UFAPEC   Info Flash
18 février 2016
 
 
 
 
Elèves« Dys », TDA/H, HP… : au-delà des discours, quels outils pour les enseignants, les professionnels de la santé et les parents?


L’UFAPEC vient de consacrer deux études à la constellation des dys[1], des HP[2], des TDA/H[3], des autistes légers[4] (Asperger…) qui fréquentent l’enseignement ordinaire. Dans la première, nous avons laissé la parole aux enseignants et aux spécialistes en poursuivant l’objectif de comprendre leur point de vue, d’approcher au plus près leurs réalités. Dans la seconde, nous faisons l’écho des positions des parents et des élèves concernés. Ces deux volets ont distingués les publics afin de présenter une vision à 360° d’un enjeu de société crucial qui étend ses ramifications dans le monde médical, scolaire, familial, économique et social en termes d’intégration et de préparation à la vie active.

L’école occupe une place centrale dans notre société. Le lancinant « Sans diplôme, pas d’emploi » occupe tous les esprits, du coup tout le monde a son mot à dire sur le scolaire : les parents, les psychologues, les neurologues, les logopèdes, les coaches… Les enjeux scolaires sont devenus si importants que les enseignants sont mis à rude épreuve et ce surtout avec les enfants pour lesquels les apprentissages ne coulent pas de source. Le cadre légal incite les enseignants à différencier leur pédagogie, à mettre en place des aménagements raisonnables pour les élèves en situation de handicap, pour les élèves à besoins spécifiques. Mais les enseignants interrogés dénoncent de gros manquements dans leur formation initiale tant en termes d’apprentissage de pédagogie différenciée qu’en termes de connaissances des troubles d’apprentissage de leurs élèves. C’est pour cela que je dis toujours que je sais apprendre à celui qui sait apprendre, à celui qui est dans cette norme-là, mais je n’ai pas été formée pour les élèves qui ont des troubles d’apprentissage (paroles d’enseignante). Ils disent découvrir la dyslexie, la dyscalculie… à travers leurs élèves. Ils se sentent aussi un peu perdus et désorientés face à la multitude d’informations parfois contradictoires qui circulent sur les troubles d’apprentissage. Communiquer une information claire et compréhensible par tout un chacun fait partie des missions des chercheurs et des spécialistes. Si l’on vise une école et une société inclusives, il est important de veiller à ce que les professionnels respectent un cadre déontologique afin que l’encadrement de ces enfants à besoins spécifiques puisse se réaliser sur une base de confiance.

La notion d’aménagements raisonnables reste trop méconnue et trop floue pour les écoles. Ce qui donne lieu à de nombreuses dérives : abus de parents qui voient ces aménagements comme un moyen de réussite à tout prix, refus des enseignants par peur d’être inéquitable, passivité des écoles… Or les aménagements raisonnables n’ont comme seule raison d’être que de mettre l’élève dans les meilleures conditions afin de réduire la disproportion entre sa performance scolaire et ses compétences réelles. L’objectif principal est de supprimer l’effet double tâche ; comme certains automatismes ne sont pas acquis, l’enfant n’a pas la place pour de nouveaux apprentissages. Améliorons la communication sur les aménagements raisonnables dans toutes les strates de la société car un droit que l’on ignore est un droit que l’on n’exerce pas.

Certaines écoles sont volontaristes en matière de besoins spécifiques, mais l’on peut craindre un essoufflement des équipes éducatives, mettant en péril la pérennité de ces projets. Les écoles ont besoin de moyens, car le suivi des élèves « dys » exige du temps de formation et du temps de gestion (interface avec les parents, les professionnels, les autres enseignants, suivi des dossiers et des aménagements…). Il importe de reconnaitre le travail accompli et de donner un cadre légal clair pour, selon les propos mêmes de certains enseignants engagés dans cette dynamique, contraindre toutes les écoles à devenir « dysfriendly ». Si l’on veut un enseignement « d’excellence » pour tous les enfants, il convient d’ajuster les moyens, en budgets et en personnels, à ses ambitions.

Les parents des enfants à besoins spécifiques entament, de leur côté, lorsqu’ils en ont les ressources, un parcours du combattant et de longue haleine. Ils devront jouer le rôle d’ambassadeur pour leur enfant, rechercher des personnes adéquates pour l’accompagner tout en évitant la surenchère, entamer parfois un parcours administratif énergivore pour bénéficier de remboursements de la mutuelle, d’allocations familiales majorées… Les coûts sont énormes pour ces familles : honoraires des médecins, des thérapeutes, longs trajets pour voir des spécialistes, matériel scolaire particulier, impacts sur des choix professionnels, charge psychologique et stress… L’UFAPEC interpelle les instances politiques pour que la prise en charge par l’INAMI tienne compte du caractère permanent de tous ces troubles d’apprentissage.

Que deviennent les autres familles moins favorisées en termes de compétences et de moyens financiers ? Doivent-elles se résigner à l’échec scolaire voire à l’orientation vers l’enseignement spécialisé ou de qualification pour leur enfant, étant donné qu’elles ne peuvent pallier les manquements du système ? Il n’y a bien sûr aucun jugement de valeur sur ces enseignements. Ce qui est mis en cause, c’est le phénomène de la relégation, de l’orientation forcée, qui ne tient pas compte des aspirations, talents et lignes de force des élèves.

De plus en plus d’écoles optent pour la mise en place d’aménagements lors des sessions d’examens. Les élèves, les parents saluent et encouragent cette initiative. Elle n’est malheureusement pas suffisante. Si aucun aménagement n’est mis en place durant l’année, si l’élève dyslexique reste pénalisé par son orthographe et n’a pas droit à l’utilisation d’un correcteur orthographique, si l’élève dyscalculique se voit refuser l’utilisation de sa calculatrice, si l’élève dyspraxique ne peut pas utiliser son ordinateur, pouvons-nous encore parler d’une école qui prenne en compte tous les besoins des élèves et les aménagements pédagogiques nécessaires ? L’école n’est-elle pas censée préparer l’élève à s’intégrer dans la société adulte ? A utiliser les outils qui lui permettent de contourner son trouble et de retrouver sa place d’apprenant ? Ne devrait-on pas plutôt inciter et évaluer l’enfant sur sa capacité à faire appel à tous les outils qui lui sont disponibles ?

Des parents deviennent experts dans le trouble d’apprentissage de leur enfant. Ce n’est pourtant pas le rôle des parents d’informer un enseignant sur ce qu’est la dyslexie, la dyspraxie, etc., et sur leurs conséquences au niveau des apprentissages. Mais si cela n’a pas été fait au cours de la formation initiale, si les enseignants se disent dépourvus et en manque de moyens, les parents doivent-ils rester les bras croisés et attendre ? D’autant que les stratégies, les moyens donnés en rééducation, pour être réellement efficients, doivent être utilisés à l’école. L’enfant n’est pas que dyslexique ou dyscalculique une heure par semaine chez sa logopède. Les besoins spécifiques ne se limitent pas au temps passé chez son spécialiste. Oui, l’inégalité qui existe entre les familles est encore plus éclatante, révoltante quand les enfants, quel que soit leur contexte familial, ont ces besoins.

http://www.ufapec.be/nos-analyses/3515-dys-enseignants.html

http://www.ufapec.be/nos-analyses/0116-dys-parents.html

 


[1] Dys : dyslexique, dysorthographique, dyscalculique, dyspraxique, dysphasique, dysgraphique.

[2] Haut Potentiel. Dans la suite de l’étude, nous utiliserons HP.

[3] TDA/H : trouble d’attention avec ou sans hyperactivité.

[4] Décrit par Hans Asperger en 1944, ce syndrome est une forme d'autisme, touchant des sujets d'intelligence normale. Depuis 1980, le syndrome d'Asperger est, avec l'autisme, classé parmi les « troubles envahissants du développement » (TED) dans les classifications des troubles psychiques, à savoir le DSM-IV américain et le CIM 10 de l'Organisation mondiale de la santé. http://www.scienceshumaines.com/autisme-mieux-connaitre-le-syndrome-d-asperger_fr_4964.html

 
 
Siège administratif : Avenue des combattants 24
1340 Ottignies
Tel: +32 10 42 00 50
Fax: +32 10 42 00 59
info@ufapec.be
www.ufapec.be

Problème de lisibilité? Se désabonner de la newsletter