Cours particuliers : À petites doses !

Nature et objectifs de l’étude

Les indicateurs de l’enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB) relèvent le fait que 70% des élèves recommencent au moins une année durant leur scolarité et que 20% des élèves quittent l’enseignement sans diplôme à la fin du secondaire. En fait, chaque année ce sont quelques 60.000 élèves qui redoublent dans le fondamental ou en secondaire. Pour contrer la menace du redoublement, ou pour permettre à leur enfant de progresser significativement, les parents ne se reposent pas seulement sur l’école : achat de matériel didactique, livres d’exercices supplémentaires, aide directe des parents et surtout… cours particuliers, stages d’études, étude dirigée payante. Ce phénomène, qui n’est pas nouveau puisqu’il prend sa source dans le courant du XIXème siècle, connaît toutefois une croissance exponentielle.

C’est dans ce contexte, interpellée par la détresse de nombreux parents quant aux solutions à apporter aux échecs de leurs enfants, que l’UFAPEC a sondé ses parents affiliés dans le cadre d’une vaste étude ayant trait aux cours particuliers. Celle-ci s’est déroulée entre septembre 2011 et janvier 2012. Dans un premier temps, un questionnaire quantitatif a été soumis à nos affiliés et à des parents d’écoles du Brabant wallon. Il visait à répertorier un certain nombre d’informations relatives à la forme des cours particuliers, aux motivations à suivre ses cours, aux matières, aux coûts… Nous avons reçu 172 réponses exploitables. Dans un second temps, nous avons procédé à des entretiens qualitatifs, que nous avons ensuite analysés et comparés pour mettre en évidence les attentes, recommandations, problématiques et ressentis des parents. Les résultats, indicatifs, nous ont permis de dégager certaines récurrences remarquables et pertinentes que nous soumettons ici rapidement.

Qui, quoi, combien ?

Il est difficile de chiffrer précisément la proportion d’enfants qui suivent des cours particuliers, notamment parce qu’un grand nombre de ces cours sont donnés de façon non-déclarée. D’après une étude menée par la Communauté Européenne, un élève sur dix y auraient recours au moins une fois sur l’ensemble de son cursus primaire et secondaire[1]. L’étude note par ailleurs une augmentation croissante, surtout depuis ces 25 dernières années.

Les élèves  qui prennent des cours particuliers sont autant des filles que des garçons, mais on constate que la filière générale est surreprésentée. Et si se sont généralement les milieux les plus aisés qui font appel à des professeurs particuliers, il faut noter que de nombreux parents à revenus modestes font de réels sacrifices financiers pour soutenir la scolarité de leur enfant. Autre élément intéressant à pointer à ce sujet : la grande majorité des parents qui recourent à ce service sont diplômés du supérieur.

Au hit parade des matières privilégiées pour les cours particuliers, les mathématiques figurent très largement en tête de classement, suivies par les cours de langues et plus loin encore, par les cours des sciences et le français.

Le coût varie de 10 à 50€ de l’heure. Les enseignants et anciens enseignants sont souvent les plus onéreux, mais aussi ceux dont on peut attendre de réelles compétences. Les étudiants proposent leurs services à des prix moins élevés mais les compétences peuvent être plus aléatoires. Les entretiens ont mis en évidence des difficultés lorsque le professeur particulier est l’enseignant de l’élève. Il y a d’abord le fait qu’un professeur qui ne parvient pas à se faire comprendre par l’élève en classe n’est vraisemblablement pas le plus à même pour le faire progresser : les explications seront souvent les mêmes qu’en classe ; on perd le bénéfice d’une réexplication avec d’autres mots et d’autres techniques d’apprentissage. Ensuite, il y a une dimension de chantage auprès des parents : « si votre enfant ne prend (continue) pas de (les) cours particuliers, il ne pourra pas réussir. Pour ma part, c’est XX€ de l’heure ».

Le fait de faire appel à une société commerciale ne garantit pas nécessairement la compétence des professeurs, ceux-ci n’étant pas (systématiquement) évalués par ces sociétés. Cela garantit par contre un coût fixe et permet de changer plus facilement et rapidement de professeur si le premier ne convient pas. Il y a donc un contrôle relatif des tarifs et de la formation ; par ailleurs, il s’agit ici de prestations déclarées, ce qui évite les travers du marché noir.

Quels effets ?

Les parents constatent des effets positifs produits par les cours particuliers. Les résultats scolaires s’en trouvent souvent améliorés, la confiance en soi des enfants augmente, les enfants montrent une discipline au travail accrue, le comportement en classe est plus positif. Seuls 2.5% des parents répondants nous ont dit n’avoir vu aucune amélioration chez leur enfant et aucun parent n’a fait état de moins bons résultats. Donc, les cours particuliers, « ça fonctionne ». Mais ça coûte cher, aussi. Et puis il y a des conséquences possibles auxquels il faut être attentif en tant que parent : la fatigue, la démotivation liées à l’allongement du temps scolaire de l’enfant et à la suppression d’activités extrascolaires (sport, musique, théâtre,…) pour suivre les cours particuliers.

Positions de l’UFAPEC

L'UFAPEC reconnaît qu'une aide extérieure à l'école, un soutien extrascolaire ponctuel, peut être pertinente pour aider l'élève et le remettre sur les rails de l'école. Mais le recours à des cours particuliers doit demeurer l'exception pour faire face à un problème ponctuel et répété.

L'UFAPEC regrette l'expansion du recours au soutien scolaire payant hors école et souhaite ici rappeler l’importance des remédiations internes à l'école. D’une part, il n’est pas normal que des enfants qui passent sept heures par jour à l’école doivent encore retravailler leurs cours avec des tiers à la maison. D’autre part, l'école se doit d’être gratuite et, pour ce faire, les parents ne doivent pas être obligés de dépenser des sommes conséquentes pour la formation et la réussite de leurs enfants.

La situation actuelle induit une dualité entre les parents qui ont les moyens de payer un professeur particulier à leur enfant et ceux qui n’en ont pas les moyens. Les parents ont tous de bonnes raisons d’offrir des cours particuliers à leur enfant, mais le recours à ceux-ci semble se banaliser et crée de grandes inégalités entre les familles. Une école vraiment « gratuite » devrait permettre la réussite de tous par remédiation interne.

La problématique des cours particuliers participe de façon consécutive à celle du redoublement et de l'orientation « forcée » vers des filières techniques ou professionnelles. Pour éviter que leurs enfants « doublent » une année, certains parents se tournent vers les cours particuliers. Parce que de nombreuses études témoignent de l'inefficacité de la pratique systématique du redoublement, l’UFAPEC souhaite à terme une réduction significative de celui-ci dans l’enseignement en Fédération Wallonie-Bruxelles. Sans pour autant devoir baisser les niveaux d’exigence. Pour cela, il faut investir davantage dans l’accompagnement préventif (remédiation) des élèves. Dans une sorte de cercle vertueux, la chute du taux de redoublement devra ensuite permettre d’investir davantage dans la remédiation. Il y a, pour ce faire, des stades de transition, qui passent par un renforcement de la remédiation interne (en général) et de la remédiation directe (en particulier). Notre demande est claire : réduisons le redoublement et, avec l’économie engendrée, améliorons la remédiation.

Il faut également améliorer la formation continue et initiale des enseignants (notamment sur la pédagogie différenciée, gestion mentale, les jeunes « dys », etc.), car ils seront dès lors plus à même de détecter les besoins spécifiques de chaque élève et de l’aider dans ses difficultés scolaires. De plus, pourquoi ne pas envisager de former certains professeurs à la « remédiation », de généraliser la présence de professeurs spécifiques qui ne s’occupent que de ça (comme il en existe déjà dans certaines écoles) : enseigner en cours de remédiation ou dans une salle de classe de cours normal, ce n’est pas la même chose. Et nous nous posons cette question : pourquoi, le plus souvent, ce sont des jeunes enseignants qui doivent s’occuper de cette remédiation ?

De bonnes pratiques existent dans de nombreuses écoles de notre réseau mais elles restent tributaires d’une priorité donnée par la direction et le pouvoir organisateur à la remédiation dans le partage des heures NTPP disponibles. Une discussion autour de ces pratiques, notamment avec les parents, pourrait permettre l’amélioration de la qualité de la remédiation. L'UFAPEC recommande et contribue à multiplier les lieux d'échanges entre l'école et la famille sur cette problématique.

Pourquoi ne pas imaginer d’autres alternatives encore, complémentaires à la remédiation : cours de méthode de travail, coaching interne à l’école (et à faibles coûts), pratiques de tutorat ou de parrainage des élèves entre eux, plan individuel d’apprentissages, etc. Si l'école a des difficultés pour renforcer son système de remédiation, ou d'étude dirigée, l'Association de Parents, dans la mesure de ses possibilités, pourrait apporter son soutien. Hors école, les écoles de devoirs reconnues en Fédération Wallonie-Bruxelles peuvent aussi soutenir le jeune et l'encadrer dans ses devoirs. Bref, il est temps que partout en Wallonie et à Bruxelles on puisse ouvrir la porte au débat sur la remédiation et le soutien scolaire dans chaque établissement en fonction de ses réalités et des forces en présence, pour ensuite proposer et mettre en œuvre des solutions concrètes...
 

Le texte intégral de cette étude >>

 

 

Pour toute question/contact presse :

Pierre-Paul Boulanger, Président
0473/67.39.97
pierre-paul.boulanger@ufapec.be

 



[1]Cf. DESTANDAARD,«Bijlessen in opmars »,article du 14juin2011 :

 http://www.standaard.be/artikel/detail.aspx?artikelid=9E3B7ABM.

Vous désirez recevoir nos lettres d'information ?

Inscrivez-vous !
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de Cookies pour vous proposer des publicités adaptées à vos centres d'intérêts, pour réaliser des statistiques de navigation, et pour faciliter le partage d'information sur les réseaux sociaux. Pour en savoir plus et paramétrer les cookies,
OK