Analyse UFAPEC 2011 par C. Van Honsté

33.11/ A chaque élève son coach ?

Introduction

Au départ réservé au monde du sport, le coaching pénètre aujourd'hui tous les domaines de la vie : vie de famille, vie amoureuse, scolarité, travail, etc. On parle alors de life coaching, love coaching, coaching d'entreprise, coaching scolaire, coaching parental,... Le coaching est aujourd'hui un mot à la mode ! Le coaching scolaire a fait son apparition il y a une dizaine d'années environ. Le métier commence à davantage se professionnaliser, via de nombreuses formations, et de plus en plus d'élèves y ont recours. Mais qu’est-ce qui se cache derrière ce concept de coaching ? En quoi consiste concrètement un coaching scolaire ? Quelles sont les implications de l'entrée du coaching dans la sphère de l'école ?

Très peu de recherches se sont intéressées à cette forme de coaching. Pour étayer cette analyse, nous nous sommes donc basés sur des témoignages de deux élèves ayant suivi du coaching scolaire (extraits en annexe), d'informations recueillies auprès d'une coach scolaire, de l'analyse critique d'informations se trouvant sur des sites de coaching, d'articles de presse, de livres de coaching,... Nous manquons d'informations objectives sur le sujet, principalement sur la part des jeunes qui demandent un coach, sur la nature de la décision de suivre des séances de coaching et autres. Mais en l'absence de telles sources, à nous d'interpréter et de porter un regard critique sur ce phénomène...

Vous avez dit coaching ?

D'où vient cette expression de « coaching » ? Le terme anglais « to coach » peut se traduire par « entraîner », « motiver », « accompagner ». Étymologiquement, il provient du mot « coche » qui était au XVIe siècle une voiture tirée par des chevaux servant au transport de voyageurs (et conduite par un « cocher »). Le cocher ('coach') peut alors correspondre à un passeur, un guide, qui amène, accompagne, des voyageurs d'un point A à un point B[1].

Les livres et sites Internet sur le coaching nous donnent certaines caractéristiques de ce type d'intervention... Le coach viendrait, en partenariat avec son client, l'accompagner, pour lui permettre d'optimiser ses atouts, de résoudre un problème, de prendre conscience de ses ressources, de mener à bien un projet. Le coaching se démarquerait en ce sens d'un conseil ou d'une formation puisque ce serait l'individu qui trouverait lui-même les solutions à ses problèmes : il s'agirait d'un espace de co-construction (de solutions, d'un projet) entre le coach et le coaché. Ce serait la relation intersubjective entre la personne et le coach qui serait mise en avant dans l'intervention du coaching. Cette forme d’intervention postule alors que « le coaché a, en lui, les compétences et le potentiel pour trouver ses propres solutions et que le coach agit comme catalyseur, un facilitateur de changement, en mobilisant ses énergies »[2].

Le coaché ne serait donc pas un « assisté » : il serait actif dans la relation d'échange. Le but affiché du coaching est alors de favoriser l'autonomisation du coaché, de le responsabiliser. Sur de nombreux supports de coaching, nous pouvons trouver cette célèbre maxime : « donnez un poisson à une personne, il mangera une fois. Apprenez-lui à pêcher et il mangera toute sa vie. » Le coach ne « donnerait pas un poisson » à une personne (soit lui donner les solutions), il lui « apprendrait à pêcher », à le responsabiliser, à être autonome et à trouver lui-même les solutions.

Le coach se distinguerait aussi d'un psychologue et le coaching ne serait pas une thérapie. L'objectif du coaching ne serait pas d'apaiser une souffrance psychique et le coach ne serait pas un expert d'un problème « psychologique » du patient. Le coaching se définirait alors comme un travail ponctuel, dans « l'ici et maintenant », poserait la question du « comment », plutôt que du « pourquoi », viserait l'amélioration d'une situation, par une personne qui va responsabiliser le demandeur[3]. Pour reprendre une métaphore d'une coach scolaire, si une personne s'aperçoit qu'elle a une poubelle dans sa maison, un psychologue irait sortir la poubelle, l'ouvrirait, et analyserait tous les déchets s'y trouvant. Le coach irait quant à lui donner les moyens à la personne de prendre la poubelle, et de la sortir... Il la rendrait autonome, lui apprendrait à se débrouiller, à continuer seule. « Le coach est une sorte d'accompagnateur de l'innovation personnelle, (…) Avec un coach, on débat sur soi-même en évoquant des questions pour lesquelles on est habituellement seul. Et en partie mal voyant. Tant il est vrai que, ne nous voyant pas nous-même, beaucoup de choses nous échappent »[4]... 

Mais un psy, un conseiller ou un formateur travaillent également dans la même optique qu'un coach. Il ne s'agit en aucun cas de transformer le demandeur en assisté, mais bien de le rendre actif de sa propre vie, de le rendre autonome et de le responsabiliser. La tendance à l'heure actuelle, dans de nombreuses sphères de la société, est au travail en réseau, au partenariat, à la responsabilisation, à l'activation. Il en va de même dans le cadre de la recherche d'emploi par exemple. Aujourd'hui, on vise à ce que la personne au chômage soit pro-active, active dans sa recherche d'un travail, trouve elle-même son orientation, valorise ses compétences tout en étant guidée et soutenue par un agent du FOREM ou autre. De plus, l'intervention du coaching est aussi en quelque sorte une thérapie puisqu'il s'agit de trouver les solutions à un problème, de débloquer une situation, de s'interroger sur sa propre vie, de prendre conscience de sa situation, de ses capacités, etc.

Alors en définitive, qu'apporte un coach par rapport au psy, au conseiller ou au formateur ?Sont-ils à ce point synonymes qu'ils sont tant confondus ? L'intervention du coaching est en ce sens « spécifique » puisqu'elle crée un climat de confiance, d'alliance, favorisant la co-construction, permettant au coaché d'apporter les solutions à sa situation, solutions qu'il détient déjà. Le coach écoute, accepte et ne juge pas. Il a la capacité « d'identifier les véritables enjeux du coaché dans la profusion d'informations et la confusion »[5], en recontextualisant les propos, en permettant la réflexivité, la prise de distance. Le coach ne conseille pas véritablement le demandeur, il l'aide à se conseiller lui-même. Et, à la différence d'un psychologue, le coach n'est pas un expert en psychologie, en thérapie ou un spécialiste des maladies et troubles mentaux divers. Le coach est davantage dans l'action, contrairement à un psychologue qui se situerait davantage dans l'introspection. Le coach est formé pour accompagner l'individu, le soutenir, le guider dans les projets qu'il souhaite...

Le coaching scolaire

Originaire du monde sportif, le coaching a pénétré le domaine de l'entreprise. Cela peut s'expliquer par la convergence de certains enjeux entre ces deux domaines : compétition, performance, recherche d'excellence, d'amélioration de soi... Depuis quelques années, le coaching entre pourtant dans la sphère scolaire ; les enjeux seraient-ils les mêmes ? L’école transformerait-elle les élèves en sportifs de haut niveau, soumis à la loi de la compétition, de la performance ? Dans ce type d'intervention, il s'agit de « travailler sur soi, dans une perspective scolaire »[6]pour améliorer une situation, un blocage, éviter que l'élève ne bascule dans l'échec scolaire ou lui permettre de combler une lacune en matière de scolarité. Par contre, contrairement au monde sportif, il ne s'agit pas de « recevoir la médaille d'or », car toute amélioration de la situation du jeune qui suit du coaching scolaire, aussi minime soit-elle, est perçue comme une victoire. C'est l'amélioration qui est visée, pas la première place...

« Nous avons constaté le nombre important d'élèves qui abandonnent l'école, faute d'être entendus. Nous avons noté le nombre tout aussi élevé d'élèves que l'école fait doubler, recommencer une année, alors que la plupart des études montrent l'inefficacité de cette mesure. Nous avons constaté le pourcentage alarmant de jeunes qui terminent leur cursus scolaire avec un, deux, trois ans de retard. Nous avons rencontré un nombre important de jeunes découragés voire meurtris par l'école, si ce n'est en colère contre elle. Tous ces jeunes ne sont pas des incapables (…) Le métier d'enseignant a changé et « élève » est devenu un métier »[7], nous dit G. Gabriel dans son livre sur le coaching scolaire. Le coach entre donc dans le domaine de l'école, en périphérie de celle-ci, auprès des logopèdes, enseignants, professeurs particuliers, assistants sociaux, psychologues, éducateurs et autres, qui visent tous la réussite scolaire de l'enfant.

Le coach scolaire veille à « aider le jeune à prendre conscience de ses enjeux, à tirer parti de ses ressources, à atteindre ses objectifs »[8]. En séance de coaching scolaire, le jeune va être aidé dans sa scolarité, par divers outils et par le dialogue. Mais le coaching scolaire n'est pas un cours particulier. Bien que de nombreuses entreprises de cours particuliers nomment leurs professeurs des « coachs » (alors qu'ils n'ont aucune compétence pédagogique ou dans le coaching), il s'agit bien ici de distinguer les deux. Un cours particulier est habituellement un cours privé, individuel, pour aider l'enfant dans une matière scolaire précise, un chapitre d'un cours de mathématiques par exemple, une aide aux devoirs, un soutien scolaire, un apprentissage d'une méthode de travail. Certes, les objectifs d'un cours particulier et d'un coaching scolaire peuvent se rejoindre, mais le coaching a une visée plus large. « Le coaching semble reposer avant tout sur une position 'méta', de distance à soi-même, de sortie provisoire de soi afin de se construire »[9]. De plus, il « ne vise pas la matière mais cible l'origine même du problème. Il étudie l'ensemble des problèmes afin de proposer des solutions efficaces et adaptées, que ce soit l'attitude face aux études, un comportement non adapté, un manque de confiance en soi, un problème de démotivation, une croyance limitante, un manque de méthode, ... »[10].

Quels sont alors les objectifs de l'intervention de coaching scolaire ? Tout d'abord, il s'agit d'apprendre une méthode de travail et un mode d'organisation adaptés à l'enfant. « En permettant à l'élève d'être moins stressé, et davantage investi dans sa scolarité, le coaching permet à celui-ci de ne plus se sentir submergé »[11]. Le coach se donne également comme objectif de redonner confiance en lui à l'élève, le motiver, l'encourager, éventuellement éliminer l'excès de confiance de l'enfant pour l'aider à construire un projet (et à se fixer des objectifs). Le coach permet à l'enfant ou l'adolescent de prendre conscience de ses atouts et faiblesses, des ressources qu'il peut mobiliser. Il va travailler avec le jeune, pour l'aider à se responsabiliser. Il est également un médiateur entre l'école et le jeune et entre les parents et lui-même. Il va épauler le jeune, le soutenir, l'écouter, en prenant en compte cet élève dans sa globalité : vie familiale, vie affective, projets, vie scolaire, etc. D'une manière large, le coach va aider le jeune à affronter les épreuves scolaires, l'étude, les examens, l'expérience à l'école,...

Les objectifs d'un coach scolaire correspondent en réalité aux objectifs de tous les acteurs de l'école : parents, enseignants, éducateurs, directeurs... Le rôle du coach scolaire rejoint aussi celui de parents : épauler le jeune, le suivre dans sa scolarité, le remotiver, l'aider à se responsabiliser, à être acteur de sa propre vie... Si les parents souhaitent soutenir leur enfant, le faire réussir à l'école, le rendre responsable ; tout parent est-il en soi en coach ?

Outils, formation du coach

Un bon coach est, au contraire de tous les parents, « formé » au coaching... Il s'appuie sur divers outils pour mener son intervention. Il a une connaissance approfondie d'outils du coaching et du monde scolaire (pédagogie, expérience scolaire, etc.). Par exemple, le coach va prendre appui sur certains apports de la psychologie : PNL (programmation neuro-linguistique) qui permet de cerner comment communiquer de manière efficace, la gestion mentale, l'approche systémique qui favorise la remise en contexte d'une situation, l'approche cognitive (comment le coaché restitue la problématique?), la psychanalyse (détection de mécanismes de transfert etc.), etc. Il prend en compte les divers types d'intelligence et les méthodes de travail des jeunes, partant du constat que tous les jeunes sont capables d'apprendre, mais que l'école favorise seulement certaines formes d'intelligence. Le coaching scolaire, comme la pédagogie différenciée, peut permettre à l'élève dont le type d'intelligence n'est pas pris en compte par l'école, d'apprendre, d'améliorer ses résultats et lui redonner confiance en ses compétences scolaires. De plus, le coach adopte une posture spécifique d'écoute, possède de bonnes compétences relationnelles, des qualités telles que la sérénité, la confiance en soi, l'optimisme, la tolérance, le souci de l'autre,... Un coach remplace-t-il pourtant l'expérience, les compétences, le soutien, l'amour d'un parent ? L'intervention du coaching n'est pas nécessaire dans tous les cas, parfois la présence des parents, leurs encouragements, un regain de motivation pour l'école et une mise au travail peuvent être suffisants pour sortir l'enfant des difficultés scolaires.

En soi, rien n'empêche tout un chacun de se déclarer un jour « coach scolaire » et d'en faire son métier car il n'existe pas de « diplôme » de coach scolaire. Certaines formations existent pourtant et, comme dans toute profession, il y a de bons et de mauvais « coachs ». Un « bon coach » est une personne ayant une bonne connaissance du champ scolaire et du coaching, ayant acquis une certaine maturité professionnelle et personnelle, possédant des compétences dans les relations d'aide, ayant effectué un travail de développement personnel, étant supervisé par un coach plus expérimenté (ce qui permet d'éviter des erreurs et de débloquer certaines situations). Le coach doit également avoir une déontologie et une éthique solide : secret professionnel, confidentialité, respect, devoir d’honnêteté, devoir d'informer et de rediriger le coaché si le coach atteint ses limites et que la situation relève d'autre chose que du coaching (redirection vers des psychologues par exemple). Le coach est au service du jeune, et adopte un regard positif sur sa situation : « on pourrait dire que l'on regarde le verre à moitié plein ou à moitié vide. Hélas, dans la vie courante, souvent, le verre à moitié vide est plus rempli que le verre à moitié plein. Et comme il est rempli de vide, il est évidemment difficile à boire... se focaliser sur la situation future positive induit un rapport constructif et actif dans l'amélioration »[12]...

Oui, le coaching scolaire a l'avantage de prendre une position 'méta', d'innover également dans les divers modes de remédiation scolaire (en variant les méthodes de travail, en prenant en compte les techniques de gestion mentale, la PNL, etc.). Mais ne sous-estimons pas tout le travail effectué par d'autres acteurs dans l'école (professeurs, directions, AP, etc.) ou en périphérie de l'école (parents, logopèdes, etc.) pour prendre en compte les difficultés de l'élève, lui faire acquérir une méthode de travail adaptée à ses besoins, le stimuler et le motiver dans son parcours scolaire. De plus, de nombreux acteurs scolaires et établissements ont déjà intégré dans leur intervention certaines volets du coaching : organisation de séances de coaching individuel ou en groupe, de séances de 'méthode de travail', parents ou enseignants formés au coaching et à la gestion mentale donnant de leur temps pour transmettre leurs connaissances aux élèves et à l'équipe pédagogique...

Soyons alors critiques avec certains propos des spécialistes du coaching. Nous l'avons dit plus haut : aucune réelle recherche n'a été effectuée sur le sujet, nous ne pouvons alors que nous baser sur des slogans commerciaux promouvant le coaching, des sites Internet de coachs scolaires, des livres écrits par des coach, notre esprit critique... Nous sommes frappés par l'importance du recours à des slogans, maximes, tournures de phrases, qui présentent le coaching presque comme « indispensable » pour aider le jeune : « le coaching scolaire vous aide à découvrir vos motivations profondes et à faire émerger les savoirs et les savoir-faire afin de pouvoir les mobiliser à bon escient »[13], « tu me dis, j'oublie, tu m'enseignes, je me souviens, tu m'impliques, j'apprends » (B. Franklin), « celui qui n'a pas d'objectifs, ne risque pas de les atteindre » (Sun Tzu),... Ces slogans permettent de valoriser le coaching, mais quelles implications, peut-être plus négatives, a le coaching scolaire ?

Un coach pour chaque enfant... quelles implications ?

En parlant de « coaching » dans le monde de l'école, le langage d'entreprise n'envahirait-il pas le domaine scolaire ? Le monde scolaire ressemblerait-il au monde entrepreneurial où une certaine excellence est recherchée, où la concurrence et la compétition règnent ? Est-ce seulement dû à un effet de mode où chaque individu, dans chaque sphère et étape de sa vie, peut être coaché ? Si l'adulte peut être coaché pour améliorer sa situation professionnelle, pourquoi le jeune ne pourrait-il pas être coaché dans son métier d'élève ?

L'apparition de ce type d'intervention auprès des enfants et adolescents, nous l'avons dit, vise l'amélioration de leur situation scolaire. Mais une certaine forme de coaching ne profiterait-il pas d’une forme d'angoisse parentale, d’une certaine culpabilité des parents face à l'échec ou aux difficultés scolaires de leurs enfants ? Si l'école permettait la réussite de tous les élèves, qu'elle remédiait en son sein aux difficultés scolaires des jeunes, le coaching scolaire ne serait pas si répandu. Le développement de ce soutien à la scolarité révèle que tous les enfants n'apprennent pas de la même manière. à l'école, un professeur donne un cours oralement à une classe d'une vingtaine d'élèves, leur fait éventuellement faire des exercices, leur fait prendre note ou leur donne des notes. L'école correspond à un certain « profil » d'élève, possédant certaines compétences qui « collent » aux attentes de l'école. Mais si un jeune ne correspond pas à ce « modèle » de l'élève parfait, et que cette forme de pédagogie ne lui permet pas d'apprendre et de comprendre certaines matières, doit-il pour autant aller chercher en dehors de l'école les clés de la réussite ? Les parents doivent-ils dépenser des sommes énormes pour lui permettre de suivre en classe ? Ne faudrait-il pas commencer à s'intéresser aux autres types d'intelligences, aux autres formes d'enseignement, à la pédagogie différenciée, plus adaptée pour certains élèves ?

Et puis, surtout, le coaching scolaire creuse les inégalités entre les familles. Certes, il semble offrir de nouvelles opportunités à des élèves pour réussir leur scolarité ; mais il semble réservé et limité aux catégories sociales aisées. D'une part; par son prix, qui varie entre 80 et 150€ la séance[14] et; d'autre part; par la familiarité avec ce service (« dans la mesure où il s'appuie sur la recherche de la performance et l'obligation de réussite, il est sans doute plus en phase avec l' « habitus » des milieux plus favorisés »[15]). Les familles qui ont connaissance de cette forme de soutien payante, qui recherche l'excellence, la première place, l'amélioration poussée des compétences, et qui peuvent se permettre d'offrir des séances à leurs enfants proviennent probablement de milieux favorisés. Mais qu'en est-il de la majorité des élèves et tout spécialement des familles démunies ? L'écart ne se creuse-t-il encore pas davantage entre les plus et les moins défavorisés ? Le coaching n’encourage-t-il pas encore plus la fracture scolaire ?

Globalement, le développement du coaching dans presque toutes les sphères de notre existence témoigne d'une attente permanente d'aide extérieure pour nous épauler et nous guider, « comme s'il ne fallait rien laisser au hasard, s'assurer en toute occasion qu'on prend la décision qui convient »[16]. L'individu est en quête d'aide, de repères, et cette demande de coaching (life coaching, love coaching, coaching scolaire et autres) recouvre alors une demande fondamentale de travail sur soi, de prise de distance par rapport à soi-même, d'épanouissement personnel, d'optimisation des choix de vie,... Cette attente d'aide à la décision ne représente-t-elle pas aussi une peur, une angoisse, de faire les mauvais choix ?[17]. Ce besoin de soutien, d'aide, d'appui de l'autre ne date pas d'hier. Au quotidien, l'individu est aidé par sa famille, son ami, son époux/épouse, ses parents, son psychologue, son médecin, son professeur, et maintenant peut-être aussi son coach...

De plus, le coach n'est pas seulement un accompagnateur de projet personnel, il permet d'échapper à la solitude. Il joue le rôle d'un confident à qui raconter ses problèmes sans jugement, il permet d'apporter un regard neuf, un autre éclairage sur sa vie et sa situation, de réfléchir, de donner du sens à notre vie... Dans un monde de plus en plus individualiste, en constant mouvement, où la compétition est grandissante, le coach peut être une réponse à une certaine perte du sens de sa propre vie[18]. « Une des réponses est à chercher dans la relation avec un coach, protection, encouragements, empathie, information, stimulation et, de façon générale, des outils qui permettent de mieux gérer l'incertitude »[19]. S'agit-il en définitive d'une tentative pour recréer du lien ? Doit-on encourager nos jeunes à recréer du lien à ce prix-là ? Le lien s’achète-t-il ?

Conclusion

Le coaching scolaire peut permettre de résoudre certaines difficultés scolaires du jeune. Il crée un espace intermédiaire entre l'école et la famille où le jeune est écouté, guidé et épaulé. Il permet de responsabiliser l'enfant et de le rendre autonome dans sa scolarité. Mais le développement de ce type d'intervention pose question. D'un côté, il remet l'école en question quant à sa mission de réussite pour tous les élèves (puisque certains enfants cherchent hors de l'école les clés de cette réussite). D'un autre côté, il atteste d'un phénomène plus profond de notre société. De plus en plus individualiste, notre société isole peut-être les individus les uns par rapport aux autres. Or, nous avons besoin de communiquer, de créer des liens, de nous sentir soutenus et épaulés dans nos gestes. Le coach jouerait-il ce rôle ?

Concernant le domaine scolaire, l'UFAPEC rappelle que l'école doit être la première instance responsable de la réussite scolaire de l'élève. C'est à l'école que l'enfant doit résoudre ses difficultés scolaires, en classe ou en remédiation, et pas dans des formes de soutien extrascolaire payant. L'école doit être gratuite, les parents ne doivent pas payer pour que leur enfant ne soit pas en retard ou en échec scolaire. Le recours à du coaching scolaire n'est pas toujours nécessaire et n'est certainement pas un passage obligé, bien qu'il puisse être une aide ponctuelle. L’UFAPEC rappelle que tout parent a en lui les capacités pour soutenir et motiver son enfant dans sa scolarité[20]. Ceci est un préalable essentiel à la réussite de l’élève.

Tous les enfants sont capables d'apprendre, s'ils ont une méthode d'apprentissage qui leur est adaptée. L'UFAPEC insiste sur l'importance de mieux former les enseignants (formation initiale et continue), en insérant dans leur programme de formation des informations sur la gestion mentale, la pédagogie différenciée, les diverses méthodes de travail, les différentes formes d'intelligence. L'UFAPEC soutient également les initiatives d'établissements scolaires, de parents et de professeurs, qui offrent de manière gratuite du « coaching », qui apprennent les différentes méthodes de travail, aident l'enfant à s'organiser dans son étude, lui apprennent à apprendre[21].

Pour finir, rappelons que toute personne peut se dire « coach », sans vérification de ses compétences, sans diplôme, parfois sans formation. Les étudiants engagés par les entreprises de cours particuliers par exemple, se dénommant « coach », n'ont peut-être pas, voire probablement pas, été formés au coaching ; soyons donc attentifs aux compétences de tous ces « coachs » censés aider nos enfants et redoublons de prudence...

 

Cécile Van Honsté

 

 

Désireux d’en savoir plus ?
Animation, conférence, table ronde... n’hésitez pas à nous contacter
Nous sommes à votre service pour organiser des activités sur cette thématique.



[1]           Angel P., Amar P., (2005), Le coaching, PUF, Paris, p.10.

[2]           Angel P., Amar P., Op Cit., p.7.

[3]           Angel P., Amar P., Op Cit.

[4]           Gabriel G., (2008), Coaching scolaire. Augmenter le potentiel des élèves en difficulté (1er éd.), De Boeck, Bruxelles, p.9.

[5]           Angel P., Amar P., Op Cit., p.2.

[6]           Glasman D., Besson L., (2004), « Le travail des élèves pour l'école, en dehors de l'école », Haut Conseil de l’Évaluation et de l’École, n°15, p.91.

[7]           Gabriel G., Op Cit., p.13.

[8]           Gabriel G., Op Cit., p.51.

[9]           Glasman D., Besson L., Op Cit., p.92.

[10]          CoachingMaestro, Coaching individuel d'élèves, d'étudiants, de jeunes, www.coachingmaestro.com.

[11]          Glasman D., Besson L., Op Cit., p.92.

[12]          Gabriel G., Op Cit., p.52.

[13]          Extraits trouvés sur des sites sur Internet offrant du coaching scolaire

[14]          Glasman D., Besson L., Op Cit., p.94.

[15]          Glasman D., Besson L., Op Cit., p.94.

[16]          Glasman D., Besson L., Op Cit., p.93.

[17]          Angel P., Amar P., Op Cit., p.12.

[18]          Angel P., Amar P., Op Cit., p.2.

[19]          Angel P., Amar P., Op Cit., p.120.

[20]          Voir : Loriers B., « Quel est le rôle des parents dans la motivation à apprendre ? », Analyse UFAPEC, 2011, 29.11.

[21]          Voir par exemple : Floor A., « A essaimer dans nos écoles. Une expérience-pilote de coaching scolaire », Les parents et l'école, UFAPEC, 2010, n°68, p.6.

Vous désirez recevoir nos lettres d'information ?

Inscrivez-vous !
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de Cookies pour vous proposer des publicités adaptées à vos centres d'intérêts, pour réaliser des statistiques de navigation, et pour faciliter le partage d'information sur les réseaux sociaux. Pour en savoir plus et paramétrer les cookies,
OK