Analyse UFAPEC décembre 2017 par JPh. Schmidt

34.17/ L'analphabétisme numérique : inévitable ?


Ayez le courage de suivre votre cœur et votre intuition. L'un et l'autre savent ce que vous voulez réellement devenir. Le reste est secondaire. 
Steve Jobs

 

Introduction

Depuis les années ‘90, notre société a pris le chemin de l’hyperconnectivité, le développement du numérique et d’internet faciliterait nos vies quotidiennes : démarches administratives, paiements en ligne, réseaux sociaux, prises de rendez-vous, réservations de loisirs, échanges d’informations via mail et tweet... Nous avons accès à une quantité d’informations, de collaborations et de services en ligne. Au cours des dix dernières années, les technologies liées aux médias électroniques ont connu un essor et une démocratisation sans précédent. Malgré cet essor foudroyant, sommes-nous tous égaux devant ces nouvelles technologies ?

L’illettrisme numérique handicape encore des familles. Peut-on encore accepter au XXIe siècle que des parents et des enfants subissent des risques d’exclusion par défaut d’utilisation des nouvelles technologies ? Le développement de l’analphabétisme numérique se caractérise par le fait que des personnes ne maitrisent pas les connaissances et les codes du langage et du matériel numériques[1], que leurs usages soient insuffisants pour leur permettre d’en tirer un bénéfice personnel ou d’exercer leur rôle de citoyen ; voire même, les écartent de divers domaines de la vie sociale. Dès lors, des fractures apparaissent. Après avoir défini la fracture numérique, nous verrons en quoi celle-ci engendre encore diverses inégalités auprès de notre population.[2] Nous verrons comment on pourrait les réduire et répondre aux enjeux majeurs de perspectives égalitaires et démocratiques que cela suggère. Ceci sera illustré par les derniers chiffres du baromètre 2017 de maturité numérique des citoyens wallons issus de la plateforme de la stratégie numérique de la Wallonie.[3]

Une fracture numérique toujours bien présente

Il y a près de dix ans, une analyse de l’UFAPEC[4] tentait de nous faire comprendre les différents types de fracture numérique. Et de nous montrer que les inégalités issues de cette fracture sont bien réelles, mais qu’elles sont nombreuses et complexes à identifier et à quantifier. De plus, cette analyse portait aussi le secret espoir que les jeunes générations puissent bénéficier d’un apprentissage réel à l’école tant dans l’utilisation des accessoires informatiques que dans l’éducation à la recherche de l’information, à l’esprit critique des outils et des démarches utilisées. L’analyse se terminait par le constat qu’aucune solution simple ne se dégage pour lutter contre la fracture numérique, ce concept est mouvant, en évolution constante comme les technologies de l’information et de la communication (TIC) elles-mêmes et leur influence sur notre société. Influence dont nous devons rester conscients et maîtres, pour que les TIC demeurent des outils aux services des hommes et non des instruments de pouvoir et de hiérarchisation sociale.[5]

Qu’en est -il quelques années plus tard ?

La digitalisation du monde s’accélère. Elle concerne la quasi-totalité des services (soins de santé, administration, recherche d’emplois, logement...). Le concept de fracture numérique a évolué. Cette expression, apparue durant les années ‘90, a été utilisée de manière fréquente. La sociologue Périne Brotcorne parle de fracture numérique désignant un large éventail d’inégalités liées à l’accès aux technologies numériques et à leur utilisation.[6] Dans une analyse du Centre Permanent pour la Citoyenneté et la Participation (CPCP)[7], Jérémy Dagnies[8] s’aventure de manière scientifique dans une redéfinition de la fracture numérique déclinée en huit degrés distincts.

« -   Fracture du premier degré : le hardware. Il s’agit de « l’accès à un appareillage informatique adéquat ». En effet, ceux qui ne possèdent qu’un GSM ancienne génération ne peuvent par exemple pas tirer profit des réseaux 3G et 4G.

-      Fracture du second degré : le software. Elle désigne « l’accès aux logiciels adéquats » (ce qui peut engendrer pour l’utilisateur un coût supplémentaire considérable).

-      Fracture du troisième degré : le réseau. Il s’agit de l’accès à une connexion Internet haut débit. Ainsi, certaines personnes disposent du matériel sans pour autant avoir de fibre optique dans leur quartier. De même, pour des raisons financières, on peut très bien concevoir qu’on ne puisse pas bénéficier d’un abonnement DATA, ou avec un quota de données réduit.

-      Fracture du quatrième degré : les compétences instrumentales. Elle désigne la « capacité à utiliser le matériel disponible de manière efficiente, c’est-à-dire en minimisant les ressources temporelles (temps nécessaire pour trouver l’information), financières, cognitives (efforts de concentration raisonnables) et psychologiques (pas trop de stress, d’anxiété...) ». Elle correspond aux compétences instrumentales telles qu’expliquées ci-dessus. Ainsi, même si l’on dispose d’un ordinateur dernière génération ainsi que d’une connexion haut débit, cela ne sert pas à grand-chose si l’on ne peut mettre en route l’équipement et se servir de l’application adéquate.

-      Fracture du cinquième degré : les compétences informationnelles et stratégiques. Il s’agit de la faculté « à utiliser les TIC de manière intelligente », c’est-à-dire rechercher, trier, comprendre et évaluer la qualité de l’information et en faire un usage stratégique, en d’autres termes bénéfiques pour la situation sociale et professionnelle de la personne.

-      Fracture du sixième degré : les contenus protégés. Elle désigne « l’accès aux contenus privés ou payants offrant des informations utiles ou de meilleure qualité ». Internet risque ainsi d’évoluer vers un système à deux vitesses, où l’on trouverait d’une part des contenus payants ou protégés, et d’autre part des contenus gratuits, mais incomplets ou de moindre qualité (une pratique qui se généralise entre autres sur les sites d’informations).

-      Fracture du septième degré : le risque. C’est la « capacité à se prémunir des risques liés à la recherche, à l’utilisation et au stockage de l’information (piratage, bug, panne...) ». Ce type de fracture, pourtant souvent ignoré, constitue un risque croissant avec la multiplication des actes de malveillance. Comment agir si l’on perd ses données, et comment prévenir ce désagrément ?

-      Fracture du huitième degré : l’indépendance. Il s’agit de la capacité à s’affranchir de l’usage des TIC et à fonctionner de manière autonome sans avoir obligatoirement recours aux TIC. Cela désigne la faculté de « mener une vie sociale de qualité et des activités professionnelles sans nécessairement faire usage des TIC ». Cette autonomie peut aussi bien être de type pratique (peut-on encore lire une carte routière si l’on est privé du GPS sur son smartphone ?) que de type psychologique (ne pas tomber dans une addiction vis-à-vis des TIC). Selon Jeremy Dagnies, « cette nouvelle fracture n’a encore jamais été évoquée comme telle. Elle fait référence non seulement à l’usage excessif des TIC susceptible de nuire à la qualité de vie individuelle et sociale, mais également à la situation de dépendance dans laquelle on peut se retrouver tant dans la sphère privée que professionnelle vis-à-vis des TIC. » Elle pose la question de savoir si l’on est capable de vivre ou travailler si, demain, il n’y a plus Internet pendant plusieurs jours ou semaines. »[9]

Cette typologie singulière affine une certaine compréhension des différentes fractures possibles. Elle a le mérite de cibler de nouveaux enjeux précis, mais elle garde deux niveaux fondamentaux de la fracture : celui relatif à l’accès difficile au matériel en constante évolution et celui relevant les inégalités sociales d’usage. Perine Brotcorne ajoute : « Il reste qu’on considère encore souvent que les inégalités face au numérique se réduisent au fur et à mesure que la population se connecte. Disposer d’un ordinateur ou d’une application mobile, d’une connexion internet et les utiliser sont les deux indicateurs généralement retenus pour repérer les cas de fracture numérique. Or, se limiter à ces dimensions, c’est oublier que derrière le taux d’utilisation se cachent des usages d’intensités et de natures diverses, qui demandent des compétences variables et qui sont loin d’offrir les mêmes bénéfices en termes de participation aux différents domaines de la société, comme l’emploi ou l’éducation par exemple. »[10]

Des constats

Comme on l’a vu ces fractures numériques fragilisent un public éloigné du numérique comme les jeunes en difficulté, les seniors, les personnes sans logement, les assistés sociaux, dont des personnes en difficultés avec l’écrit, les nouveaux migrants et tant d’autres. En Wallonie, le « baromètre citoyens »[11] a pour objectif de mesurer la maturité numérique des citoyens wallons, sous l’angle de l’équipement et des usages. C’est un outil indispensable pour la définition des politiques visant à développer les compétences numériques de tous les wallons.

Dans son baromètre 2017[12], la plateforme constate que 16 % des ménages wallons n’ont ni connexion, ni équipement numérique. Ce taux a largement baissé depuis dix ans où il atteignait encore 31 %. Pour les usages d’Internet, 82 % des citoyens wallons ont utilisé Internet au moins une fois au cours de l’année. De plus, 95 % des citoyens de plus de 15 ans ont un téléphone mobile. L’analyse des chiffres montre également que des fractures d’usages socio-cognitives subsistent au sein de la population wallonne. Les citoyens wallons non-utilisateurs expliquent principalement leur choix par l’inutilité perçue, soit par la complexité d’usage perçue d’un ordinateur, par l’âge et l’habileté jugés contraignants.

« Les facteurs qui influencent encore la fracture numérique sont dans un premier temps le genre. Les citoyens non connectés au domicile comptent plus de femmes (23 %) que d’hommes (12 %). Le nombre d’internautes féminins 76 % (stable) grandit moins vite que celui des internautes masculins 90 % (+5). A titre de comparaison, le taux de femmes internautes était déjà de 73 % contre 80 % d’hommes en 2012.

    L’âge. Les taux d’équipement et d’usages chutent après 60 ans. D’une dizaine de pourcents au plus pour toutes les classes d’âges, le taux de non-connectés passe à 26 % chez les 60-74 ans pour atteindre 69 % chez les 75 ans et plus.

    Le niveau d’éducation. Ce troisième facteur est l’un des plus déterminants. On dénombre 91 % d’universitaires ou de bacheliers connectés au domicile contre 59 % de diplômés de l’école primaire.

    La catégorie socio-professionnelle. Parmi les non-connectés, on observe 38 % de retraités et 15 % de demandeurs d’emploi. Si on croise la catégorie socio-professionnelle avec l’âge, on constate une majorité de non utilisateurs actifs âgés de moins de 60 ans composée de demandeurs d’emploi et d’étudiants (30 % des non connectés).

    Le niveau de revenus. Ce facteur est moins déterminant. 88 % des citoyens dotés de revenus perçus comme confortables sont connectés à Internet. Ce chiffre descend à 76 % quand les revenus sont perçus comme insuffisants.

    La composition du ménage. La présence de plus de deux adultes ou d’enfants dans le ménage favorisent l’accès et l’usage. Les ménages composés d’une personne seule sont les moins connectés. Parmi les non-connectés isolés, on dénombre 31 % d’hommes et 45 % de femmes. Les autres types de ménages comptent entre 1 et 18 % de non connectés. Cette situation risque de stagner puisque 2 % des ménages non-connectés envisagent d’adopter Internet à domicile au cours des douze prochains mois.

Autre constat, la plateforme distingue trois causes d’inégalité numérique en Wallonie :

-      Les inégalités d’accès : ce sont des personnes n’ayant pas la possibilité pratique d’utiliser l’ordinateur et/ou Internet. Ces inégalités d’accès sont liées principalement à l’âge, à l'(in)activité professionnelle, au type de ménage, au niveau d’éducation.

-      Inégalités dans les usages : ce sont des personnes qui ont une possibilité d’accès, mais sans usage direct ou avec des usages très limités. Ces inégalités dans les usages restent liées à l’inégalité des ressources cognitives et sociales.

-      Les inégalités dans la compréhension des processus et enjeux : ce sont des utilisateurs exploitant peu ou mal les ressources numériques. Ces inégalités d’usage différent sont liées aux compétences numériques et technologiques. »[13]

Des remèdes ?

Des réponses apparaissent possibles. Quels objectifs en matière de réduction de la fracture numérique ? Trois domaines apparaissent incontournables : l’équipement, la formation et la participation. Bien souvent, le travail de remède à la fracture s’arrête au premier domaine, l’équipement. La volonté politique répond en partie au fait de favoriser l’équipement des ménages, mais aussi des établissements scolaires. Il est indispensable de s’attarder sur la formation et la participation des usagers afin de permettre au plus grand nombre d’être actif, critique et responsable dans la diversité de la société de l’information. Travailler la fracture numérique c’est aussi lutter contre l’illettrisme, tout simplement. Mettre en œuvre les conditions des savoirs lire, écrire et naviguer pour appréhender les complexités des technologies de l’information. Le numérique peut aussi s’avérer être un déclencheur, une motivation innovante pour apprendre. Quelles mesures pour réduire cet analphabétisme numérique symbolisé par les fractures énoncées plus haut ? Faut-il y répondre de manière singulière ou de manière globale. La deuxième approche semble la plus intéressante, car elle touche tous les individus concernés.

  • Des remèdes au niveau de l’éducation permanente et du secteur jeunesse

Pour répondre aux premières fractures qu’on appelle hardware et software[14]ainsi que celle qui facilite l’internet à haut débit par un réseau performant, il faut pouvoir garantir l’accès et l’utilisation du matériel informatique. En Wallonie, le guide Espace Public Numérique (EPN)[15] permet et suggère par une structure de proximité ouverte à tous équipée de matériel informatique et connectée à Internet d’offrir l'accès et l'apprentissage à l'informatique, à Internet et à la culture numérique sous une forme conviviale, coopérative et responsable.[16] Des animateurs sont présents pour favoriser l’intégration sociale des personnes fragilisées et répondre à l’alphabétisation. Ils utilisent le multimédia pour encourager l’apprentissage. Dans le secteur jeunesse, des associations s’occupent également de l’éducation aux médias afin de répondre aux enjeux.[17] Toutefois, pour Gérard Valenduc, docteur en informatique (FUNDP) « Il serait illusoire d’attendre de la technologie qu’elle réduise elle-même les écarts qu’elle a creusés. L’évolution des interfaces vers le langage iconique et l’évolution de la communication vers le multimédia ne font pas disparaitre la nécessité de combattre l’illettrisme. Elles appellent plutôt à une nouvelle convergence entre l’alphabétisation et l’éducation aux médias. »[18]

Pour répondre aux autres fractures, il semble indispensable que le numérique profite à tous, jeunes, moins jeunes et seniors. En effet, le numérique est multicouche. Il est tributaire des compétences des utilisateurs. C’est ainsi que l’on parle de compétences de lecture et d’écriture, de compétences instrumentales, informationnelles et stratégiques. Le Conseil supérieur de l’Éducation aux médias (CSEM) a distingué douze catégories de compétences nécessaires à un usage averti des médias et suggère que celles-ci soient rencontrées de manière systémique lors des apprentissages.[19]

Soutenu par l’argent public, le travail associatif d’éducation permanente a un rôle important de réduction de la fracture numérique. « Elle se situerait dans l’acquisition de ressources sociotechniques permettant un usage autonome et réflexif des outils numériques. Cela se traduit par de la participation à la vie citoyenne et politique, des compétences numériques professionnelles minimales, du partage et accès à l’information, de l’introduction critique aux enjeux économiques, culturels, sociaux et politiques de la société numérique, etc. »[20] Nicolas Marion[21] insiste dans son analyse pour que cette approche : « s’applique le mieux à un travail du type de celui opéré par les associations d’éducation permanente, en particulier eu égard au troisième alinéa du premier article du décret de 2003[22] : le développement d’une société solidaire, critique reposant sur une citoyenneté active, informée et critique. » Combien d’associations d’éducation permanente se sont emparées de cette question et y répondent ? Est-ce suffisant ? Quelle volonté politique envisage de rencontrer ces enjeux ? Les différents ministres en charge prennent-il suffisamment la mesure de la problématique ?

  • Des remèdes au niveau de l’école

Depuis 1999, le gouvernement wallon a pris le train du numérique.[23] Différents plans comme Cyberécoles (1999-2005), Cyberclasse (2006-2013) et "Ecole numérique" (2014-2022) ont vu le jour, en collaboration avec l'ensemble des acteurs de l'enseignement.

L’agence du numérique souligne et entrevoit un avenir positif : « Si les résultats attendus de ces plans successifs n'ont pas toujours été au rendez-vous, les leçons ont été tirées et ce plan "Ecole numérique" constitue à la fois un aboutissement et le point de départ d'une nouvelle dynamique. Dans ce contexte, l'agence wallonne des télécommunications (AWT) formule quelques recommandations issues des nombreux retours d'expérience belges et étrangers. Trois facteurs doivent être conjugués pour réussir l'école numérique :

  • chaque établissement d'enseignement doit développer sa vision de l'apprentissage numérique;
  • le projet pédagogique doit être le point de départ, pour ensuite poser des choix technologiques;
  • l'ouverture doit être au cœur de la stratégie. »[24]

Ce ne sont que des recommandations, mais sont-elles suivies dans les faits ? Nous constatons bien souvent que dans certaines écoles le matériel est présent, mais celui-ci prend la poussière faute d’enseignants compétents en la matière, faute de choix pédagogiques, faute de référent numérique, faute de formation initiale des enseignants, faute de cadre organique.

A cela s’ajoute la question des parents dans l’accompagnement scolaire de leur(s) enfant(s) en réponse aux attentes de l’école. Un parent « illettré numérique », moins à l’aise ou n’ayant pas les connaissances de tel ou tel logiciel s’y retrouve-t-il face aux devoirs (tableau excell, word...), face à l’administratif où de plus en plus d’écoles passent par le mail ou des plates-formes en ligne pour informer les parents ? Organise-t-on cet accompagnement indispensable auprès des parents ? Non, pas de façon systématique et donc, dans ce cas, l’école pourrait creuser les écarts, les inégalités !

Pourtant l’école suggère et compte apporter sa pierre à l’édifice. Le travail du Pacte pour une enseignement d’excellence s’est penché sur la problématique du numérique. A la lecture de l’Avis n°3 du Groupe Central de mars 2017[25], réussir la transition numérique est un objectif clairement affiché. L’avis part du constat que : « La mutation structurelle et irréversible que représente la transition vers la société numérique s’accompagne d’un phénomène culturel ayant une incidence sur la vie de chacun et pour laquelle l’école a un rôle à jouer. Le rôle de l’école est, entre autres, celui de susciter et d’accompagner au mieux le développement des compétences nouvelles que la culture numérique induit, dépassant les considérations uniquement techniques, et touchant également aux sphères sociales et informationnelles. »[26]

L’avis n°3 propose de se focaliser sur plusieurs orientations :

  • « Définir les compétences spécifiques de la “société numérique” ;
  • Inscrire une réflexion relative au numérique dans les plans de pilotage ;
  • Assurer la supervision du Plan numérique ;
  • Accompagner les équipes éducatives ;
  • Former les enseignants aux compétences relatives à l’usage du numérique à des fins pédagogiques tant au niveau de la formation initiale que continuée ;
  • Equiper ;
  • Déployer un portail numérique au service des acteurs de terrain »[27].

L’UFAPEC sera attentive à la suite qui sera donnée. Les déclarations d’intention doivent, en effet, être suivie de moyens (tant matériels qu’humains et organisationnels) pour remplir des objectifs de mise en œuvre et d’actions concrètes pour l’ensemble du système scolaire et donc pour tous les élèves, en particulier ceux pour qui la fracture numérique est bien réelle.

Conclusion

« A l’heure où la plupart des services d’intérêt public se numérisent, les risques de mise à l’écart des divers domaines de la vie sociale sont réels pour tous ceux qui ne sont pas en mesure de mobiliser pleinement ces outils à des fins d’intégration sociale. »[28] Ce sont bien souvent ces personnes qui ont le plus de mal pour y accéder. Il faut pouvoir réduire ces fractures pour que cette transition numérique devienne une chance pour tous. Il est possible d’accompagner ces personnes dans l’autonomie numérique par des actions d’éducation permanente, via le monde associatif, ou bien par une éducation aux médias dès le plus jeune âge et ce, en même temps que le cours de lecture, d’écriture, de mathématique ou d’éveil... Des enjeux fondamentaux seront alors rencontrés comme par exemple : accéder à l’emploi, élargir les liens sociaux, pouvoir accéder au droit et à une certaine forme de connaissance, économiser de l’argent et du temps... pouvoir faire sauter ces barrières de l’exclusion grâce à la formation et l’éducation.

Dans son Mémorandum 2014, l’UFAPEC prenait note de l’évolution normale du numérique dans la vie de tous les jours et, a fortiori, à l’école. Déjà à ce moment, l’UFAPEC demandait que les compétences nécessaires à un usage averti des médias, en ce compris le numérique, soient rencontrées de manière systémique lors des apprentissages dès le fondamental.

L’UFAPEC soutient les réflexions du Pacte pour un enseignement d’excellence sur cette question, tout en insistant sur la nécessité de ne pénaliser personne en matière de compétence numérique tant chez les enfants et les parents que chez les enseignants. Ce qui est proposé doit être compréhensible et accessible à tous.

« Chaque individu doit pouvoir mettre à profit des possibilités offertes par les technologies pour mener ses propres projets et renforcer sa participation à la société. »[29] Le travail de réduction des inégalités doit se mettre en place. Trouver une nouvelle convergence entre l’alphabétisation et l’éducation aux médias, adaptée aux outils proposés et financièrement acceptables pourrait limiter certaines fractures. Il y a dix ans déjà que l’UFAPEC mettait ses espoirs dans l’école pour limiter la fracture numérique, en particulier des publics fragilisés : tout reste pourtant à faire ! A l’analphabétisme premier ne doit pas venir se rajouter l’analphabétisme numérique ; ce serait une exclusion supplémentaire pour les publics concernés.

 

 

Jean-Philippe Schmidt

 

 


[1] Par souci de compréhension pour le lecteur, le matériel numérique signifie les ordinateurs portables et fixes ainsi que smartphones et tablettes connectés ou non à internet.

[2] Nous nous basons sur des chiffres fournis par une enquête en Wallonie. La situation à Bruxelles ne doit pas être très différente.

[4] FERON, J., Les fractures numériques : comprendre les fractures du premier et second degré, Analyse UFAPEC 2008.

[5] Idem p. 6.

[6] Article de la sociologue Perine Brotcorne : http://inegalites.be/Inegaux-face-aux-technologies

[7] OTTAVIANI, E., Les fractures numériques - Comment réduire les inégalités ? Analyse CPCP 2016. http://www.cpcp.be/medias/pdfs/publications/fracture_numerique.pdf

[8] Chercheur et conseiller au Centre d’études économiques, politiques et sociales (Cepess).

[9] Jérémy DAGNIES, Les fractures numériques - Comment réduire les inégalités ? http://www.cpcp.be/medias/pdfs/publications/fracture_numerique.pdf

[10] Perine BROTCORNE, Inégaux face aux technologies numériques : un problème d’accès ? : http://inegalites.be/Inegaux-face-aux-technologies

[12] Idem p. 9.

[13] Ces données précieuses permettant la compréhension proviennent de : https://www.digitalwallonia.be/citoyens2017-inclusion-numerique/

[14] L’accès à un appareillage informatique adéquat et l’accès aux logiciels adéquats.

[15] "Un espace public numérique est un espace d'apprentissage et de médiation des usages numériques, qui a vocation de favoriser la participation citoyenne de tous à la société de l'information. L'espace propose des services diversifiés d'accès, de formation et d'accompagnement, adaptés aux besoins de ses publics. Spécialisé ou généraliste, fixe ou mobile, l'espace est intégré à la vie locale et contribue à l'animation numérique de son territoire." http://www.epndewallonie.be/a-propos-des-epn/

[17] Un exemple : Action médias jeunes (ACMJ) http://www.actionmediasjeunes.be/

[18] VALENDUC, G., Contre la fracture numérique, l’alphabétisation, article paru dans le Journal de l’ALPHA, « Alphabétic » n°182, 2012.

[19] Extrait de « Les compétences en éducation aux médias », édition du Conseil supérieur de l’Education aux médias, septembre 2013, p.12 :

[20] MARION, N., De la fracture numérique à l’Inégalité sociale: quelques perspectives pour l’éducation permanente, analyse 2016 de l’action et recherche culturelles asbl (ARC).

[21] Formateur à l’Université populaire d’Anderlecht.

[22] « La démarche des associations visées par le présent décret s’inscrit dans une perspective d’égalité et de progrès social, en vue de construire une société plus juste, plus démocratique et plus solidaire qui favorise la rencontre entre les cultures par le développement d’une citoyenneté active et critique et de la démocratie culturelle. » Cf. Décret relatif au soutien de l’action associative dans le champ de l’Éducation permanente du 1er juillet 2003, article 1er. Cf. également l’article 19, paragraphe 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques des Nations Unies du 16 décembre 1966 qui stipule que le droit à l’information est un droit de l’Homme.

[23] Pour la bonne compréhension du lecteur, il est à noter que l’équipement des écoles dépend des régions et que l’accompagnement pédagogique est financé par la Fédération Wallonie-Bruxelles.

[26] Ibidem 20 p. 89.

[27] Ibidem 20 pp. 99 et 100, voir tableau de l’opérationnalisation.

[28] Perine BROTCORNE, Inégaux face aux technologies numériques : un problème d’accès ? : http://inegalites.be/Inegaux-face-aux-technologies

[29] Idem. 

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