Analyse UFAPEC mai 2020 par A. Floor

06.20/ Communiquer dès le plus jeune âge, pourquoi est-ce si important ?

Ce qui crée les inégalités entre les êtres, ce ne sont pas les gènes, mais le milieu. Ainsi, si nous voulons réduire les inégalités éducatives, c'est sur les conditions environnementales qu'il faut porter toute notre attention. Nous pouvons clairement changer la donne pour de nombreux enfants, non pas uniquement en modifiant notre façon d'enseigner, mais en influençant très positivement le milieu au sein duquel ils évoluent - tant le milieu familial que scolaire.
Céline Alvarez

Introduction

En 2018, la Belgique a participé aux enquêtes PISA (79 pays ou systèmes éducatifs participants). Elles évaluaient, lors de ce dernier cycle, la compréhension en lecture, les maths et les sciences avec un point d’attention particulier sur la lecture. La Fédération Wallonie-Bruxelles se classe pour la lecture en dessous (481 points) de la moyenne des pays de l’OCDE (487 points). De nombreux parents s’interrogent sur ces résultats. Leurs enfants sont-ils bien formés dans ces disciplines ?

A côté de ce constat global, nous avons été interpellés par les actions en faveur d’une meilleure acquisition du langage et ce dès le plus jeune âge d’une équipe enseignante à la suite d’une baisse de résultats de leurs élèves au CEB. Selon ces enseignants, cette baisse de niveau au CEB était principalement due à une mauvaise lecture et compréhension des consignes. Ils ont donc décidé de se mobiliser pour développer les aptitudes langagières de leurs élèves et ce dès leur arrivée en classe d'accueil. La puéricultrice en charge de la classe d’accueil depuis une quinzaine d’années explique cette baisse du niveau de langage des enfants qui font leur première rentrée à l’école par divers facteurs, dont la diminution des interactions verbales dans les familles. Plusieurs études scientifiques dénoncent d’ailleurs la mainmise des smartphones sur les interactions parents-enfants et ce dès le plus jeune âge. Les adolescents se plaignent du manque de disponibilité de leurs parents qui sont trop souvent penchés sur leurs écrans. Est-ce qu’en communiquant avec nos enfants dès le plus jeune âge, en veillant à leur apprendre les termes exacts, en leur apprenant à structurer leur pensée, nous les préparerions aussi à la compréhension et à l’interprétation de textes, de consignes ? Et si, en consacrant du temps pour communiquer totalement avec les enfants dès qu’ils sont tout petits, nous leur donnions déjà les clés pour comprendre le monde et se comprendre eux-mêmes ?

Les neurosciences et le langage

  • Plasticité du cerveau

Dans son livre sur les lois naturelles de l'enfant, Céline Alvarez[1] explique que le bébé nait précâblé ; c'est-à-dire qu'il est prédisposé à parler, à raisonner, à créer, inventer, imaginer, ressentir des émotions, les réguler. Mais, à la naissance, il n'a pas encore accès au langage, à la raison et c'est la qualité de son environnement qui conditionnera le développement de ses compétences innées. Le fait de naître ainsi non terminé avec une intelligence immature permet à l'être humain d'évoluer et de s'adapter à son environnement. Parce qu'il naît précocement, les prédispositions innées du bébé vont directement se former avec les innovations linguistiques, comportementales et culturelles réalisées avant sa naissance. Il n'a même pas à apprendre quoi que ce soit, son intelligence va directement se construire avec ![2]

  •  L’environnement de l’enfant

Selon les neurosciences, l’enfant est donc précâblé pour construire un langage élaboré. Et ce sera l'environnement langagier riche auquel l'enfant sera exposé lors de la période de formation du langage, de la naissance à trois ans, qui développera ses circuits cérébraux immatures.

Une étude scientifique appelée "The Early Catastrophe"[3] démontre la puissance de l'environnement sur le développement du langage des enfants. Les chercheurs ont observé et enregistré les interactions entre des enfants et des adultes dans quarante-deux familles de milieux socio-économiques très diversifiés de Kansas City aux Etats-Unis. Les enfants ont été suivis de leurs sept mois à leurs trois ans. 86 à 98 % des mots utilisés par les enfants de trois ans venaient directement du vocabulaire de leurs parents. La longueur et le style des conversations s'inspiraient aussi largement de ceux de leurs parents. Les chercheurs sont arrivés aux conclusions suivantes : à l'âge de quatre ans, les enfants de milieux favorisés avaient entendu trente millions de mots de plus que ceux de milieux défavorisés. Les enfants de cette étude issus de milieux favorisés exposés à un langage soutenu avaient des quotients intellectuels bien plus élevés et ce dès l'âge de trois ans. Leurs performances scolaires s'avéraient meilleures à l'âge de neuf et dix ans. Nous savons en effet aujourd'hui que le niveau de langage oral à 3 ans prédit les capacités de lecture à 5 ans et la compréhension de textes à 8 ans, déclare Céline Alvarez.

Nous avons interrogé Elisabeth, puéricultrice spécialisée en psychomotricité relationnelle et formée en langue des signes, sur son expérience de quinze années en classe d'accueil. La plupart des enfants ne parlent pas ou peu à leur arrivée, mais comprennent bien les consignes et les questions posées. Via le plan de pilotage, nous nous sommes questionnés sur la difficulté grandissante que mes collègues de primaire constataient par rapport à la compréhension à la lecture. Les consignes sont mal lues par les élèves, mal comprises et cela influe sur les résultats du CEB. Mes collègues de primaire constatent aussi que les enfants ont de moins en moins le goût de lire et que le livre subit à la maison la concurrence des écrans. A la suite de tous ces constats, j'ai mis en place cette année beaucoup d'activités pour développer les aptitudes langagières de mes élèves d'accueil. Je suis convaincue qu'une mauvaise acquisition du langage pourrait gêner la réussite scolaire, l'intégration sociale, altérer le développement de la personnalité et des capacités intellectuelles, engendrer un comportement agressif.[4]

  • Langage positif et milieu soutenant

Dans leur étude "The Early Catastrophe", les chercheurs ont également étudié les interactions des familles :

les familles favorisées ont un ratio d’affirmations positives vs négatives de 6 / 1 (32 affirmations positives contre 5 négatives par heure)
– les famille d’ouvriers 2 / 1 (12 affirmations positives contre 7 négatives)
– les familles défavorisées de 1 / 2 (5 affirmations positives contre 11 négatives).
[5]

Les enfants des milieux favorisés sont donc davantage exposés à des expériences positives. Ce qui, pour leur avenir, les incitera à rechercher et à assimiler des expériences nouvelles.  Or, la multiplicité des expériences des enfants joue un rôle prédominant dans la maturation de leur cerveau. De la naissance à 5 ans, 700 à 1.000 nouvelles connexions se créent chaque seconde. Et c'est précisément à cette période de sa vie que l'enfant est le plus actif, le plus explorateur. Aussi, si l'adulte ne cesse de réprimer ses élans, c'est l'intelligence en train de se construire de cet enfant qui est impactée. Le cerveau se construit à partir de ce qu'il reçoit et, s'il reçoit peu, le cerveau se développera mal. Le cerveau de l'enfant ne conserve pas toutes ses connexions synaptiques[6] ; celles qui sont les moins utilisées vont s'affaiblir petit à petit et disparaître. Le cerveau ne regarde donc pas la qualité de ce qu'il va supprimer, mais la fréquence des expériences. Nous devons bien entendre et comprendre cela : la plasticité cérébrale de l'enfant n'est pas dotée de sens critique. Elle épouse l'environnement tel qu'il s'offre à elle, sans aucun jugement.[7]

Céline Alvarez insiste sur la responsabilité de tout adulte qui vit régulièrement auprès d'un jeune enfant : Il faut donc l'entendre, qu'on le veuille ou non, ce sont toutes ces petites choses auxquelles nous ne faisons pas attention qui structurent directement et sans aucun filtre, les capacités et les comportements de nos enfants. Nos attitudes préparent les leurs. Cela doit être dit, redit et entendu. Il nous faut maintenant agir en conséquence, aussi bien à la maison qu'à l'école.[8]

  • Disponibilité de l'adulte

Les recherches mettent en lumière le rôle primordial de l'apprenant pour l'enfant. Il a besoin de la guidance d'une personne plus expérimentée que lui, qui puisse le guider vers les éléments à observer et à prendre en compte pour évoluer. L'apprentissage est un subtil mélange entre un apprentissage par soi-même, mais avec l'aide de l'autre.[9]

Le regard, le pointage et la voix chaleureuse sont pour l'enfant ce qu'on appelle des signes sociaux ostensibles, qui indiquent qu'un enseignement important va lui être proposé. Son attention est alors forte, son mécanisme plastique s'active, prêt à recevoir de l'information. A l'inverse, si l'enfant ne perçoit pas ces signes, son attention n'est pas dirigée et il peut passer complètement à côté d'un élément ou d'un changement pourtant flagrant qui aurait lieu dans son environnement.[10]

Selon Elisabeth, l'enfant développera son langage et s'ouvrira à travers ses sens s'il est accompagné d'une personne bienveillante, solide, constante et qui sait ce qui est bien pour lui dans un espace et un lieu bien adapté où le cadre et les limites sont présentes pour se mettre à grandir en toute sécurité. Pour moi, l'enfant a d'abord besoin de se sentir en sécurité pour évoluer et grandir. Il arrive avec un statut d'enfant et il a au mieux dix mois pour acquérir celui d'élève. Mon rôle est d'adapter les attitudes nécessaires pour entrer en relation avec l'enfant : se mettre à sa hauteur, décoder à travers son corps ce qu'il essaie de communiquer, ne pas aller au-devant de ses besoins, mais le laisser développer sa propre autonomie, le valoriser et l'encourager, mais surtout développer des activités langagières avec différents types de supports (livres, marionnettes, images, photos, animations en bibliothèque, spectacles…).

Cette attention de l'adulte sera évidemment aussi nécessaire pour l'appropriation du langage. Les enfants ne retiendront pas les mots nouveaux qu'ils entendent si l'adulte ne pointe pas l'objet du doigt ou s'il n'attire pas son attention sur l'objet en disant le mot en même temps. Pour apprendre, l'enfant a besoin d'un guide bienveillant et attentif. Lorsque nous vivons à ses côtés, prenons simplement le temps de nous arrêter avec lui à chacun de ses étonnements et de ses questionnements - une jolie fleur, un papillon, l'attitude d'un ami, le goût d'un aliment - et de les commenter sobrement, en répondant précisément à ses questions et en lui laissant toute la place de s'exprimer. [11]

Elisabeth constate aussi que l'environnement de l'enfant joue un rôle immédiat sur les capacités de l'enfant à s'exprimer : Selon moi, il faut à tout prix éviter les écrans, les tablettes, les smartphones et surtout jouer avec son enfant au moins 15 minutes par jour, lui lire un livre, profiter de chaque geste du quotidien pour parler, expliquer à son enfant ce qu'on est en train de faire. A l'école, sur le temps de midi, je leur explique ce qu'ils vont manger : la texture, la couleur, le goût, le nom des aliments, la température… (pleine conscience alimentaire). Mes collègues sont épatées par l'appétit des enfants de la classe d'accueil depuis que je fais cela et les parents sont étonnés de l'ouverture de leurs enfants à des nouveaux aliments.

Plusieurs études scientifiques dénoncent la mainmise des smartphones sur les interactions parents-enfants, et ce dès le plus jeune âge. Un sondage réalisé en France en 2017[12] indique que 50 % des parents reconnaissent se laisser distraire par leur portable durant leurs échanges avec leurs enfants. Selon un autre sondage[13], 36 % des parents consultent leur téléphone pendant les repas avec leurs enfants, et même 28 % pendant qu’ils jouent avec eux. En 2013, une étude révélait que 45 % des enfants de 8-13 ans trouvaient que leurs parents consultaient trop leur téléphone, et que 27 % rêvaient même de le leur confisquer[14]. En France, en 2017, ils sont 26 % de la tranche d’âge des 12 à 14 ans à trouver que leurs parents utilisent trop leur téléphone[15], et 21 % à trouver qu’ils utilisent trop le leur. On peut se demander ce que diraient des enfants âgés d'un ou deux ans s'ils savaient parler.

Dans le nord-est de l'Allemagne, une campagne de sensibilisation a été lancée en 2017 dans les crèches à destination des parents scotchés à leur portable et le slogan en était : "Avez-vous parlé avec votre enfant aujourd'hui ?" Cette campagne est née du constat fait par les éducateurs que de plus en plus de parents venaient chercher leur enfant à la crèche sans même décrocher de leur téléphone ni s'enquérir des événements de la journée. On peut observer le phénomène aussi dans les rues, les aires de jeu, les transports. Les parents sont physiquement là mais mentalement et sentimentalement absents.[16]

Campagne de sensibilisation allemande sur l'usage du portable par les parentsCampagne de sensibilisation allemande sur l'usage du portable par les parents

  • Parler des émotions à un tout-petit pour son bien et celui des autres

Catherine Guégen, pédiatre spécialisée dans le soutien à la parentalité, explique que la recherche a prouvé que le fait de nommer ce que nous ressentons agit positivement sur le cerveau. Quand nous sommes stressés, l'amygdale cérébrale, centre de la peur, provoque la sécrétion du cortisol et de l'adrénaline, molécules qui, en quantités importantes, peuvent être très toxiques pour le cerveau et donc notre santé psychique et psychologique. Quand nous parvenons à mettre des mots sur nos émotions désagréables en disant par exemple : Là, maintenant, je suis vraiment très énervé, etc., nous agissons sur l'amygdale cérébrale ; elle devient moins active, la sécrétion de cortisol et d'adrénaline ralentit, notre stress diminue et nous nous apaisons[17]. Deux chercheuses, Célia Brownell en 2013 et Jesse Drummond en 2014, se sont penchées sur la socialisation d'enfants âgés de 18 à 30 mois. Il ressort de leurs observations que les enfants dont les parents parlent de leurs émotions à leurs enfants les aident à mettre des mots sur leurs propres émotions et sur celles des autres. Ils deviennent de plus en plus sociables, attentifs aux autres, soucieux de leur bien-être, coopérants. Ils aiment le partage et ont envie d'aider les autres dès tout petits.[18]

Elisabeth nous explique ce qu'elle a mis en place avec un enfant très violent : J'ai accueilli en cours d'année un enfant qui ne s'exprimait pas du tout par le langage et qui était violent avec les autres enfants. J'ai utilisé une marionnette en forme de licorne qui changeait de couleur en fonction de ses émotions (Rouge pour la colère, bleu la tristesse, vert la peur et jaune la joie). Grâce à cette peluche, les enfants ont pu expliquer à travers leur visage et en ajoutant des mots à cet enfant brutal les émotions que sa violence générait. Au bout d'un mois, il n'a plus frappé.

L'importance du développement du langage chez les tout-petits ne semble plus à démontrer ; les incidences étant multiples et touchant divers domaines : cognitif, social, psychologique (bien-être pour l'enfant et ses pairs, prévention du harcèlement…). Que prévoit le Pacte pour un enseignement d'excellence en termes d'acquisition du langage en maternelle ? Et dans le nouveau référentiel des maternelles, quelle est la place réservée à la langue de scolarisation ?

Le langage et la communication et le Pacte pour un enseignement d'excellence

Le Pacte pour un Enseignement d'Excellence a mis aussi en évidence l'importance du langage et de la communication pour la suite de la scolarité de chaque enfant : Parmi les « domaines d’apprentissage » essentiels au développement de l’enfant, on notera tout d’abord l’importance du langage et de la communication. Le langage, oral et écrit, occupe une place centrale au cours de cette première étape de la scolarité car sa découverte progressive accompagne le développement de l’enfant, mais aussi dans la mesure où représente le vecteur d’apprentissage, et est ainsi une condition essentielle de la réussite dans l’ensemble des domaines pour la suite du parcours de l’enfant. La maitrise progressive de la langue française en tant que langue de scolarisation, en particulier, permettra à l’enfant de développer ses compétences psycho-sociales et d’exercer des compétences interactives, démarches mentales, des attitudes relationnelles, etc., directement utilisables dans la construction de son savoir.[19]

La langue de scolarisation dans le référentiel des maternelles

Les apprentissages sont répartis tout au long du tronc commun en sept domaines et ces apprentissages démarrent dès la première maternelle :

  1. Français, Arts et Culture
  2. Langues modernes 
  3. Mathématiques, Sciences et Techniques
  4. Sciences humaines et Éducation à la philosophie et à la citoyenneté, religion ou morale
  5.  Éducation physique, Bien-être et Santé 
  6. Créativité, Engagement et Esprit d’entreprendre 
  7. Apprendre à apprendre et à poser des choix

Dans le référentiel, il est précisé que la langue de scolarisation traverse de manière transversale les sept domaines. Utilisée depuis l’entrée en maternelle, la langue de [scolarisation] est à la fois la langue des interactions à l’école et la langue des apprentissages. Elle possède une structure et un vocabulaire spécifiques qui complexifient la communication. Son apprentissage représente un niveau de difficulté qui n’est pas toujours identifié clairement : apprendre les mathématiques, l’histoire ou la géographie exige de pouvoir argumenter, reformuler, synthétiser des savoirs et savoir-faire tout en mobilisant un vocabulaire spécifique à l’école et à chacune des disciplines.[20]

L'acquisition du langage oral est bien présentée comme un enjeu majeur pour la construction de soi et la compréhension du monde : À l’école maternelle, le langage oral est une préoccupation majeure de l’enseignant pour permettre aux enfants de devenir élèves et d’entrer dans tous les apprentissages. Le langage oral participe tant à la construction de soi qu’à la compréhension du monde. Son apprentissage demande du temps et se construit en respectant le rythme de chacun.[21]

Conclusion

Selon les neurosciences, l’enfant est précâblé pour construire un langage élaboré. Et ce sera l'environnement langagier riche auquel l'enfant sera exposé lors de la période de formation du langage, de la naissance à trois ans, qui développera ses circuits cérébraux immatures. L'enfant a également besoin d'une présence physique et psychique de son entourage pour s'approprier de nouveaux mots. Or certaines études dévoilent que le smartphone vient perturber les relations parents-enfants et ce dès le plus jeune âge. Les adolescents se plaignent du manque de disponibilité de leurs parents. Que diraient, à ce sujet, nos tout-petits s'ils savaient déjà parler ?

Les interactions avec leurs environnements sont primordiales pour l'évolution langagière des enfants. L'école et la famille sont donc des piliers dans la construction du langage. Pour l'école, le Pacte pour un enseignement d'excellence ne s'y est pas trompé en positionnant le langage et la communication dans les apprentissage essentiels du référentiel des maternelles, tout en insistant sur le fait que l'acquisition du langage a un impact sur tous les domaines d'apprentissage. Au niveau des familles, l'entourage des parents a aussi un rôle à jouer en termes de sensibilisation à l'importance de communiquer dans la présence (physique et psychique) avec son enfant (consultations ONE, crèches ou accueillantes ONE, pédiatre, médecin de famille, grands-parents, école…). Lorsque le tout-petit communique avec son parent, lorsque le plaisir de l’échange est sincère et réciproque, l’énergie qui circule dans ces échanges sert de moteur au développement de ses aptitudes créatives, à l'enrichissement de ses capacités relationnelles ainsi qu'à la construction de son langage.[22]

L'UFAPEC a souligné dans une analyse précédente l'importance de la coéducation en maternelle[23] en relayant les résultats très positifs d'une recherche-action recourant, entre autres, à une peluche "Polo le lapin" voyageant entre les familles et l'école. L’enfant qui reprend « Polo » à la maison est amené à raconter les événements vécus avec la mascotte lors de son retour en classe. Cette recherche-action[24] de l’Université de Mons a mis en évidence que les enfants qui ont participé au dispositif ont présenté d’importants gains de langage, et cela quels que soient le réseau d’enseignement, le quartier, le genre le milieu social de l’enfant.

Le développement des interactions entre l'école et les familles constitue d'ailleurs une revendication importante de l'UFAPEC : Afin d’éviter les conflits de loyauté imposés à l’enfant par les parents et/ou par l’école, il est essentiel que l’un et l’autre puissent se rencontrer, se connaître, se comprendre et se rejoindre. La coéducation peut être pédagogique, comme lorsque des projets sont menés de front à l’école et en famille autour de l’apprentissage de la langue d’enseignement. Elle peut aussi être éducative, autour de l’éducation à la santé, de l’éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle, des questions de sens et des valeurs…[25] L'UFAPEC souhaite aussi que l'allongement de la formation initiale des enseignants fasse la part belle au renforcement de la langue d'enseignement : Etant donné que la formation initiale des enseignants devrait passer de 3 à 4 ans, l’UFAPEC attend que les savoirs de base, et en particulier la langue d’enseignement, soient approfondis et maîtrisés par chaque enseignant dans la mesure où il s’agit des savoirs sur lesquels les élèves doivent pouvoir s’appuyer pour accéder à tous les autres apprentissages.[26]

 

Anne Floor

 

 


[1] Ancienne professeur des écoles de l'Éducation Nationale. De 2011 à 2014, Céline Alvarez travaille avec des enfants de maternelle issus de zone d’éducation prioritaire. A l’issue de ces trois années, les résultats sont excellents : les enfants sont plus autonomes, savent mieux lire, font preuve de remarquables aptitudes sociales et montrent des capacités mathématiques plus élevés que des enfants issus des apprentissages normaux. https://www.fnac.com/Celine-Alvarez/ia3471070/bio

[2] ALVAREZ C., Les lois naturelles de l’enfant, Editions des Arènes, Paris, 2016, p. 38.

[4] Interview réalisée par téléphone le 16 avril 2020 par Anne Floor.

[6] Qui a un rapport avec la synapse, à savoir la zone de contact entre deux neurones ou entre un neurone et une cellule qui permet la transmission d’un signal électrique grâce à des neurotransmetteurs. https://www.linternaute.fr/dictionnaire/fr/definition/synaptique/

[7]ALVAREZ, op.cit., p. 46.

[8] Ibidem, p. 47.

[9] Ibidem, pp. 72-73.

[10] Ibidem, p. 74.

[11] ALVAREZ, op. cit., p. 83.

[12] Tech observatoryObservatoire des pratiques mobiles, CSA Research, Sondage réalisé entre le 20 et le 30 juillet 2017 sur un échantillon de 201 français âgés de 12 à 14 ans.
édition 2017 : focus sur les 12-14 ans.

[13] Sondage réalisé par AVG Technologies auprès de 6.117 parents et enfants (https://www.leral.net/Quand-le-smartphone-seme-la-zizanie-a-la-maison-Fais-ce-que-je-dis-pas-ce-que-je-fais_a191441.html).

[14] AVG Technologies, op. cit.

[15] Tech observatory, op. cit.

[17] GUEGEN, Catherine, Heureux d’apprendre à l’école, les Arènes, robert Laffont, 2018, p. 48.

[18] GUEGEN, op. cit., pp. 48-49.

[19] Pacte pour un enseignement d’excellence, Avis n°3, p. 37. http://www.enseignement.be/index.php?page=28280

[20] p. 12 référentiel des maternelles

[21] p. 16 référentiel des maternelles

[24] Cette recherche s’est déroulée dans les écoles maternelles de Charleroi, Péruwelz et Etterbeek entre 2008 et 2013.

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