Analyse UFAPEC 2010 par M-N. Tenaerts

08.10/ Motivation en contexte scolaire : pourquoi certains réussissent et d’autres pas ?

Introduction

Mon enfant n’aime pas l’école, il est moins curieux que les autres… On dirait que l’école ne le motive pas. Cette brève locution traduit le sentiment de certains parents à l’égard de leurs enfants. L’école ne semble pas être intéressante… On rejette de cette manière la faute sur l’école. Et si la motivation devait venir de l’enfant lui-même ou de n’importe quel individu et ainsi être intrinsèque. Bien sûr certains facteurs peuvent inciter à motiver les enfants mais il n’est pourtant pas question de marchander, ce qui ne s’avère efficace…. que sur le très court terme.

Zoom sur la motivation intrinsèque

Pour Levy-Leboyer, « la motivation n’est pas un état statique, une caractéristique individuelle sans rapport avec l’environnement. C’est un processus qui met en relation l’individu et le contexte social et matériel dans lequel il se trouve. La motivation n’est donc ni indépendante de la personnalité, ni étrangère à l’environnement »[1].

Pour Gagnon et Brunel, « la motivation intrinsèque et « l’internalisation » des valeurs et processus régulatoires amènent un meilleur apprentissage conceptuel, stimulent la performance scolaire, la créativité et la persistance et favorisent le développement et l’ajustement personnel. Ces auteurs soulignent « que la théorie de l’autodétermination s’intéresse non seulement à la direction de l’action (buts, résultats) mais aussi à la question de son « énergisation », soit pourquoi ces résultats sont désirés »[3].
 
Viau, quant à lui, propose un modèle de la dynamique motivationnelle dans le cadre d’une activité d’apprentissage. « Issu des recherches d’approche sociocognitive, ce modèle de la dynamique motivationnelle implique que la motivation de l’élève a pour principales sources trois perceptions : la perception de la valeur qu’il accorde à une activité, la perception qu’il a de sa compétence à l’accomplir et sa perception de contrôlabilité, c'est-à-dire du degré de contrôle qu’il a sur son processus d’apprentissage et sur les résultats de celui-ci. Le modèle spécifie également que les principales conséquences de la motivation sont le choix qu’il fait de s’engager cognitivement dans l’activité, sa persévérance et sa performance »[2].
 
Les déterminants qui interviennent sur la motivation d’un individu sont question, comme nous l’avons vu, de la perception que l’individu a :
1.     La perception de la valeur d’une activité
La perception de la valeur d’une activité est « le jugement qu’un élève porte sur l’utilité et l’intérêt d’une activité en vue d’atteindre les buts qu’il poursuit »[4]. Autrement dit, si la tâche ne lui parait pas utile ou si le gain qu’il peut en recevoir ne lui semble pas suffisant, la motivation pourra en être affectée.
2.     La perception de sa compétence
La perception de sa compétence est « une perception de soi par laquelle un élève, avant d’entreprendre une activité qui comporte un degré élevé d’incertitude quant à sa réussite, évalue ses capacités à l’accomplir de manière adéquate »[5]. Dans ce cadre, l’autoévaluation a toute son importance. Les Individus qui se surestiment ou se sous-estiment risquent de connaître divers désagréments.
3.     Perception de contrôlabilité
Elle réfère au degré de contrôle que l’élève pense avoir sur le déroulement et l’issue d’une activité.
 
Pour Huart, « en général, les élèves les plus performants attribuent leurs succès aux efforts qu’ils fournissent ainsi qu’à leurs capacités intellectuelles, tandis que leurs échecs sont expliqués par des causes internes, transitoires et contrôlables comme le manque d’effort. Parmi les élèves faibles, deux profils attributionnels sont distingués. Certains se déchargent de toute responsabilité en attribuant systématiquement leurs échecs à des causes externes. D’autres attribuent leurs échecs à un manque d’effort mais il semblerait alors que cette cause était ‘préméditée’ ; anticipant l’échec, ces sujets usent d’une stratégie défensive en ne s’investissant pas complètement dans la tâche, de telle sorte à préserver une image positive d’eux-mêmes (si j’avais vraiment voulu, j’aurais pu réussir). En ce qui concerne les élèves caractérisés par une résignation acquise, forme extrême de la perception d’incontrôlabilité, les réussites sont attribuées à des causes externes comme la chance et les échecs à des facteurs internes, stables et incontrôlables comme les capacités »[6].

Le rôle des parents ?

Pour Rolland Viau, « rares sont les enfants qui ont la chance d’observer leurs parents en train d’apprendre et surtout de prendre plaisir à apprendre. Rares sont ceux qui ont l’opportunité de vivre des expériences d’apprentissage avec leurs parents »[7]. « Récompenser est apparemment la solution les plus évidente et la plus facile à mettre en œuvre. Pourtant, c’est celle qui renferme le plus de pièges. En effet, elle suppose les quatre étapes suivantes : évaluer le travail effectué ; communiquer cette information ; attribuer « la récompense » ; faire en sorte que cette récompense soit jugée équitable »[8]. Alors, comment être juste dans l’attribution ? Est-ce que la réussite d’un contrôle suppose l’achat d’un nouveau jeu vidéo ? L’école doit pouvoir être appréhendée par l’angle de ce qu’elle propose aux élèves et du sens qui lui est attribué. Certaines activités proposées ne font pas sens pour tous les élèves, dès lors, leur permettre de comprendre ce à quoi peut servir l’apprentissage de l’une ou l’autre chose peut être un facteur positif dans le développement de la motivation en contexte scolaire.

Le rôle des professeurs ?

Pour Thérèse Bouffard, « les enseignants peuvent contribuer activement à la motivation des élèves par divers moyens comme l’instauration d’un climat de travail adéquat et des propositions d’activités intéressantes, mais aussi par la disponibilité de leur soutien, de même que par la nature et le contenu de leurs commentaires sur la qualité du travail des élèves »[9]. Les résultats de cette recherche nous dévoilent « quatre stratégies jugées utiles par les enseignants et les élèves. La promotion de l’autonomie et la stimulation cognitive, l’accent sur la maîtrise des apprentissages et la promotion de la coopération entre les élèves, l’utilisation de récompenses ainsi que les félicitations sont celles qui semblent avoir le plus d’impact positif »[10]. « En revanche, les stratégies de motivation qui valorisent l’effort ou utilisent la punition et l’émulation positive sont considérées comme ayant peu d’effet sur la motivation des élèves »[11]. On comprend mieux le faible impact que peuvent avoir les punitions négatives : le renforcement négatif permanent dévalue les individus et annihile une partie de leur confiance en eux.

Conclusion

En guise de conclusion et d’après la recherche initiée par Thérèse Bouffard et son équipe, « les caractéristiques du profil motivationnel ne sont pas innées. Il s’agit de constructions mentales élaborées au fil des expériences d’apprentissage […] et ces constructions se modifient ou se consolident selon le résultat de ces expériences. A cet égard, sans dénier le rôle continu des parents dans le soutien de la motivation scolaire de l’enfant, les enseignants occupent une place centrale dans ce processus. Plus un élève vit des difficultés à l’école, plus il développe un réseau de croyances inappropriées qui se cristallisent avec le temps »[12]. A ce propos, Rolland Viau nous propose une typologie relative aux facteurs qui influencent sur la dynamique motivationnelle de l’élève. Il relève quatre série de facteurs : les facteurs relatifs à la classe, c'est-à-dire à l’enseignant, à l’évaluation, aux récompenses et sanctions, aux activités proposées, au climat de la classe, etc. ; ensuite, les facteurs relatifs à l’école, c'est-à-dire les règlements, les horaires, etc. ; les facteurs relatifs à la vie de l’élève autrement dit la famille, les amis, le travail d’appoint etc. et enfin, les facteurs relatifs à la société, les valeurs, la loi, la culture, etc[13]. Ces différents facteurs seront abordés dans la dernière analyse : les stratégies motivationnelles.
 
 
 
 
Marie-Noëlle Tenaerts 
 
 
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[1] LEVY LEBOYER C., « Le cœur à l’ouvrage » in Sciences Humaines, n°92, mars 1999
[2] VIAU R., « La motivation des élèves : pourquoi s’en préoccuper ? Et Comment ? », Actes de la conférence donnée dans le cadre du Colloque du Conseil provincial de l’Association des Enseignantes et des Enseignants Francophones du Nouveau-Brunswick (AEFNB), août 2001, p. 2
[3] GAGNON C. et BRUNEL M-L, « Les raccrocheurs adultes : motivation et persistance aux études à l’ordre secondaire », Carriérologie, Revue francophone internationale, vol. 10, no 2, p. 309
[4] ECCLES, WIGFIELD et SCHIEFELE cités par VIAU R., « La motivation des élèves : pourquoi s’en préoccuper ? Et Comment ? », Actes de la conférence donnée dans le cadre du Colloque du Conseil provincial de l’Association des Enseignantes et des Enseignants Francophones du Nouveau-Brunswick (AEFNB), août 2001, p. 3
[5] PAJARES cité par VIAU R., « La motivation des élèves : pourquoi s’en préoccuper ? Et Comment ? », Actes de la conférence donnée dans le cadre du Colloque du Conseil provincial de l’Association des Enseignantes et des Enseignants Francophones du Nouveau-Brunswick (AEFNB), août 2001, p. 3
[6] HUART T., « Un éclairage théorique sur la motivation scolaire : un concept éclaté en multiples facettes », in Cahiers du Service de Pédagogie expérimentale, Université de Liège, 7-8/2001, p. 230
[7] VIAU R., « La motivation des élèves : pourquoi s’en préoccuper ? Et Comment ? », Actes de la conférence donnée dans le cadre du Colloque du Conseil provincial de l’Association des Enseignantes et des Enseignants Francophones du Nouveau-Brunswick (AEFNB), août 2001, p. 1
[8] LEVY LEBOYER C., « Le cœur à l’ouvrage » in Sciences Humaines, n°92, mars 1999
[9] BOUFFARD T., « Les stratégies de motivation des enseignants et leurs relations avec le profil motivationnel d’élèves du primaire », UQAM, Programme des actions concertées, la persévérance et la réussite scolaires, UQAM, 2005
[10] idem
[11] ibidem
[12] ibidem
[13] VIAU R., « La motivation des élèves : pourquoi s’en préoccuper ? Et Comment ? », Actes de la conférence donnée dans le cadre du Colloque du Conseil provincial de l’Association des Enseignantes et des Enseignants Francophones du Nouveau-Brunswick (AEFNB), août 2001, p.4 

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