Analyse UFAPEC 2010 par M-N. Tenaerts

07.10/ Les théories de la motivation scolaire ou comment faire pour que mon enfant réussisse à l’école ?

Introduction

Si la motivation scolaire est un facteur de réussite prépondérant, elle n’est pas pour autant intrinsèque à tous les âges, chez tous les élèves pour toutes les tâches, tous les apprentissages. En effet, les élèves qui « n’aiment pas » l’école, qui ne trouvent pas de sens à certaines activités éprouvent certaines difficultés : lassitude, échec, décrochage, etc. Nous verrons, dans le développement de ces analyses, pour quoi et comment aider les enfants à développer une motivation personnelle sans pour autant devoir user de stratégies de marchandage, de chantage et de récompenses matérielles.

Les théories de la motivation

La motivation a été définie par de nombreux auteurs, issus de différentes écoles de pensées et de différentes disciplines. Certains auteurs perçoivent, en effet, la motivation comme un facteur interne et prédisposant à accomplir certaines actions alors que d’autres auteurs l’entendent comme une réponse à un facteur externe, à des stimuli donnés. Des auteurs tels que Vallerand et Thill définissent la motivation comme « un construit hypothétique utilisé pour décrire les forces internes et ou externes produisant le déclenchement, la direction, l’intensité et la persistance du comportement ». Pintrich et Schunk, quant à eux, la décrivent en termes de « processus par lequel une activité est initiée et maintenue ». Pour Maslow et Herzberg, « la motivation désigne les forces qui agissent sur une personne ou à l’intérieur d’elle pour la pousser à se conduire d’une manière spécifique, orientée vers un objectif »[1]Gagnon et Brunel proposent une définition de synthèse de ces différents auteurs : « la motivation se pose comme l’explication de l’action, une force dynamique, la source d’énergie qui prédispose et pousse une personne à agir, à viser un objectif. Son rôle ne se limite pas à déclencher l’action, mais influence aussi sa direction, son intensité ainsi que sa persistance »[2]. Rolland Viau, pour sa part, entend la motivation sous une approche différente. En effet, pour cet auteur, « la motivation est un concept dynamique qui a ses origines dans la perception qu’un [individu] a de lui-même et de son environnement et qui l’incite à choisir une activité, à s’y engager et à persévérer dans son accomplissement afin d’atteindre un but »[3]. Cette dernière dimension intègre l’individu en tant que tel, dans la perception qu’il a de contrôler certains paramètres qui lui sont propres. C’est ainsi le point de vue que nous adoptons, étant entendu que l’individu est dans un contexte particulier (travail, école, etc.) et qu’il a la capacité d’agir dans ce cadre.

La chaîne motivationnelle

Comme nous venons de l’évoquer dans les lignes précédentes, la motivation est un processus dynamique. Des auteurs comme Deci et Ryan, psychologues, proposent une approche intéressante dans notre cadre de travail puisqu’ils placent la motivation dans un contexte : des déterminants aux conséquences. En effet, Deci et Ryan proposent un point de vue relevant des théories de l’autodétermination et de l’évaluation cognitive, ce qui leur permet de construire la chaine motivationnelle en partant des déterminants aux conséquences de la motivation. Il nous parait intéressant de préciser ici, les contenus de cette chaine motivationnelle.
 
Déterminants => motivation => conséquences
 
Deci et Ryan expliquent les différentes étapes constituantes de la motivation : « D’une part, la théorie de l’autodétermination ou processus d’internalisation permet de distinguer six différents types de motivation qui se répartissent sur un continuum selon le degré d’autodétermination sous-jacent. Elle fait ainsi la distinction entre des types de régulation intentionnelle autodéterminée d’une part et contrôlée d’autre part, selon que le processus régulatoire s’avère le choix ou la complaisance, possiblement parfois le défi. Au bas de l’échelle, l’amotivation (concept qui s’apparente à la résignation acquise) signifie l’absence de toute motivation, extrinsèque ou intrinsèque, l’individu ne percevant pas de relation entre ses actions et les résultats obtenus.
 
Ces deux psychologues distinguent ensuite quatre types de motivation extrinsèque, regroupant un ensemble de comportements effectués pour des raisons instrumentales qui s’intériorisent davantage à chaque niveau. Ainsi, lorsque l’individu est motivé par une régulation externe, la source de contrôle est complètement externe, il agit par obligation, pour éviter des punitions ou obtenir des récompenses. L’action est ici contrôlée, le processus régulatoire s’assimile à la complaisance. Sous l’angle de la régulation introjectée, la source de contrôle s’internalise mais demeure contrôlante (l’individu s’impose lui-même pressions et contrôles). Lorsque le comportement est régulé par identification, c'est-à-dire choisi par l’individu lui-même, qui le valorise pour ses conséquences, on peut parler d’autodétermination. Lorsque l’individu atteint un degré plus élevé d’autodétermination, il fait preuve de régulation intégrée : il sent alors non seulement qu’il choisit mais qu’il détermine lui-même son comportement en cohérence avec d’autres schèmes de sa personne. Enfin, au niveau le plus élevé du continuum, se situe la motivation intrinsèque, lorsque l’individu effectue des activités volontairement et par intérêt pour l’activité elle-même, par plaisir »[4].
Nous relevons de cette typologie le constat suivant : plus l’individu est autodéterminé, autrement dit que la motivation est intrinsèque, plus les conséquences sont positives. De même, Gagnon et Brunel citent Deci et Ryan, « les récompenses et contrôles extrinsèques interfèrent avec la performance dans les tâches heuristiques, conceptuelles et intégratives alors qu’une régulation plus internalisée ou intrinsèque semble écarter ces effets négatifs »[5]. Autrement dit, les activités cognitives ne sont pas plus performantes quand elles sont « motivées » par une récompense.

La motivation, un besoin ?

Maslow et Herzberg considèrent la théorie de la motivation comme une réponse à un besoin. Pour ces auteurs, les théories de la motivation partent des besoins, c'est-à-dire des « manques » ressentis d’ordre physiologique, psychologique ou sociologique. Les besoins poussent à l’action, car ils créent des tensions que la personne veut réduire ou éliminer. Le comportement motivationnel lié aux besoins peut être décrit de la façon suivante : l’apparition des besoins incite à vouloir les satisfaire, d’où des actions en conséquence avec des résultats qui sont vécus comme des récompenses (si cela marche) ou des punitions (dans le cas contraire)6]Ces auteurs sont partis des découvertes issues de la psychologie animale, ce qui a conduit, selon Levy - Leboyer à donner beaucoup d’importance au rôle motivant du besoin insatisfait. Ce dernier admet l’existence des besoins dans les processus motivationnels mais la motivation dépend également d’autres facteurs : « on peut classer et définir les catégories de besoins que nous cherchons à satisfaire, mais il est faux de croire que la satisfaction d’un de ces besoins ouvre la voie au suivant, qui devient alors source de motivation »[7]. Il prend l’exemple suivant : « la réussite professionnelle ne tarit pas l’ambition, bien au contraire. Elle accroit l’estime de soi et relance le désir de réussir et les efforts pour y parvenir »[8]. Et de poursuivre : « certes, les besoins jouent un rôle dans les processus motivationnels, mais la motivation dépend de bien d’autres facteurs, notamment des processus cognitifs qui sont essentiels pour la mettre en œuvre »[9].
 
Pour Gagnon et Brunel, la motivation doit être intrinsèque pour être efficace. Elle doit donc provenir de l’individu lui-même, en fonction de déterminants et d’objectifs. En outre, pour ces deux auteurs, « la motivation intrinsèque et « l’internalisation » des valeurs et processus régulatoires amènent un meilleur apprentissage conceptuel, stimulent la performance scolaire, la créativité et la persistance et favorisent le développement et l’ajustement personnel »[10]. Comme nous le confirme Levy-Leboyer, « on ne fait pas d’efforts sans objectifs précis à atteindre ni sans représentation de ce qu’apportera l’objectif atteint »[11].
 
Dans cette première analyse, nous avons ainsi défini ce qu’était la motivation et dans quel cadre elle s’avérait être la plus efficace. La définition intègre l’individu dans un contexte qui lui est spécifique. La motivation est donc un concept dynamique qui a ses origines dans la perception qu’un [individu] a de lui-même et de son environnement et qui l’incite à choisir une activité, à s’y engager et à persévérer dans son accomplissement afin d’atteindre un but »[12]. Cette dernière dimension intègre l’individu en tant que tel, dans la perception qu’il a de contrôler certains paramètres qui lui sont propres. S’il n’y a pas de but, si ce n’est que pour obtenir une récompense, la motivation se révèle n’être efficace que sur le court terme.
 
 
 
Marie-Noëlle Tenaerts 
 
 
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[1] LOUART P. « Maslow et Herzberg, les théories du contenu motivationnel », CLAREE, IAE-USTL, 2002, p.3
[2] GAGNON C. et BRUNEL M-L, « Les raccrocheurs adultes : motivation et persistance aux études à l’ordre secondaire », Carriéro­logie, Revue francophone internationale, vol. 10, n°2, p.305 http://www.carrierologie.uqam.ca/volume10_1-2/17_raccrocheurs/indexhtml
[3] HUART T., « Un éclairage théorique sur la motivation scolaire : un concept éclaté en multiples facettes », in Cahiers du Service de Pédagogie expérimentale, Université de Liège, 7-8/2001, p. 222
[4] GAGNON C. et BRUNEL M-L, « Les raccrocheurs adultes : motivation et persistance aux études à l’ordre secondaire », Carriérologie, Revue francophone internationale, vol. 10, n°2, p.305
[5] GAGNON C. et BRUNEL M-L, « Les raccrocheurs adultes : motivation et persistance aux études à l’ordre secondaire », Carriérologie, Revue francophone internationale, vol. 10, n°2, p.305
[6] LOUART P., « Maslow, Herzberg et les théories du contenu motivationnel », CLAREE, IAE-USTL, 2002, p.3
[7] LEVY LEBOYER C., « Le cœur à l’ouvrage » in Sciences Humaines, n°92, mars 1999
[8] LEVY LEBOYER C., « Le cœur à l’ouvrage » in Sciences Humaines, n°92, mars 1999
[9] LEVY LEBOYER C., « Le cœur à l’ouvrage » in Sciences Humaines, n°92, mars 1999
[10] GAGNON C. et BRUNEL M-L, « Les raccrocheurs adultes : motivation et persistance aux études à l’ordre secondaire », Carriérologie, Revue francophone internationale, vol. 10, n°2, p.309
[11] LEVY LEBOYER C., « Le cœur à l’ouvrage » in Sciences Humaines, n°92, mars 1999
[12] HUART T., « Un éclairage théorique sur la motivation scolaire : un concept éclaté en multiples facettes », in Cahiers du Service de Pédagogie expérimentale, Université de Liège, 7-8/2001, p.222

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