Etude UFAPEC décembre 2015 par A. Floor

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35.15/ET 2 - Elèves «Dys», TDA/H, HP… : au-delà des discours, quels outils pour les enseignants et les professionnels de la santé ?

 

Faudra-t-il, comme pour les grandes erreurs de l’Histoire, demander un pardon pédagogique aux nombreux élèves que nous n’avons pu comprendre et aider, parce que nous ne savions pas ? Tout acteur du milieu de l’école et de l’enseignement se doit de s’informer et se documenter pour pouvoir détecter la nécessité d’un suivi
Christine Buisseret 

Il n’est plus acceptable de seulement panser des plaies et de laisser un enfant en classe toujours dans les mêmes conditions d’apprentissage non adapté ! 
Dr A. Pouhet

Introduction

Nous allons dans cette étude nous pencher plus particulièrement sur la situation des élèves de l’enseignement ordinaire qui présentent un handicap invisible suscitant selon les contextes des réactions diverses : une prise en charge adéquate, des encouragements, des adaptations, l’oubli ou une méconnaissance du trouble et de ses conséquences, l’incompréhension, le déni, le rejet, l’humiliation... Travaillant depuis cinq ans sur cette thématique, ayant recueilli beaucoup de témoignages et rencontré enseignants, directions, parents, jeunes, personnels des CPMS[1], il ressort clairement que les élèves à besoins spécifiques[2] restent traités de manière arbitraire d’une école à l’autre, d’un enseignant à l’autre, d’une famille à l’autre. Nous allons nous consacrer à la constellation des dys[3], des HP[4], des TDA/H[5], des autistes légers (Asperger…) qui fréquentent l’enseignement ordinaire. Ces élèves à besoins spécifiques questionnent l’éducation des parents, l’enseignement des professeurs et bousculent souvent les autres membres de l’équipe éducative. Ils dérangent pour la plupart, car ils sortent de la norme. Les enseignants vont devoir chercher d’autres manières d’expliquer la matière, essayer de comprendre comment fonctionne cet élève qui semble ne pas retenir l’orthographe des mots, qui n’arrive pas à calculer au-delà de 10… Ce qui semble aisé et naturel pour leurs autres élèves ne l’est pas pour eux.

La Fédération Wallonie-Bruxelles autorise, depuis juin 2010, les élèves atteints de déficiences (visuelles, auditives, sensorielles, motrices…) et ceux qui présentent des troubles de l’apprentissage à bénéficier d’adaptations lors de la passation des épreuves certificatives externes (CEB, CE1D, CESS). Des formations de personnes-relais dyslexie sont organisées pour les enseignants depuis l’année scolaire 2010-2011. Une fois leur formation achevée, ces personnes-relais sensibilisent l’équipe éducative de leur école et initient une dynamique d’école sur la question de la dyslexie. Deux brochures informatives : l’une sur « enseigner aux élèves avec troubles d’apprentissage[6] » et l’autre sur « enseigner aux élèves à hauts potentiels[7] » sont largement diffusées dans les écoles. Le Centre pour l’égalité des chances a également publié en juin 2013 une brochure à l’élaboration de laquelle nous avons participé : « A l’école de ton choix avec un handicap[8] » qui rappelle sur le plan juridique la notion d’aménagement raisonnable à l’école. Grâce à un partenariat avec le Cabinet du ministère de l’enseignement obligatoire, la Fondation Dyslexie a constitué un groupe de travail international auquel l’UFAPEC a activement collaboré. Cela a abouti en 2013 à la conception du Pass Inclusion[9].L’objectif central de l’ouverture d’un Pass Inclusion est de favoriser les échanges d’informations au sujet des besoins spécifiques d’un élève, et d’ainsi permettre une meilleure adaptation de son environnement – scolaire et familial- afin de lui permettre de progresser et de s’épanouir au mieux. Ce passeport (ou Pass Inclusion) formalise une méthode de travail qui donne une place privilégiée au dialogue et à la concertation. Il n’est pas obligatoire à l’heure actuelle.

Les décrets[10]et les circulaires sont explicites en termes d’aménagements pour les élèves dys, TDA/H, HP, à besoins spécifiques. Pourtant sur le terrain, aux dires de certains parents, enseignants, agents des CPMS, la mise en place au quotidien de ces aménagements relève encore trop souvent du parcours du combattant. Les acteurs s’efforcent de se positionner au mieux, s’informent vaille que vaille et se forment, voire font la sourde oreille … tous les scénarios existent. Et aucun moyen financier supplémentaire n’a été alloué pour cette prise en charge. Beaucoup de questions se posent tout au long de la journée de l’enseignant : aménager, ne serait-ce pas du favoritisme ? Un enseignant ne doit-il pas traiter « également » ses élèves ? Comment gérer le reste de la classe ? Et mes collègues, aménagent-ils aussi ? C’est quoi, concrètement, un aménagement raisonnable ?

Le diagnostic est aussi complexe à établir, le monde médical n’est pas toujours sur la même longueur d’ondes. Les neurosciences[11] sont à la pointe de la recherche scientifique depuis le milieu du XXe siècle. Cette toute jeune discipline qui évolue sans cesse exige des parents, des enseignants, des professionnels de la santé une attention soutenue. Dans certains cas, malheureusement, les dys, HP et TDA/H sont aussi vus comme la poule aux œufs d’or et sont victimes d’un certain business.

Le sujet est complexe, il étend ses ramifications dans le monde médical, scolaire, familial, économique et social en termes d’intégration et de préparation à la vie active. Nous le verrons, il est bien plus qu’un phénomène de mode ou l’apanage des nantis…

Nous avons dans cette étude laissé la parole aux enseignants et aux spécialistes en poursuivant l’objectif de comprendre leur point de vue, d’approcher au plus près de leurs réalités. Du côté des enseignants, comment décèlent-ils les troubles d’apprentissage ? Est-ce leur rôle ? Ont-ils été formés, sensibilisés à cette thématique ? Comment font-ils pour gérer de grandes classes avec des profils de besoins spécifiques parfois très différents ? Y a-t-il une mobilisation de leur école ou sont-ils seuls à essayer de faire bouger les choses ? Comment se passe le partenariat famille d’élèves à besoins spécifiques et école ? Qu’attendent-ils des parents ? Et les spécialistes, comment établissent-ils leur diagnostic ? Comment peuvent-ils soutenir l’élève tout au long de sa scolarité ? Quelle est leur place dans le partenariat école-famille ? Nous aborderons le point de vue parental et des jeunes concernés dans une étude ultérieure, les deux études se complétant pour une vision à 360 °.

 

Anne Floor

Téléchargez l'étude complète (90 p.) en Pdf ci-contre.

 


[1]Centre Psycho Médico Social

[2]Notons que le terme « élèves à besoins spécifiques » est utilisé à la fois pour désigner les élèves qui fréquentent l’enseignement spécialisé que l’on désignait auparavant par « élèves en situation de handicap » et les élèves qui ont des troubles d’apprentissage et qui fréquentent l’enseignement ordinaire. Malheureusement cette similitude de termes engendre une confusion dans l’esprit des parents, des enseignants…

[3]Dys : dyslexique, dysorthographique, dyscalculique, dyspraxique, dysphasique, dysgraphique.

[4]Haut Potentiel. Dans la suite de l’étude, nous utiliserons HP.

[5]TDA/H : trouble d’attention avec ou sans hyperactivité.

[9]Nous présentons plus largement cet outil en annexe 7.

[10]Décret de la Communauté française du 12 décembre 2008 relatif à la lutte contre certaines formes de discrimination. Décret de la Communauté française du 24 juillet 1997 définissant les missions prioritaires de l’enseignement fondamental et de l’enseignement secondaire. Décret de la Communauté française du 3 mars 2004 organisant l’enseignement spécialisé.

[11]Les neurosciences sont l’ensemble des disciplines qui tournent autour de la compréhension du fonctionnement du système nerveux, ainsi que les méthodes et les outils qui contribuent à cette compréhension. www.france-jeunes.net/imprim-html.php?type=article&tid=2697

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