Compte-rendu de la conférence-débat du 18 mars 09 Institut Sainte Marie à Huy

Comment s’y prendre avec les ados ? Et l’autorité dans tout ça?

 

Il n’y a pas de solutions toutes faites mais des éléments de réflexion peuvent aider à mieux comprendre la situation. Il faut faire confiance aux parents qui ont tous en eux la capacité à éduquer.
Eliane De Vleeschouwer assure une permanence à l’espace-parentalité de Wanze pour des rencontres ponctuelles.
L’adolescence est une période de la vie qui n’est pas facile, c’est la période la + vulnérable et la + sensible. Françoise Dolto a abordé l’adolescence dans son ouvrage, Le complexe du homard : l’ado est comme un homard, mou et vulnérable.
C’est d’autant plus difficile aujourd’hui où l’ado évolue dans un monde dur et précaire. Cela donne-t-il envie à l’ado de sortir de l’enfance et d’entrer dans l’âge adulte ? Cela explique peut- être certains parcours comme ces jeunes qui triplent leur rhéto.
L’ado est pris entre le besoin de soutien de parents et le besoin d’autonomie d’où un repli sur soi, des comportements outranciers pour s’affirmer, se singulariser, lancer des SOS.
L’ado est une promesse : à la fois émerveillé de toutes les possibilités que la vie lui offre et à la fois perdu.
L’ado a peut-être besoin d’être accompagné par la société mais sans qu’elle fasse les choses à sa place.

Le corps
Changement très rapide parfois trop. On a tendance à demande au jeune un comportement d’adulte parce qu’il a une apparence d’adulte. Le jeune est en questionnement : qu’est-ce qui est à moi dans ce corps et quelle est la part d’héritage ? L’ado est aussi mal à l’aise dans ce corps qui trahit ses émotions (rougit…) alors qu’il voudrait préserver son intimité.
L’ado éprouve des sensations nouvelles mais qui sont aussi source d’inquiétude, il a peur de ne pas garder le contrôle.
On observe que l’ado maltraite plus son corps qu’avant : piercing, scarifications, boulimie, anorexie, addiction à des drogues illicites, (cannabis mais aussi chicha) ou licites (tabacs, alcool), jeu du foulard, saut en élastique. C’est une manière d’attirer l’attention mais aussi une façon de contrôler la mort. Il faut lui faire comprendre que son corps constitue son identité, un atout, un langage et non un ennemi.
La sexualité est une prise de conscience d’un mode de relation à l’autre sans que l’ado puisse l’exprimer au début. La moyenne des 1ères relations se situe vers 17 ans. Les maternités précoces souhaitées sont à comprendre souvent comme l’expression d’un malaise, le besoin d’être reconnu et d’avoir quelqu’un à aimer.
On est dans une société de la transparence et du voyeurisme or la sexualité des ados doit rester secrète. Les parents n’ont pas à y intervenir ni à parler de leur propre sexualité. Ils peuvent orienter vers des professionnels.
Les garçons semblent avoir peur des filles d’aujourd’hui plus combatives alors qu’ils semblent plus intéressés par les TIC.
Cependant il y a encore des rêves de princes charmants et de princesses !
Comment protéger les ados de la pornographie ? En les informant et en les initiant à une utilisation intelligente d’Internet. Le risque est moins grand si l’ordinateur est placé dans un lieu de vie où les parents peuvent jeter un coup d’œil.
Une autre difficulté parents-ado est l’école et le rapport au savoir. On a l’impression que les ados se désintéressent de l’école. N’y a-t-il pas plus de curiosité intellectuelle, de plaisir gratuit d’apprendre ? Dans les cas de décrochage scolaire, les ados ont l’impression qu’ils n’y arriveront pas, que les demandes sont trop fortes. L’école n’a pas beaucoup évolué alors que les nouvelles technologies se sont développées de façon fulgurante. L’école doit développer l’esprit critique et apprendre à trier l’info.
La démotivation scolaire pourrait être due au chômage. La position des parents face à l’échec scolaire est d’accompagner, de faire confiance, de témoigner de leur enthousiasme par rapport à leur propre métier en donnant un message comme : « tu arriveras à faire quelque chose de ta vie à ta façon ». Les parents ne doivent pas se projeter dans le cursus scolaire de leur enfant et souhaiter qu’il fasse ce qu’ils ont ou n’ont pas réalisé.

Comment expliquer le phénomène de dépendance :

Phénomènes de mode, goût de l’interdit, conduites à risque, motivations personnelles avec désir de performances, d’initiation, de faire partie d’un groupe, forme de fuite du milieu familial ou scolaire, échapper à la relation à l’autre menaçante, besoin de s’isoler dans une bulle et d’échapper à la dureté du monde. L’adolescence est un âge sensible aux addictions : produits, nouvelles technologies comme le GSM, les jeux vidéos, les jeux d’argent, le net.
Dans les années 70, il y avait déjà des toxicomanies dites « anomiques », marginales, les hippies en recherche d’un projet de vie. Aujourd’hui, certains jeunes plus âgés sont encore dedans mais il y a de plus en plus des toxicomanies de fatalisme vu la société bouchée (chômage, précarité) qui n’aide pas le jeune à se construire positivement.
Face à ce risque de dépendance, il faut une vigilance constante des parents dans une société du plaisir où il est facile de trouver ces produits. Or, parfois, les parents ne voient rien.

La violence
Par rapport aux attentats dramatiques survenus récemment (dans les écoles par exemple), il semble que cela soit plutôt dû à des psychopathes.
Par rapport au phénomène de violence, on constate que les ados ont l’air plus violents entre eux et envers eux-mêmes notamment les filles.
C’est lié à la société de l’immédiateté où tout est possible et donc où l’interdit est très mal accepté. La violence entre jeunes semble aussi relever de rites initiatiques d’où la thèse intéressante de Roubiau ? : la violence doit être exprimée mais au travers d’activités réglementées et codifiées comme la boxe, le judo.
Dans la famille, il ne faut pas encourager la violence par la violence, il faut aider l’ado à parler et la sanction doit aller dans le sens de la réparation.
On assiste aussi à une montée du harcèlement moral (bouc émissaire). C’est une forme de violence très pénible. La solution à apporter : les adultes témoins doivent prendre conscience qu’il s’agit de violence et la faire cesser en travaillant avec le harceleur (besoin de détruire quelqu’un pour s’affirmer). Le harceleur va devenir un adulte qui posera des gros problèmes dans la société. Les autres ados impliqués le font par peur. Le « défends-toi » auprès de la victime ne sert à rien.

L’autorité

Il s’agit d’un mot un peu ringard. Nous vivons dans un société où il y a moins de rencontres collectives et donc il y a un repli sur soi de la famille qui perd sa dimension sociétale et qui n’ose plus transmettre. La famille n’est plus là pour préparer les jeunes à vivre en société. Idem pour l’école.
La famille ne se légitime plus que d’elle-même : « ce sont mes enfants, je fais ce que je veux ». C’est la porte ouverte au laxisme mais aussi à la maltraitance.
L’objectif de la famille c’est être heureux tout de suite. Il faut satisfaire les envies ou les demandes des enfants sous peine de virer dans la violence ou l’impuissance. La famille s’enferme ou se protège par rapport à la société.
La hiérarchie familiale est de plus en plus remise en question et on vire vers une société incestueuse où il n’y a plus de différence entre le statut des parents et celui de l’enfant. Cela débouche malheureusement sur des alliances parents-enfant contre l’enseignant.
Les familles doivent réagir. L’ado est en quête de repères, d’autorité.
Rôle du père : la puissance paternelle n’existe plus, il y a une fluidité des rôles. On constate souvent que le père ne fait plus son boulot, n’affirme plus son autorité notamment parce qu’il veut passer de bons moments plutôt que gendarmer. Par ailleurs, des mères ne laissent pas la place au père.
Quand il y a une bonne collaboration père-mère, cela débouche sur une alliance éducative ce qui ne veut pas dire que les parents sont contre l’ado ni qu’ils vont toujours dans le même sens mais qu’ils collaborent. Il ne faut pas les mêmes limites et les mêmes repères partout (famille, école, etc). Il y a des systèmes de valeurs différents. L’important c’est qu’il n’y ait pas de rivalité. Il faut aussi une alliance éducative école-famille. Malheureusement, les parents rendent l’école responsable de leur échec. C’est aussi pour cela que les associations de parents existent, pour contribuer au partenariat école-famille pour moins de rivalité et plus de sécurité pour l’ado.
Dans le cas contraire, l’ado qui est malin (qui en doutait ;-)) saura utiliser adroitement les failles et les dissensions entre ses parents, s’adresser à celui qui répondra positivement à sa demande. Dans ces familles, on cherche l’autorité et on ne sait plus qui l’assume. Les relations inter-générationnelles sont floues et il y a des relations affectives fortes.
Cela explique le recours à une aide extérieure (dont témoigne la télé-réalité avec Super Nanny ou le Grand frère).
L’ado a besoin de repères et de limites mais il a aussi envie de satisfaire ses plaisirs. Il est bon de lui apprendre que des plaisirs sont à différer et que plus on a différé, plus le plaisir est grand.

Questions-réponses

Les familles ont changé. Comment exercer l’autorité dans les familles monoparentales ou recomposées quand le père ou la mère est absent ou quand l’enfant est là à part time ?

Ce sont les parents biologiques qui gardent l’autorité et qui font les choix fondamentaux (ex : choix d’école, décisions pour une opération)
Les beaux-parents ont le droit d’exprimer leur desiderata dans les choses de la vie courante (ex : je souhaite que mon salon ne soit pas envahi par toi et tes copains, je souhaite qu’il n’y ait pas trop de bruit,etc)
Dans les gardes alternées, il est important que l’ado ait son espace à lui : son lit, une armoire avec ses affaires.
Les familles recomposées ne sont pas forcément une mauvaise chose pour l’enfat. Certains y évoluent bien, y trouvent des sources d’enrichissement pour autant qu’il y ait un minimum d’entente entre les parents.
Les parents n’ont des droits qu’en fonction des devoirs qu’ils ont envers leurs enfants.
Pourquoi les parents s’ils ont un bon dialogue avec leur ado, ne peuvent-ils pas parler de sexualité ?
Les techniques sexuelles ne sont pas à aborder avec les parents. La sexualité est quelque chose de très intime que l’ado n’a pas envie de partager avec ses parents. La dimension relationnelle, affective elle peut être abordée si l’ado le souhaite.
Le travail d’écoute, d’attention à l’ado est très important.
Il y a chez les parents un paradoxe : on a envie que les enfants deviennent adultes et en même temps, on a envie de les garder petits.

Usage du GSM

Il y a des règles à mettre, par exemple, pour les repas en famille, on ferme son GSM, et ce en responsabilisant le jeune notamment en lui demandant de contribuer financièrement.

Vol à l’adolescence
Le vol est fréquent à cet âge : goût du fruit défendu. Il faut toujours rappeler la loi et demander réparation.

Ados hyperactifs

Attention l’hyperactivité est mise à toutes les sauces. Les réels enfants hyperactifs avec problèmes neurologiques sont très rares.
Par rapport à l’ado hyperactif, il faut lui offrir un cadre de travail calme et l’encourager à ne pas zapper dans ses activités. Par ailleurs, il faut éviter de l’étiqueter tel quel, ce qui le dévalorise et renforce son manque de confiance en lui. Il y a d’autres différences qui existent et qui peuvent être handicapantes (problème de vue, difficultés d’apprentissage, etc), l’important est de valoriser les points forts de chacun, de permettre à l’ado de vivre avec ses difficultés.
Il faut croire dans le jeune et dans ses possibilités ; il faut faire confiance au jeune, à la vie.
L’adolescence est un période difficile mais très riche parce qu’on réfléchit sur beaucoup de choses même s’il y a des dérives.
Il faut être conscient que les progrès d’une société ne se mesurent pas dans la technologie mais dans ses valeurs.
En tant que parents, adultes, notre rôle est de montrer que l’on est motivé, que l’on aime la vie, que l’on a envie d’apprendre. Il faut aussi donner un esprit critique en comparant les infos par exemple.
Il faut faire confiance aux minorités qui font toujours changer les choses et pas suivre le troupeau. Parfois, il faut être révolutionnaire : « non, je ne suis pas d’accord avec ce que tout le monde fait »

Attitude face à la violence
Si on n’a pas peur de l’agressivité, on peut aider le jeune à transformer sa violence en quelque chose de positif. Il ne faut pas rejeter l’ado violent mais essayer de comprendre ce qui se cache derrière la violence pour faire progresser les choses. Tout geste de violence a un sens. Il faut reprendre les faits et les humaniser.

La fugue

Elle est aussi un symptôme, un manière d’échapper mais à quoi ? Les parents doivent le voir comme un signal. Les profs peuvent aider les parents à y voir clair.

 

 

Compte-rendu de Dominique Houssonloge, UFAPEC. Contact : dominique.houssonloge@ufapec.be. Disponible sur www.ufapec.be

 

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