuxième école de l’enseignement spécialisé fréquentée. Dans les deux écoles de l’enseignement spécialisé, je n’ai pas eu d’information sur la présence d’une association de parents. C’est vrai que certains parents sortent du lot, mais ils s’impliquent pour leur propre enfant et se dirigent vers les associations spécifiques du handicap spécifique dans lesquelles ils vont s’investir, j’en suis un exemple. J’aurais voulu qu’il y ait une AP dans ces écoles pour fédérer les parents, les aider, défendre leur point de vue au sein de l’école. Pour mobiliser les parents, il faut leur parler du handicap de leur enfant, ne pas être trop généraliste.

 

Témoignage d’une maman dont la fille de 29 ans a suivi sa scolarité depuis la deuxième primaire dans l’enseignement spécialisé

Y avait-il une association de parents dans l’école primaire de votre fille ? Oui. Qui est à l’origine de sa création et comment s’est-elle mise en place ?Je n'en connais pas l'origine. Elle existait déjà depuis un certain temps quand notre fille a commencé l'école. Comment fonctionnait-elle ? Un groupe de plusieurs parents qui aidait à organiser les fêtes de l'école dans le but de gagner de l'argent, mais surtout d'organiser des rencontres entre parents, professeurs et élèves. L'entente y était très bonne et agréable. Je sais que les parents se réunissaient plus ou moins une fois par mois le soir dans l'école. Ce groupe m'avait demandé de les rejoindre, chose que j'ai refusée, car l'école était loin, le travail, les quatre enfants, plus toutes les heures de logopédie, de psychomotricité me prenaient beaucoup de temps et mon mari avait des horaires très irréguliers.

Y avait-il une association de parents dans l’école secondaire de votre fille ?Oui. Comment s’est-elle mise en place ?Je ne sais pas. Comment fonctionnait-elle ? Elle se réunissait aussi plus ou moins une fois par mois dans l'école. L’association de parents jouait-elle un rôle au niveau de la communication entre les parents et l’école ? L'association de parents n'était là que pour gagner des sous, cela ressemblait plutôt à un comité des fêtes. J'ai fait partie de cette association pendant 6 mois, mais je n'ai pas continué, car je ne collais pas trop avec leurs idées trop mercantiles. Il n’y avait pas beaucoup de communication vers les autres parents. C’était bizarre, car il y avait aussi d’anciens parents dans le comité… J’ai quitté le groupe car l’association n’avait pas ce côté chaleureux que les associations de parents peuvent avoir.

 

Témoignage d’une maman, ancienne présidente d’AP

En 2006, j’ai repris la présidence de l’association de parents de l’école de mon fils. La directrice de cette école est une personne à l'esprit très ouvert. Elle montrait beaucoup d'enthousiasme aux rencontres entre parents et enseignants. Nous avions des réunions régulières (1 fois par trimestre), mais nous n'étions que très peu à y participer malheureusement! Ce qui amenait pas mal de monde, c'était lorsque nous organisions une conférence ou une séance d'informations quant à l'avenir de nos enfants (1 ou 2 fois sur l'année). Nous invitions alors une personne ressource pour animer la soirée (travail, hébergement, situation juridique, éducation affective et sexuelle....). Un conseil de participation, organisé par la directrice, était aussi l'occasion de rencontrer les représentants des différentes parties de l'école (élèves, enseignants, direction, parents,  personnel d'entretien) afin d'entendre les attentes de chacun.

 

Témoignage d’une maman dont le fils est inscrit en type 3

Il n’y a pas d’association de parents dans l’école de votre fils, voudriez-vous qu’il y en ait une ? Oui, je suis tout à fait pour ! Je suis membre du comité de l’AP de l’école ordinaire où sont inscrits mes autres enfants. Je serais d’ailleurs motivée, tout comme mon mari, de participer activement si une AP se mettait en place dans l’école spécialisée de mon fils. Quel rôle la verriez-vous jouer ? L’AP pourrait expliquer aux parents ce que fait l’enseignement spécialisé pour leurs enfants, organiser des activités pour les enfants comme pour les parents, programmer des réunions pour discuter des activités possibles avec les enfants (extrascolaire), de ce qu’on pourrait faire entre parents, de ce qu’on pourrait mettre en œuvre pour faciliter la vie des enfants. Trouvez-vous qu’une association de parents devrait faire quelque chose pour favoriser la communication entre l’école et les parents? Une AP doit être à l’écoute des parents et de l’école, faire le lien entre eux, créer une ouverture pour les contacts, aider les relations et la communication dans les deux sens.  

 

Témoignage d’un papa dont le fils est dysphasique

J’ai lancé une APdans l’école de mon fils. Celle-ci a duré 4 ans et demi, mon départ y ayant mis fin. Pour mettre les choses en place, j’ai trouvé deux, trois parents motivés et j’en ai parlé à la direction qui était favorable. On a fait une annonce à la rentrée scolaire suite à laquelle des parents se sont inscrits. Ce qui était dommage, c’était que malgré nos invitations reconnaissables (sur papier vert), des parents ne comprenaient pas que c’était une réunion de l’AP. Les écueils de cette expérience sont que des parents ou enseignants venaient vers nous pour faire part de revendications, les parents par rapport au quotidien de leur enfant et les enseignants par rapport à la direction. Il faut aussi dire qu’il est encore plus difficile de mobiliser les parents que dans l’enseignement ordinaire. Les écoles touchent différents types de l’enseignement spécialisé, certains parents viennent de loin, d’autres parents sont préoccupés par leur enfant, leur propre situation. Il n’est donc pas facile de créer un noyau fédérateur. Les associations du monde du handicap ont plus de chance de toucher les parents, car elles sont centrées spécifiquement sur le handicap de leur enfant.Ce qui peut marcher, ce sont des rencontres entre parents d’une même classe, car le groupe est alors plus homogène et cela permet d’échanger et de s’ouvrir entre parents d’une même classe. Par ce biais, l’idéal serait de créer une AP avec un représentant par classe. Le système de délégué de classe est quelque chose qui marche bien.

Témoignages d’associations de parents

Témoignage d’un papa, président de l’association de parents d’une école maternelle, primaire et secondaire de types 6, 7 et 8 (ce dernier seulement pour le primaire)

Depuis quand y a-t-il une association de parents dans votre école ?2010. Qui est à l’origine de sa création et comment s’est-elle mise en place ?Moi-même et l’école grâce au décret sur les associations de parents. Comment fonctionne-t-elle ?Je trouve qu’elle fonctionne très mal. Après un an et demi d’activités et de réunions régulières, les membres se sont découragés devant l’absence de réponse de l’école à nos demandes. Celles-ci concernaient la présence d’auxiliaires bénévoles pour encadrer les enfants en difficultés, la communication, les échanges entre l’école et les parents. Nous avons aussi des difficultés dues à la multiplicité de handicaps pris en charge par l’école. L’école accueillant des élèves des types 6, 7 et 8, elle regroupe des jeunes ayant divers handicaps. Au sein de l’école, l’équipe éducative est confrontée aussi bien à la dysphasie qu’à la surdité, la malvoyance, la cécité, lepolyhandicap. Les intérêts des parents ne sont pas les mêmes selon la déficience de leur enfant, qu’il soit en primaire ou secondaire. Bref, l’association est au point mort depuis fin 2011 et je ne peux porter seul le projet. Comment se passe la relation entre l’école et les parents des élèves?Comme beaucoup d’écoles de l’enseignement spécialisé, les enfants viennent des quatre coins de la Belgique, donc ils arrivent généralement à l’école en bus. Il y a donc peu ou pas de relation entre l’école et les parents. Il n’y a pas non plus de suivi dans le carnet de liaison ou le journal de classe. L’école propose-t-elle quelque chose pour favoriser la communication avec les parents?NON et je me bats en ce sens. Je voudrais mettre en place un forum internet, seul moyen de permettre l’échange entre parents. L’association de parents joue-t-elle un rôle à ce sujet ? Fait-elle quelque chose pour favoriser la communication entre l’école et les parents?Oui, elle a tenté de mettre des choses en place à ce sujet, mais il difficile de mobiliser des parents d’enfants en situation de handicap, au vu de leur emploi du temps et de la charge de l’enfant. Comment les parents s’impliquent-ils dans la vie scolaire de leur enfant et dans la vie de l’école ? Ils s’y impliquent peu. Beaucoup de parents sont d’origine étrangère et/ou de milieu défavorisé.

 

Témoignages de membres de l’association de parents d’une école primaire de type 8

Ces deux témoignages se complètent concernant l’AP de cette école.

La présidente de l’AP

Depuis quand y a-t-il une association de parents dans votre école ?Trois ans. Qui est à l’origine de sa création et comment s’est-elle mise en place ? Des mamans d'élèves se sont réunies et ont décidé de créer l’AP. Comment fonctionne-t-elle ? Il y a une réunion toutes les 4 à 6 semaines, avec les membres du bureau, avec une invitation à tous les parents des enfants de l'école. Le corps enseignant y est également convié, avec à chaque fois 2 à 5 représentants. La collaboration est plutôt constructive et positive, du moins pour la plupart des participants. Il arrive que le PO soit également représenté, mais c'est principalement pour les première et dernière réunions de l'année, les réunions plus stratégiques, moins organisationnelles. De plus, le bureau se réunit en comité restreint pour des décisions plus névralgiques ou fonctionnelles. Comment se passe la relation entre l’école et les parents des élèves ?Ce n'est pas toujours facile : nous sommes dans une école avec enseignement différencié, enseignement spécialisé. Les parents sont souvent arrivés là désarmés, dépités, sans plus trop savoir comment gérer ce qui leur arrive. Ils ont besoin d'une écoute particulière, d'un encadrement autre que dans les écoles "classiques". Le corps enseignant en a sans doute conscience, mais les attentes des parents sont parfois en inadéquation avec la réponse rendue par le corps enseignant et la direction. Il n'empêche que ceci n'est pas la règle et qu'il est en général aisé de prendre contact avec l'enseignant. L’école propose-t-elle quelque chose pour favoriser la communication avec les parents? Non, pas vraiment. Pas de boite aux idées ni aux lettres mise à disposition. L’association de parents joue-t-elle un rôle à ce sujet ? Fait-elle quelque chose pour favoriser la communication entre l’école et les parents? Officiellement oui, mais tout le monde n'a pas les mêmes accès aux mêmes personnes... cela semble beaucoup plus tortueux pour certains que pour d'autres. L'AP n'est pas encore clairement l'interlocuteur des parents mécontents ou frustrés, mais nous y travaillons. Comment les parents s’impliquent-ils dans la vie de l’école ? Beaucoup de parents aident aux différentes activités organisées par l'AP. C'est en fonction des activités de chacun, mais il est clair qu'on n'a pas 20 % des parents qui donnent leur énergie pour les activités organisées par l'AP alors que cela profite à tous les enfants de l'école. Mais c'est comme ça pour la plupart des associations.

La responsable du comité des fêtes au sein de l’AP

L’association de parents, en tant qu’association de fait, a été mise sur pied en juin 2010 répondant à la volonté  de plusieurs parents de mettre en place un système plus structuré et plus « officiel ».  Avec ses réunions, et ses personnes de référence, on a permis de structurer et d’organiser de manière plus effective et rationnelle, les diverses activités de l’école. Comment fonctionne votre association de parents ? L’école organise plusieurs manifestations sur l’année qui sont récurrentes telles que marche parrainée, petit déjeuner de Noël, goûter crêpes et fancy-fair. Le but notamment de ces manifestations est de récolter de l’argent. Cet argent est principalement mis sur le compte de l’AP pour ensuite financer des projets pédagogiques, des sorties de classe, des investissements (comme l’aménagement des cours de récréations, vaisselle, rangement..). Nous nous réunissons quelques semaines avant chaque évènement pour mettre tout en place (logistique).  Lors des réunions, d’autres points  sont également abordés, qui touchent la vie de l’école : relations parents-école, modalités pour rencontrer les professeurs, faire écho de propositions de parents, de plaintes ou « revendications »… Nous cherchons également des idées pour récolter des fonds autres que les activités récurrentes, comme vente d’essuies de vaisselles, sacs en toile. Nous sommes actuellement 6 personnes dans l’AP dont une présidente, un trésorier, une personne référente pour le comité des fêtes. Un secrétaire est désigné pour chaque réunion. Les parents sont conviés à chaque réunion et sont en général 3 à se présenter. La directrice, un membre du Po et 3 professeurs sont présents également. Comment se passe la relation entre l’école et les parents des élèves ? C’est un sujet très délicat… car ressenti de manière très sensible et différemment selon les parents.  Mettre son enfant dans un enseignement spécialisé n’est pas toujours chose aisée pour les parents. La plupart des parents ressentent une nécessité plus importante d’être en contact  avec le professeur, lui soumettre plus souvent « l’état » de son enfant, s’inquiéter de son évolution. Une école spécialisée ne court pas les rues, elle draine des enfants dans des rayons kilométriques assez larges et de tout niveau social. La communication avec l’enseignant se fait par le biais du journal de classe au quotidien ou si l’occasion se présente à l’arrivée à l’école ou à la sortie.  Ce n’est pas toujours évident pour certains parents car l’école a instauré une « discipline »  suite à diverses agressions verbales de certains parents à l’intention du professeur. Il est demandé aux parents de prendre rendez-vous via le journal de classe.  Mais certains cas nécessitent un rendez-vous instantané. J’ai envie de dire que c’est vraiment du cas par cas et cela relève souvent de la confiance mutuelle, de l’éducation, de la psychologie, du contexte social de l’enfant, de la sensibilité des parents, de la « maturité » du professeur, de l’ouverture des parents comme celle du professeur. L’association des parents fait-elle quelque chose pour favoriser la communication entre école et parents ? Certains parents ont ressenti comme une espèce de « cloisonnement » entre profs et parents, des difficultés de discussion. Le mot via le journal de classe n’est pas toujours approprié pour certains sujets. L’AP a proposé d’y apporter une amélioration  en proposant de procurer en début d’année un cahier de communication à chaque élève  et donc indépendant du journal de classe  et qui permettrait de scinder le « privé » du scolaire et d’avoir plus de place pour écrire.  Cette proposition n’a pas été retenue par la direction et les profs et les raisons n’ont pas été clairement invoquées. Comment les parents s’impliquent-ils dans la vie de l’école ? Je peux juste constater que dans les diverses activités « festives » de l’école, ce sont toujours les mêmes qui y participent, à savoir les membres de l’AP et quelques parents.

 

Témoignages d’écoles

Témoignage de la directrice d’une école secondaire de types 1 et 2

Depuis quand y a-t-il une association de parents dans votre école ?Depuis que je suis arrivée à Cerexhe : septembre 2002. Ma volonté était d’associer les parents à notre école. L’AP a été active dans le courant des années scolaire 2004-2005 et 2006. C’est suite à l’obligation de mettre en place un conseil de participation que, j’ai, dans la foulée proposé à une maman de « lancer » cela dans notre école. Celle-ci est devenue présidente de l’association de parents. Comment fonctionne-t-elle ?Les réunions se faisaient à l’école, en soirée sur des thèmes précis : l’éducation affective, la minorité prolongée, la sortie du jeune de l’école,… Des intervenants extérieurs étaient invités ainsi que les enseignants. Cela s’est « effiloché » à la longue faute de participants…C’étaient essentiellement des parents d’élèves de forme 2[15] qui répondaient présents. Ils commençaient même l’année par un spaghetti.Comment se passe la relation entre l’école et les parents des élèves, de manière générale ? Les parents sont associés aux objectifs de PIA. Trois réunions de parents sont organisées dans l’année scolaire ainsi qu’aux moments de la remise des bulletins (2 fois par année scolaire).Nous avons aussi réalisé une enquête de satisfaction  qui abordent différents thèmes : l’infrastructure, le projet pédagogique, la communication, la lisibilité des documents remis aux élèves….L’association de parents fait-elle quelque chose pour favoriser la communication entre l’école et les parents? Je le voudrais bien mais il n’y a plus d’AP parce que personne ne veut prendre cela en charge, parce que nos élèves viennent géographiquement d’horizons différents, parce que nos parents sont pour la plupart suivis et aidés par des organismes satellites (SAI….). La dernière présidente de l’AP a eu de graves ennuis de santé l’année passée, il n’y a donc pas eu de rencontres l’an passé et personne n’a repris les choses en main. Comment les parents s’impliquent-ils dans la vie scolaire de leur enfant et dans la vie de l’école ? Notre population est partagée entre des élèves venant de milieux défavorisés et placés pour certains en institution et pour les autres, issus de milieux « favorisés ». A ce niveau il y a une forte implication et exigence de la part des parents. Certains parents sont quelques fois « hyper exigeants », nous demandant des choses quasi impossibles. Notre rôle à nous, est de les écouter et de reconstruire ensemble les possibles avec leur jeune.

Je vous avoue franchement que je me suis épuisée à mettre l’association de parents en place et que, manifestement, cela n’est pas un besoin. Et pourtant je crois que cela pourrait être une belle collaboration pour toutes les parties…

Lorsque nous avons réalisé notre étude sur l’enseignement spécialisé et les projets de vie des élèves[16], nous avons récolté des témoignages de membres des équipes pédagogiques de l’école le Soleil Levant (enseignement spécialisé secondaire de types 1, 2 et 3) à Montignies-sur-Sambre et de l’école les Chardons (enseignement spécialisé fondamental de types 2, 3 et 5) à Chastre.

Ecole le Soleil Levant: Selon l’équipe, seule une vingtaine de familles pourraient apporter un soutien associatif à l’école. Et, même dans ce rare cas, les centres d’intérêts des parents se font plus au niveau individuel que collectif. Chaque étudiante étant différente, ayant ses propres besoins, les parents potentiellement actifs préfèrent donner leur énergie pour leur enfant en particulier plutôt que de s’impliquer pour le groupe. De plus, avant toute éventualité de collaboration entre l’école et la famille, il faut d’abord que la phase d’acceptation du handicap soit passée et pleinement assumée par les parents.

 

Ecole les Chardons: L’équipe mentionne que le partenariat entre l’école et la famille dépend vraiment des parents et de leur motivation. Il n’y a pas toujours eu d’association de parents structurée puisque cela dépend souvent de deux ou trois parents moteurs. L’association et les actions parentales s’arrêtent aussitôt que lesdits parents quittent l’école.

Conclusion et position de l’UFAPEC

Une association de parents peut aider l’école et les parents d’élèves de multiples manières : représenter les parents, organiser des activités, informer les parents mais aussi récolter leur avis, sensibiliser les partenaires éducatifs à certaines problématiques… tout cela pour aboutir à une solidarité. Cette aide est essentielle au sein des écoles de l’enseignement spécialisé pour faire face ensemble aux besoins spécifiques des élèves.

La réflexion autour de l’accueil d’élèves à besoins spécifiques a aussi toute son importance dans les associations de parents des écoles de l’enseignement ordinaire organisant l’intégration.« Dans le cadre des associations de parents, comités scolaires et conseils de participation, la problématique de l’accueil d’enfants handicapés au sein de l’école peut (doit ?) être clairement abordée. Cela suppose que l’on puisse répondre à toutes les questions (mêmes les questions très naïves) des parents qui s’inquiètent de l’impact de la présence d’un enfant handicapé au sein de la classe/ de l’école fréquentée par leur propre enfant. Une fois ces questions clairement énoncées et une fois les réponses clairement apportées, une réelle solidarité peut se construire au sein de l’établissement.[17] »

Comme en témoignent les parents, les associations de parents et les directions d’écoles, il est difficile de mobiliser les parents et créer un noyau fédérateur au sein des écoles de l’enseignement spécialisé. Les raisons sont de l’ordre de l’hétérogénéité sociale et géographique du public, mais aussi de la typologie par laquelle l’enfant est concerné. « On constate une grande diversité socioculturelle et une forte dispersion géographique des familles (cf. la longueur de certains transports scolaires). Ces deux critères rendent malaisé le dialogue avec un trop grand nombre de familles.[18] »

Même si les parents d’élèves de l’enseignement spécialisé trouvent un soutien auprès des associations du monde du handicap, comme Philippe Rateau, l’UFAPEC encourage « tous les parents à s’organiser en association dans l’établissement que fréquente leur enfant. L’implication des parents dans le cursus d’un enfant présentant des déficiences doit se faire, non seulement à l’échelle individuelle, mais aussi collective. Plus nous serons nombreux à nous fédérer, plus nous aurons de chance d’être entendus.[19] »

L’UFAPEC rappelle que depuis le décret sur les associations de parents du 30 avril 2009, il est de la responsabilité des directions de susciter la mobilisation des parents et la création d’une association de parents, notamment par l’organisation d’une assemblée générale des parents avant le 1er novembre de chaque année, en concertation avec le PO. Il ne faut pas oublier que l’UFAPEC est là pour vous accompagner dans la mise en place d’un projet personnalisé d’AP au sein des écoles, un projet qui corresponde aux besoins des différents partenaires : parents, enfants, direction et équipe pédagogique. C’est l’une des missions qui nous est confiée par le décret.

 

Alice Pierard

 

 

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[1]HOUSSONLOGE D., Le partenariat école-famille. Ses bienfaits et ses limites, Analyse UFAPEC 2008, p 6.

[2]PIERARD A., Quelle place pour les parents dans l’enseignement spécialisé ?, Analyse UFAPEC 2012 N°30.12

[3]Idem, p 1

[4]Circulaire 4182 de la Fédération Wallonie-Bruxelles du 11 octobre 2012, remplaçant la circulaire 3743 du 28 septembre 2011, p 1.

[6]THOLLEMBECK J., Le partenariat comme vecteur de régulation des relations familles-école. Des dispositifs courants aux initiatives novatrices, Analyse UFAPEC 2009 N°23, p 7.

[7]« L’AP sera-t-elle une aide pour l’école ? » Fiche 1.2.3 du Guide des Associations de Parents, réalisé par l’UFAPEC, http://www.ufapec.be/association-de-parents/guide-des-ap

[8]Décret de la Communauté française « portant sur les Associations de parents d’élèves et les Organisations représentatives d’Associations de parents d’élèves en Communauté française », du 30 avril 2009 et publié au moniteur belge le 6 août 2009, pp 1-2.

[9] « Une AP, pourquoi ? » Fiche 5 du Guide des Associations de Parents, op cit.  

[10]Circulaire 4182 de la Communauté française du 11 octobre 2012, op cit, p 5.

[11]Cela est développé dans le témoignage d’un papa dont le fils est dysphasique. PIERARD A., Quelle place pour les parents dans l’enseignement spécialisé ?, op cit., pp 8-9.

[12]Ceux de cette analyse mais aussi dans les témoignages de l’analyse « Quelle place pour les parents dans l’enseignement spécialisé ? », pp 7-9.

[13]Les sites Internet des différentes associations citées se trouvent tous dans la bibliographie.

[14]Syndrome génétique, cause fréquente de retard mental

[15]La forme 2 a pour objectif de donner une formation générale, sociale et professionnelle en vue de l’intégration des élèves en milieu de vie et professionnel adapté.

[16]HOUSSONLOGE D., LONTIE M. et PIERARD A., L’enseignement spécialisé : l’élève et son projet de vie, Etude UFAPEC 2011 N°32.11

[17]Jean-Jacques Detraux, « l’intégration scolaire d’enfants déficients en milieu non-spécialisé : les enjeux » dans l’étude de l’observatoire ASPH de la personne handicapée « La personne handicapée face à l’enseignement aujourd’hui », 21 novembre 2007, http://www.asph.be/NR/rdonlyres/D07D8A2C-D36E-464E-A3FA-5351166F9BF7/0/asphHandicapetenseignement.pdf, p 30.

[18]Philippe Rateau, représentant des parents au Conseil Supérieur de l’Enseignement Spécialisé, « le rôle des parents dans l’Enseignement spécialisé », Groupe PIA du CSES

[19]Philippe Rateau, représentant des parents au Conseil Supérieur de l’Enseignement Spécialisé, « Le rôle particulier des parents dans le spécialisé et leur implication dans le PIA », intervention lors du colloque « 40e de l’enseignement spécialisé » organisé par la FAPEO le 27 novembre 2010 à Liège

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