Etude UFAPEC octobre 2018 par D. Houssonloge

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15.18/ET2 - Cinquante ans après Mai 68, l'égalité hommes-femmes en tension. Entre envies égalitaires et résistances conservatrices

Donner à chacun.e la possibilité d’être reconnu.e et de vivre comme un.e semblable sans que la pluralité humaine ne se décline en singularisations aliénantes.

Réjane Sénac

Introduction

La révolution de mai 68 a impacté tout l’Occident dans ses mœurs et a modifié en profondeur les rapports entre les sexes. Cinquante ans après, il nous a semblé essentiel de nous interroger et de faire le point sur l’égalité de genre, c’est-à-dire sur l’égalité entre les hommes et les femmes dans la société actuelle.

Peut-on parler d’égalité entre les hommes et les femmes en 2018 ? Les nouvelles générations sont-elles plus libres et épanouies dans leur genre ?

Vu l’objet social et le public privilégié de l’UFAPEC, nous avons mis le focus sur la parentalité et sur l’école.

Le modèle unifamilial d’avant mai 68 a bien changé. Le modèle du patriarcat, avec le père chef de famille qui fait carrière et qui détient l’autorité et la femme au foyer exclusivement épouse et mère d’une famille souvent nombreuse n’est plus le modèle prédominant. À l’heure actuelle, les jeunes restent aux études plus longtemps, ils démarrent leur vie de couple plus tard, les deux conjoints souvent travaillent et l’arrivée du premier enfant se passe également à un âge plus avancé, après l’acquisition d’un emploi stable et, parfois, après l’achat d’un logement. Enfin, la majorité des familles n’a plus en moyenne que deux enfants. À cela s’ajoutent de nouveaux modèles familiaux : familles recomposées, familles homoparentales et familles monoparentales, en augmentation, avec à leur tête essentiellement des mères. Cette diversité des modèles familiaux génère une diversité de rapports et de modes de fonctionnement intra-familiaux et professionnels[1].

Les femmes ont acquis aujourd’hui leur indépendance, elles travaillent, certaines ont fait leur entrée dans des domaines autrefois réservés aux hommes comme l’industrie chimique ou pharmaceutique[2]. En plus de leur vie professionnelle, elles continuent à s’investir fortement dans la sphère privée : ménage, soins et éducation des enfants… Nombre d’entre elles sont devenues cheffes de famille à part entière : séparées avec des enfants en garde principale, elles sont le pilier familial. Souvent présentées comme courageuses, ingénieuses ou même superwomen, il semblerait que l’image de la femme ait pris du galon depuis cinquante ans.

Les hommes, eux, ont renoncé bon gré mal gré au modèle patriarcal qui était le leur depuis des siècles. Ils composent aujourd’hui entre milieu professionnel, dans lequel on attend encore d’eux qu’ils fassent carrière, et vie familiale, où les attentes en matière d’implication sont beaucoup plus fortes. Régulièrement pointés comme immatures, égoïstes, absents dans leur rôle de père, les hommes actuels n’ont pas vraiment le beau rôle. Auraient-ils laissé des plumes dans la révolution de mai 68 ?

Ensuite, on ne peut aborder l’égalité des genres sans aborder la question fondamentale de l’inné et de l’acquis en matière d’identité sexuelle. Nait-on homme ou femme ou le devient-on en fonction de l’éducation que nous recevons ?

Si autrefois le rapport entre les sexes reposait sur ce que le sociologue français Pierre Bourdieu a défini comme la domination masculine[3], comment le nommer aujourd’hui ? Est-on encore dans un rapport de force ou peut-on parler d’égalité où on serait autorisé à vivre sa féminité et sa masculinité plus librement et en sortant d’un modèle unique ?

En tant qu’association représentative des parents et associations de parents d’élèves de l’enseignement catholique, l’UFAPEC tient, à travers cette étude, à questionner un enjeu de société majeur qui constitue l’un des fondements de nos sociétés modernes et démocratiques : l’égalité de genre. Cela inclut les hommes et les femmes, comme les minorités sexuelles. Cela concerne le droit et la non-discrimination[4] à l’école, au travail et dans l’exercice de la citoyenneté. Cela concerne encore les droits sexuels et reproductifs. Rendre effectives l’égalité des chances et l’émancipation de l’individu quels que soient son sexe et son orientation sexuelle est une responsabilité politique et sociétale. Notons que nos propos ne veulent en aucune manière entrer dans les débats de certains concernant « les théories du genre ». Il s’agit là d’un débat idéologique qui ne concerne en rien la question de l’égalité et du respect dont cette étude est aussi l’objet.

Précisons encore que les inégalités de genre ne sont pas une réalité isolée. Elles sont à aborder avec d’autres inégalités fondées sur l’origine ethnique, culturelle et sociale.

Dans une démarche d’éducation permanente et dans une perspective sociologique, notre objectif n’est pas de juger ou d’interpréter les faits, mais de donner matière au lecteur pour qu’il élabore lui-même des pistes d’interprétation et d’action. Pour reprendre l’idée de Pierre Bourdieu, il s’agit plutôt de donner des armes que de donner des leçons[5].

(télécharger l'étude complète ci-contre)

 

Dominique Houssonloge

 

[1] Alice Pierard, Quelle intégration des différents modèles de famille dans notre société ? Analyse UFAPEC n°18.16 http://www.ufapec.be/nos-analyses/1816-differents-modeles-de-familles.html

[2] Jobat.be, juin 2017 - De plus en plus de femmes en chimie et en pharma -

https://www.jobat.be/fr/articles/de-plus-en-plus-de-femmes-en-chimie-et-en-pharma/

[3] Pierre BourdieuLa Domination masculine, Paris, Le Seuil, 1998, coll. Liber.

[4] Sociologiquement, une discrimination est un comportement négatif à l’égard des membres d’un groupe vis-à-vis duquel nous entretenons des préjugés. Source : Fédération Wallonie-Bruxelles, Sexes et manuels, Promouvoir l’égalité dans les manuels scolaires, 2012, p. 12 - http://www.egalite.cfwb.be/index.php?eID=tx_nawsecuredl&u=0&g=0&hash=
7808fe4e708637e56ca6c08c849ea0c9da437042&file=uploads/tx_cfwbitemsdec/Sexes_et_manuels_Publication_2_pages.pdf

[5] Pierre Bourdieu, Intervention au Congrès de l'AFEF, Limoges, 30 octobre 1977, parue dans Le français aujourd'hui, 41, mars 1978, pp. 4-20 et Supplément au n° 41, pp. 51-57. Repris dans Questions de sociologie, Les éditions de Minuit, 1980, pp 95- 112 - http://www.homme-moderne.org/societe/socio/bourdieu/varia/cequep.html

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