Analyse UFAPEC août 2015 par D. Houssonloge

11.15/ Vivre sous le seuil de pauvreté et espérer réussir à l’école, est-ce bien réaliste ?

Introduction

En Belgique, la question de la pauvreté des enfants est brûlante. Comme nous l’avons présenté dans une analyse précédente[1], la pauvreté infantile est en augmentation constante et touche aujourd’hui 1 enfant sur 5. Que fait l’école pour accueillir les élèves sous le seuil de pauvreté, affronter des réalités sociales de plus en plus difficiles et complexes ?

L’école est un des leviers essentiels pour sortir le jeune de la précarité et de l’exclusion sociale. Cela nous amène à nous pencher sur notre système scolaire et sur la question de la réussite des élèves précarisés. Vu le taux massif d’échec pour ces élèves, nombreux sont ceux qui pointent l’école comme lieu de reproduction des inégalités parlant d’ « ascenseur social » en panne. Qu’est-ce que cela représente ? Un élève dans la précarité peut-il espérer réussir à l’école ?

La question du coût scolaire et des grandes difficultés qu’elle génère pour les familles précarisées est, elle, aussi cruciale pour la scolarité de l’élève. Cette question sera abordée dans une prochaine analyse.

Une école ségrégative

L’objectif de notre système scolaire est d’être une école de la réussite pour tous quel que soit le milieu socio-économique de l’élève (Décret Missions de 1997) -  on parle aujourd’hui d’ « école de l’excellence pour tous »[2].

Les faits et les chiffres sont là : au niveau de l’OCDE[3], comme l’explique Ariane Baye psychopédagogue, même si dans tous les pays, les résultats scolaires des élèves défavorisés sont nettement  moins bons que ceux des milieux favorisés - notamment parce que les familles de ces derniers leur donnent des outils pour entrer sans encombre dans la culture scolaire  - et même si l’école n’a pas tout pouvoir, elle n’en reste pas moins un acteur majeur pour réduire les inégalités sociales. Or, les résultats de l’enquête internationale PISA 2012 montrent que la Fédération Wallonie Bruxelles tout comme la Flandre sont très loin dans le classement et que la plupart des autres pays font beaucoup mieux : en matière de différence de performances en math selon le niveau socioéconomique, la FWB arrive en 27eme position (la Flandre en 28eme alors que la Communauté germanophone est première).[4]

Ariane Baye explique ces chiffres : « Depuis le début des enquêtes PISA, on observe des écarts sociaux beaucoup plus réduits dans les pays scandinaves ou asiatiques, et des inégalités sociales bien plus importantes dans les pays qui comme le nôtre organisent la différenciation au niveau structurel. Ainsi, le Luxembourg, la Belgique et la France figurent systématiquement parmi les systèmes éducatifs où les écarts sociaux sont les plus conséquents. En termes structurels, on qualifie ces pays de ségrégatifs ou organisés selon le modèle de la séparation (Mons, 2007) dans la mesure où les élèves sont séparés relativement tôt dans l’enseignement secondaire en différentes filières d’enseignement (séparation horizontale) et où ils n’avancent pas tous au même rythme via l’utilisation massive du redoublement (séparation verticale). De plus, les systèmes éducatifs belges se caractérisent par de grandes différences entre écoles. Ce que l’on appelle le quasi-marché scolaire, c’est-à-dire la liberté du choix de l’école combinée à la concurrence entre les établissements scolaires, aboutit à la spécialisation de l’offre des écoles qui se spécialisent dans certaines « niches ».

En matière de retard scolaire, PISA 2012 a encore montré que la Fédération Wallonie-Bruxelles détenait le pire record : soit 48 % à 15 ans.[5] Et ce sont d’abord les élèves précarisés qui sont lésés par un système scolaire en plein « bug » ![6]

Pour la FWB, Les Indicateurs de l’enseignement 2012, 2013 et 2014[7] montrent également que les élèves issus des milieux socioculturellement défavorisés réussissent moins bien que les autres.[8]

L’étude du SeGEC [9] sur les résultats PIRLS de 2006 est également intéressante ;  elle complète ces résultats mais pointe aussi le manque de remédiation[10].

Dans les Indicateurs de l’enseignement 2014, à l’indicateur 9, on peut voir que les disparités socio-économiques en fonction du quartier où réside l’élève se marquent tôt et s’accentuent tout au long de la scolarité obligatoire[11] :

Dans le graphique  de l’IWEPS on voit clairement que parmi les facteurs qui entrent en compte dans la pauvreté infantile, beaucoup touchent aux conditions nécessaires à une bonne scolarité[12] : loisirs qui permettent l’ouverture sur le monde et l’épanouissement de l’enfant, endroit pour faire les devoirs, vêtements, chaussures, voyages scolaires, livres, PC et Internet, alimentation.[13]

D’autres chiffres permettent encore de préciser les résultats en Fédération Wallonie-Bruxelles : le taux d’échec moyen varie considérablement selon le bassin scolaire et c’est sans surprise les grands centres urbains avec leurs poches de pauvreté qui sont les plus touchés.[14]

Par ailleurs, il y a plus d’élèves de milieux défavorisés qui sont orientés vers le spécialisé : une recherche du GIRSEF[15]de 2008 portant sur la mobilité scolaire et la composition sociale des écoles fondamentales montre que, proportionnellement à leurs effectifs, les départs versl’enseignement spécialisé sont plus fréquents dans les écoles en discrimination positive que dans les autres. (…) Le taux d’envoi vers l’enseignement spécialisé est 3,5 fois plus élevé dans les écoles les plus défavorisées que dans les écoles les plus favorisées.[16] Pourquoi ces élèves doivent-ils aller dans l’enseignement spécialisé alors qu’ils ne souffrent d’aucun handicap ? Pourquoi l’école ordinaire ne peut ou ne veut-elle pas prendre en charge ces élèves issus de milieux précarisés ?

L’école en Fédération Wallonie-Bruxelles est défaillante par rapport à sa mission de faire réussir tous les élèves en particulier les élèves des milieux précarisés. Elèves précarisés riment trop souvent avec écoles ghettos, échec scolaire, manque de maitrise de la lecture et l’écriture, relégation vers le qualifiant ou les CEFA, exclusion, décrochage, pour autant qu’il y ait eu accrochage !

Alors où est la faille ? Pourquoi notre système scolaire ne parvient-il pas à être plus performant en termes de réussite scolaire ?

Egalité des chances ou égalité des acquis ?

C’est impossible disent les familles

En général, alors que les parents précarisés ont un mauvais souvenir de l’école, ils en attendent beaucoup pour leur enfant. Ils savent que c’est un enjeu majeur pour leur avenir et leur intégration, certainement la meilleure chance de sortir de la pauvreté.

Mais très vite les parents sont confrontés à des discriminations diverses comme l’échec scolaire,  un coût scolaire et para-scolaire exorbitant vu leur budget, le rejet de leur enfant par les autres élèves, le racisme envers les élèves d’origine immigrée, la gêne de leur propre enfant lorsque les parents viennent à l’école et enfin les jugements d’enseignants.

Les relations entre parents et enseignants sont rendues plus difficiles par le fait qu’elles sont généralement « asymétriques » ou hiérarchisées étant donné que la culture scolaire, la culture de l’écrit, est perçue socialement comme la seule bonne ou légitime. Les enseignants comprennent difficilement que les parents précarisés aient leur propre culture, leurs propres codes, leur propre façon de s’exprimer. Issus principalement de la classe moyenne, les enseignants connaissent peu de choses de la réalité et des conditions de vie des familles précarisées. En plus de cette méconnaissance, ils interprètent le silence ou l’absence des parents comme une démission ou un désintérêt pour la scolarité de l’enfant alors que cela peut s’expliquer aisément : une grande part des parents précarisés ne maitrisent  peu ou pas l’écrit ni les codes scolaires et éprouvent un malaise profond voire de la peur par rapport à l’école. Dès lors, après de vaines tentatives pour "éduquer et responsabiliser" les parents, la tentation est grande pour l’enseignant de reléguer l’élève précarisé qui « n’en veut pas ».[17]

C’est impossible disent les enseignants

Pour les enseignants, communiquer avec les familles précarisées semble très complexe et les problèmes annexes tellement importants, qu’il apparait bien difficile pour l’école de faire réussir les élèves. Les enseignants se sentent impuissants et expriment une lassitude face à des parents qui ne comprennent pas les règles et les enjeux de l’école au détriment de la scolarité de l’enfant.

Malgré une réalité sociale de plus en plus difficile, l’enseignant se perçoit encore très peu comme un acteur social limitant son champ d’action à l’éducatif et au pédagogique. Il en va de même pour les futurs enseignants.[18]

Un dialogue de sourds

Les enseignants et les parents précarisés issus de deux cultures différentes ont bien du mal à communiquer et à se comprendre autour de la scolarité de l’enfant. Ces mauvaises relations ont d’abord un effet négatif sur l’élève pris au piège des hostilités. Pas étonnant dès lors que cet élève décroche voire n’accroche jamais à l’école !

Si les parents précarisés sont sur la défensive et ont souvent un a priori vis-à-vis de l’école qui les a blessés et exclus par le passé, les représentations des enseignants peuvent elles aussi amplifier le malentendu. Selon Carole Asdih, psycho-pédagogue française, auteur d’une recherche menée dans des écoles primaires, les représentations des enseignants travaillant avec des publics précarisés témoignent encore d’une méconnaissance et de préjugés. Carole Asdih observe encore des sentiments d’impuissance, de déprime, de déception, de colère chez les enseignants et conclut que pour pouvoir évoluer dans leurs représentations vers plus de dialogue avec les familles, les enseignants ont d’abord besoin de reconnaissance et de soutien.[19]

Outre le manque de reconnaissance et de soutien que le système n’apporte pas à ses enseignants, beaucoup d’acteurs institutionnels et de terrain pointent la  formation initiale et continuée. Le groupe de travail de la Fondation Roi Baudouin auquel nous avons participéEcole maternelle, pauvreté et diversité culturelle. Mieux préparer les futurs instituteurs et institutrices préscolaires au soutien des enfants de milieux précarisés insiste : alors que les enseignants sont principalement issus de la classe moyenne voire supérieure, alors que, la réalité sociale est devenue de plus en  plus difficile confrontant les écoles à une grande misère humaine et à un échec scolaire massif chez les élèves défavorisés, la formation des enseignants ne prévoit pas d’approche interculturelle et sociale  pour l’enseignement.[20] Ceci est applicable à la formation des enseignants du primaire et du secondaire.

Un système inefficace et inégalitaire

Si fort heureusement des moyens supplémentaires sont alloués aux écoles dites à encadrement différencié qui accueillent les publics les plus précarisés, structurellement ils ont peu d’impact. C’est une goutte d’eau dans la mer face à un système scolaire qui est par définition discriminant socialement.

Dans son ouvrage L’école est-elle juste et efficace ?[21], le psychopédagogue Marcel Crahay identifie, à partir des études menées en Fédération Wallonie-Bruxelles, en France et en Suisse, comment se mettent en place des mécanismes qui favorisent la reproduction des inégalités scolaires :

  • Les inégalités de parcours liées à l’origine sociale se mettent en place très tôt : les enfants défavorisés sont davantage maintenus en maternelle et redoublent plus au début du primaire.
  • Les écarts de performances entre élèves d’origine modeste et d’origine favorisée continuent à se creuser tout au long du primaire et du secondaire. Les premiers redoublent plus souvent, sont orientés plus tôt et plus massivement vers des filières moins exigeantes ou moins prestigieuses. Ils sont aussi ceux qui sortent en masse de façon précoce du système sans diplôme secondaire.
  • Beaucoup moins d’élèves d’origine modeste arrivent dans l’enseignement supérieur, et ceux qui y entrent réussissent moins bien que les élèves de milieux plus favorisés alors que le parcours antérieur est comparable[22].

Cela amène Marcel Crahay à remettre en question ce qui paraissait comme une évidence dans notre système scolaire. Selon lui, il n’y a pas d’égalité des chances à l’école parce que selon que l’on provienne d’un milieu socioculturellement favorisé ou pas, nos chances de réussite sont bien différentes. Il est alors plus juste de tendre vers ce que le psycho-pédagogue nomme « l’égalité des acquis » et de s’en donner les moyens.

Choisir de devenir enseignant est plus qu’un métier, c’est une vocation avec à la base l’amour des enfants. Le professionnalisme et la motivation de la grande majorité des enseignants de notre pays ne sont plus à démontrer.Ce n’est donc pas les agents qu’il faut remettre en question mais le système scolaire ![23]

Pour une école intégratrice

Un pays en bonne santé est un pays qui œuvre à l’intégration du plus grand nombre et  qui prend soin du bien-être des jeunes et de leur avenir. Si l’école obligatoire ne peut porter toute la misère du monde, elle a au moins pour mission de réduire les inégalités sociales.

Or actuellement n’y a-t-il pas une contradiction profonde de demander aux élèves défavorisés et leur famille de rentrer dans un système sans leur donner les conditions de réussir ? Cela peut-il mener à autre chose qu’à de la démotivation, de la désespérance, du décrochage, du rejet et en fin de compte de l’exclusion sociale ?

L’UFAPEC est convaincue que pour mieux accueillir les élèves précarisés et leur offrir les mêmes chances de réussite, notre système scolaire doit se repenser fondamentalement ! Dans le sens d’une école de la réussite, elle insiste pour que l’accent soit mis sur les matières de base principalement dans le cycle 5-8 ans pour réduire la fracture sociale pour  permettre à un maximum de terminer le primaire avec un niveau suffisant pour réussir les 6 années du secondaire avec le plus faible taux de redoublement possible. Pour lutter contre l’échec scolaire et veiller à une continuité pédagogique, l’UFAPEC demande notamment que la remédiation immédiate soit généralisée et qu’il y ait une meilleure coordination entre la fin du primaire et le début du secondaire.

Par ailleurs, une école intégratrice présuppose deux principes fondamentaux :

L’éducabilité de tous

Philippe Meirieu, pédagogue français explique : « La pédagogie différenciée repose sur le « principe d'éducabilité » qui fait le pari que tout enfant est éducable. Mais si l'on veut que tout enfant puisse réussir, et en particulier acquérir les compétences nécessaires pour être citoyen dans des sociétés complexes comme les nôtres, on ne peut pas utiliser les mêmes méthodes avec tout le monde. Mes élèves de sixième avaient inventé un proverbe chinois pour la définir : « Il faut beaucoup de chemins pour que tout le monde arrive en haut de la montagne »... Si l'école propose un chemin unique, ceux qui sont adaptés à ce chemin courent devant tandis que les autres restent à la traîne et finissent par s'asseoir au bord de la route en disant que cela va trop vite pour eux et qu'ils n'y comprennent rien. [24]

La mixité sociale

Réduire les inégalités sociales à l’école et donc permettre la réussite du plus grand nombre passe par une réduction de la ségrégation sociale qui maintient des élèves ghettos et des écoles classes. Les économistes belges Jean Hindriks et Guillaume Lamy expliquent : « les résultats scolaires sont issus d’une activité en classe et dans une école. En concentrant les élèves de milieux favorisés dans les meilleures écoles et classes, notre système scolaire donne un avantage supplémentaire à ceux qui sont déjà avantagés. La ségrégation sociale pose donc un problème d’équité. En effet, il en ressort une diminution de l’égalité des chances si les écoles de riches surclassent les écoles de pauvres avec en filigrane une reproduction des inégalités sociales héritées des parents. Les bons élèves participent mutuellement à produire de meilleurs résultats et les mauvais élèves se découragent mutuellement. Un certain nombre de travaux ont permis de mettre en évidence l’existence de ces effets de pairs, promouvoir la mixité sociale, c’est donc chercher à corriger un handicap initial pour donner via le système scolaire des chances égales aux individus dans la vie. »[25]

Voici les principales pistes avancées par le monde de la recherche, les acteurs institutionnels et scolaires, para-scolaires, l’aide à la jeunesse, les organismes de défense des droits de l’enfant et de lutte contre la pauvreté pour amener des changements structurels permettant enfin la réussite de tous et des élèves précarisés :

  • plus de moyens et une meilleure mobilisation des moyens pour les écoles à encadrement différencié qui accueillent les publics les plus précarisés, notamment l’engagement de travailleurs sociaux qui peuvent être de véritables médiateurs entre l’école et les familles, qui aideront à aller au-delà des préjugés;
  • plus de reconnaissance et de soutien des enseignants qui travaillent avec les publics précarisés;
  • une approche et un contact avec la diversité culturelle et sociale dans la formation initiale et continuée des enseignants. Cela permettra une reconnaissance de la culture des familles populaires à l’école, un dialogue voire même un partenariat entre l’école et la famille, d’égal à égal dans l’intérêt de l’enfant.
  • La coéducation qui prend  les parents en considération dans le développement des apprentissages et de la vie scolaire des enfants;[26]
  • une pédagogie intégratrice et différenciée en fonction de l’élève;
  • plus de remédiation interne et directe à l’école et donc moins de redoublement dont on connait les effets négatifs et pervers. Ceci permettra également de lutter contre une marchandisation en croissance des cours particuliers dont seules certaines familles peuvent user et abuser.
     

Une directrice d’école fondamentale :

«Notre école, en encadrement différencié, compte 250 élèves et 20 nationalités différentes, dont beaucoup de primo-arrivants et d’enfants d’immigrés ou du quart-monde belge. Les parents ne connaissent souvent pas (ou peu) la langue française. Ils rencontrent des problèmes de travail, administratifs, de logement, financiers, etc. Nous constatons de nombreuses situations de précarité. Certains enfants ne sont pas propres, viennent avec un pyjama sale sous les vêtements, arrivent sans sous-vêtements. On explique aux parents qu’il faut mettre un slip, des chaussettes, qu’il faut les laver. On donne discrètement des vêtements, puis on se rend compte qu’ils les mettent une semaine ou deux et qu’ils les jettent, parce qu’ils n’ont pas les moyens de les laver. On prépare de la soupe, des sandwichs, des pâtes pour les enfants qui n’ont rien à manger. En tant que directrice, mon rôle est d’aller vers les parents, de tisser peu à peu une relation de confiance avec eux, dès la maternelle. Très souvent, ils sont en retrait. Ils ont peur d’être jugés. Il faut aller les chercher, leur expliquer les codes de l’école. Ils sont très soucieux de la réussite de leur enfant. Ils veulent être sûrs qu’on les fait travailler, pour qu’ils aient un bon diplôme et une vie meilleure que la leur. Quand la confiance est établie, ça rend les choses plus faciles pour les apprentissages. Tous les mercredis, nous organisons les « brins de causette », pour parler avec les parents de la santé des enfants, expliquer ce qu’est un jeu de société, etc. On les invite à venir jouer en classe avec les enfants. Nous filmons les apprentissages des élèves de maternelle, et nous projetons le film à la réunion de parents de septembre. Nous leur prêtons des livres. Heureusement, nous sommes une équipe très soudée, solidaire, et nous pouvons compter sur une série de partenaires : PMS, ONE, Association interrégionale de guidance et de santé, ludothèque, bibliothèque, mamans-relais, etc. On fait tout ce qu’on peut pour amener le plus loin possible ces enfants qui n’ont pas les mêmes chances que les autres au départ. Nous veillons à les ouvrir à un maximum de choses, à leur offrir des activités et un environnement de qualité. Nous sommes très fiers de nos élèves. Malgré les conditions dans lesquelles ils vivent, ils se débrouillent vraiment bien. Il ne faut pas stigmatiser les écoles comme la nôtre, même si elles doivent se poser plus de questions et mettre plus de choses en place que les autres pour que ça fonctionne. Nous scolarisons aussi des enfants de cadres, qui nous disent : « On apprécie le dynamisme de l’école, et on vous fait confiance ! »[27]

Conclusion

Notre système scolaire reste ségrégatif et amplifie les inégalités sociales. Il faillit à sa mission de faire réussir le plus grand nombre et de l’amener à l’émancipation sociale. Peu de chance donc pour un élève précarisé de réussir ses études, d’éviter l’échec, le décrochage et la relégation quand il n’est pas exclu du système scolaire, tombant à son tour dans l’exclusion sociale.

Parce que la mission de l’école obligatoire, de la maternelle au secondaire, est d’être non pas une école d’élites mais une école de la réussite pour tous, notre système scolaire doit se repenser fondamentalement. Il en va de l’avenir de nombreux jeunes comme de celui de notre société.

Les enquêtes et recherches internationales ont montré que dans plusieurs pays, à niveau de pauvreté égal, d’autres systèmes d’enseignement, permettaient une réduction des inégalités. Cela passe par un soutien, une reconnaissance et une meilleure formation des enseignants. Cela passe par un changement de regard sur la précarité et sur la culture populaire et notamment la conviction de l’éducabilité de tous. Enfin cela passe par une volonté politique forte de renverser la vapeur, par une école plus équitable qui visera l’égalité des acquis avec des moyens correcteurs pour les publics défavorisés. En tant que parent, acteur scolaire, citoyen quel rôle prendrons-nous dans ce grand défi que vit l’Ecole ?

 

Dominique Houssonloge 

 

 

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[1]Dominique Houssonloge, Un enfant sur cinq sous le seuil de pauvreté en Belgique Que fait-on ? Analyse UFAPEC 2015 -  http://www.ufapec.be/nos-analyses/0615-enfance-pauvrete/

[2]La Communauté française, pour l'enseignement qu'elle organise, et tout pouvoir organisateur, pour l'enseignement subventionné, poursuivent simultanément et sans hiérarchie les objectifs suivants : 1° promouvoir la confiance en soi et le développement de la personne de chacun des élèves; 2° amener tous les élèves à s'approprier des savoirs et à acquérir des compétences qui les rendent aptes à apprendre toute leur vie et à prendre une place active dans la vie économique, sociale et culturelle; 3° préparer tous les élèves à être des citoyens responsables, capables de contribuer au développement d'une société démocratique, solidaire, pluraliste et ouverte aux autres cultures; 4° assurer à tous les élèves des chances égales d'émancipation sociale. Décret définissant les missions prioritaires de l'enseignement fondamental et de l'enseignement secondaire et organisant les structures propres à les atteindre. Article 6. 1997

[3]L’Organisation de coopération et de développement économiques est un forum au sein duquel 30 démocraties de marché œuvrent de concert pour relever les défis économiques, sociaux et de gouvernance que posent une économie chaque jour plus mondialisée. Ces 30 économies représentent 75 % du commerce mondial. http://www.oecd.org/fr/lesessentiels/38119931.pdf

[4]Ariane Baye, Les causes structurelles de l’injustice faite par l’Ecole aux élèves défavorisés. Bruxelles, 12 juin 2014 in Colloque organisé par la Fondation Roi Baudouin Les causes structurelles de la pauvreté des enfants PISA 2012. http://www.kbs-frb.be/uploadedFiles/2012-KBS-FRB/05)_Pictures,_documents_and_external_sites/12)_Report/2014
_PauvreteDesEnfants_NoteArianeBaye.pdf

[5]Op. cit.

[6]Voir Annexe 1

[7]Voir Annexe 2

[8]Le décret du 27 mars 2002 relatif au pilotage du système éducatif de la Communauté française confie à la Commission de pilotage le soin de doter notre enseignement d’un système cohérent d’indicateurs : http://www.enseignement.be/index.php?page=26998

[9] SeGEC : (Secrétariat Général de l’Enseignement Catholique)

[11]Annexe 3

[12]IWEPS, Regards sur la pauvreté et les inégalités en Wallonie Anne-Catherine GUIO, Un éclairage sur les différences interrégionales et les sous-populations les plus fragilisées et Christine Mahy, Témoignages de personnes en situation de pauvreté et d’acteurs de terrain, relayés par le Réseau wallon de Lutte contre la Pauvreté. N°16, septembre 2013.

[13]Voir Annexe 4

[14]Enseignons.be, Le taux d’échec varie selon le bassin scolaire, 7/08/2013 -http://www.enseignons.be/actualites/2013/08/07/echec‐scolaire‐bassinVoir Annexe 5

[15]GIRSEF : Groupe interdisciplinaire de recherche sur la socialisation, l’éducation et la formation, groupe de recherche pluridisciplinaire fondé en 1998 au sein de l’Université catholique de Louvain)

[16]Thérèse-Marie Bouchat, Bernard Delvaux et Geneviève Hindryckx, Mobilité scolaire et composition sociale des écoles. Le cas de l’enseignement fondamental en Communauté française de Belgique. GIRSEF Les cahiers de recherche en éducation et formation. N° 62 Juin 2008, pp. 13-14 - https://www.uclouvain.be/cps/ucl/doc/girsef/documents/cahier62_Bouchat_Delvaux
_et_al(1).pdf

[17]Voir les témoignages de parents en Annexe 6

[18]Voir les témoignages d’enseignants à l’Annexe 7

[19]Carole Asdih, Collaborer avec les parents pour accompagner la scolarité? Représentations des enseignants et pratiques professionnelles. In EFG, no. 16, 2012, pp. 34-52

[20]Fondation Roi Baudouin. Ecole maternelle, pauvreté et diversité culturelle. Mieux préparer les futurs instituteurs et institutrices préscolaires au soutien des enfants de milieux précarisés.  2014

[21]Marcel Crahay, L’école est-elle juste et efficace ? De l’égalité des chances à l’égalité des acquis. De Boeck, 2ème édition revue et actualisée. Bruxelles, 2012, p. 180.

[22]Idem.

[23]Entrées libres. N°89, mai 2014, pp. 2-3

[24]Profession : pédagogue. Propos recueillis par Martine Fournier. Rencontre avec Philippe Meirieu in Sciences humaine. 01/01/2004 - http://www.scienceshumaines.com/profession-pedagogue_fr_3743.html Lien vérifié le 15/06/2015

[25]Jean Hindriks et Guillaume Lamy,Retour à l’école, Retour à la ségrégation ? Itinera institute analyse. 2013 pp 13-14. http://www.itinerainstitute.org/sites/default/files/articles/pdf/rapport_fr_1.pdf   Lien vérifié le 15/06/2015

[26]Voir notamment à ce sujet Michaël Lontie,  La coéducation en maternelle. Analyse UFAPEC, février 2014 N°06.14 - http://www.ufapec.be/nos-analyses/0614-coeducation/

[27]Entrées libres. N°89, mai 2014, p. 7

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