Le Parcours d’Enseignement Qualifiant (PEQ), une transition vers la filière métiers à la suite du tronc commun ?

Version longue de l'article "Les Parents et l'Ecole" n°119 - juin, juillet, août 2023 p.18

Le PEQ en quelques mots

La réforme qui instaure le Parcours d’Enseignement Qualifiant (ou PEQ) concerne le deuxième et le troisième degré de l’enseignement qualifiant. Elle est déjà entrée en vigueur en 4e année du secondaire pour les options de base groupées (OBG)[1] qui étaient organisées sous le régime de la certification par unités (CPU)[2] et pour les nouveaux profils de formation rédigés par le Service Francophone des Métiers et des Qualifications (SFMQ)[3] en août 2022. À partir de l’année scolaire prochaine, donc dès août 2023, toutes les options entreront de manière progressive dans le PEQ, à partir de la 4e et de la 7e secondaire.

Si, à ce stade, l’enseignement qualifiant reste organisé de la 3e secondaire à la 7e, il est clair que le PEQ anticipe l’arrivée des élèves issus du tronc commun, puisque le deuxième degré se retrouve scindé en deux : alors que la 3e secondaire pourra prendre la forme d’une année polyvalente permettant à l’élève de découvrir plusieurs options d’un même secteur ou de secteurs différents, afin d’affiner ses choix pour l’avenir, la 4e secondaire marquera l’entrée effective dans la formation de qualification proprement dite. Une certaine souplesse dans l’orientation est toutefois prévue puisque, sur base d’un avis favorable du conseil d’admission, l’élève pourra encore changer d’option en cours ou à l’issue de la 4e secondaire. En cas d’échec à l’issue de la 4e secondaire, moment où le conseil de classe délivre le CE2D[4], l’élève pourra refaire sa 4e année (soit dans l’OBG déjà entamée – on parle alors de 4e année complémentaire, soit dans une autre OBG). En cas de grosses difficultés dans son option et dans les cours de formation commune, il est possible que le conseil de classe autorise l’élève à tripler la 4e année.

La 5e et la 6e année du PEQ sont considérées comme un continuum. Cela signifie que l’élève a deux ans pour s’approprier les savoirs et compétences de la formation commune et de son OBG, de manière progressive. Comme la CPU, le PEQ prévoit en effet d’organiser les OBG de façon modulaire. Si, dans la CPU, les modules de formation étaient appelés unités d’acquis d’apprentissage (UAA), ils auront désormais le doux nom d’unités de qualification (UQ)… Ces modules resteront à la fois formatifs et certificatifs. L’évaluation sera donc organisée de manière constante et progressive, même si une évaluation globale des compétences acquises reste prévue à l’issue de la 6e année. Dans le cas où l’élève n’aurait pas obtenu toutes les certifications à l’issue de la 6e ou de la 7e année du qualifiant, il est prévu un dispositif de fin de parcours complémentaire (similaire à la C3D dans le régime CPU). Il doit permettre à l’élève d’obtenir les certifications qu’il n’a pas encore acquises et doit prévoir la réalisation d’un stage en entreprise pour faire le lien avec le monde du travail. Ce dispositif est d’un an maximum (pas de redoublement possible, s’il veut obtenir ces certifications par la suite l’élève devra le faire via la promotion sociale ou la formation professionnelle), mais s’arrête dès que l’élève a obtenu toutes les certifications manquantes.

Pourquoi une telle réforme et ce qu’en pense l’UFAPEC ?

Si une réforme du qualifiant intervient maintenant, c’est pour plusieurs raisons. D’une part, les évaluations de la CPU qui se sont déroulées entre 2012 et 2021 ont montré que plusieurs objectifs de cette réforme n’étaient pas atteints, comme la baisse du redoublement. Par ailleurs, les périodes allouées à la CPU avaient un coût non négligeable et il s’est avéré que la part allouée à la remédiation était faible au regard de la part allouée à la coordination. La généralisation de cette mécanique étant impayable pour le gouvernement et la simplification du parcours qualifiant étant attendue rapidement par les acteurs de l’enseignement (cf. Avis n°3 du PEE)[5], une réforme était bien nécessaire. Par ailleurs, on sent bien que le gouvernement anticipe l’arrivée du tronc commun jusqu’à 15 ans, même si le PEQ ne préfigure pas officiellement ce que sera la filière métiers après-demain. À ce propos, un groupe de travail est en train d’être (enfin !)[6] constitué pour baliser l’après tronc commun ; il devra remettre son rapport à la fin de l’hiver prochain. D’autres aspects de la CPU ont été conservés dans le PEQ, comme le découpage des apprentissages en modules formatifs et certificatifs, ou comme le dispositif de fin de parcours complémentaire, ce que l’UFAPEC salue tout en s’inquiétant des moyens consentis.

Ce qui préoccupe d’ailleurs particulièrement l’UFAPEC dans le cadre du PEQ, c’est l’absence de moyens structurels consacrés à la remédiation tout au long du parcours, et en particulier lors de la 4e année complémentaire. Les enseignants seront amenés à faire davantage de remédiation immédiate, encouragés notamment par les référentiels et par la formation continuée. Mais cela sera-t-il suffisant ? Cette absence de financement risque d’induire des effets à géométrie (très) variable d’une école à l’autre et d’un enseignant à l’autre, si du moins cela est effectivement faisable.

 

Michaël Lontie

 

[1] On appelle « options de base groupées » (OBG) les options de l’enseignement technique de transition et de l’enseignement artistique de transition listées par l’annexe II de l’arrêté du gouvernement de la Communauté française fixant les répertoires des options de base et des formations dans l’enseignement secondaire (https://gallilex.cfwb.be/document/pdf/45721_000.pdf), ainsi que les options des deuxième et troisième degrés des enseignements techniques de qualification et professionnels listées par l’annexe IV du même arrêté.

[2] La certification par unité désigne un décret de refondation du qualifiant datant de 2012 dans lequel les cours étaient partitionnés en modules (ou UAA, unités d’apprentissage acquises). A chaque module (unité) est associée une certification qui permet à l’élève de ne pas devoir repasser des acquis plusieurs fois.

[3] Le Service Francophone des Métiers et des Qualifications (SFMQ) produit des Profils Métiers et des Profils Formations associés, cadres de référence légaux, pour une synergie entre métiers et qualifications.

[4] Le CE2D (Certificat d'études du 2e degré de l'enseignement secondaire) atteste de la réussite des 3e et 4e années de l'enseignement secondaire.

[5] L’Avis n°3, adopté le 22 mars 2017 par le Gouvernement, définit l’ensemble des initiatives et des mesures du Pacte articulées autour de cinq axes stratégiques, les équilibres et les conditions nécessaires à sa mise en œuvre, ainsi que son phasage : https://www.ufapec.be/files/files/chantiers-ufapec/pacte-excellence/2017-03-07-Avis3-GC-complet.pdf

[6] Lire à ce sujet : LONTIE, M., Penser l’après tronc commun, Etude UFAPEC n°12.22 ET/2, août 2022 : https://www.ufapec.be/nos-analyses/1222-et2-apres-tronc-commun.html.

Vous désirez recevoir nos lettres d'information ?

Inscrivez-vous !
En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de Cookies pour vous proposer des publicités adaptées à vos centres d'intérêts, pour réaliser des statistiques de navigation, et pour faciliter le partage d'information sur les réseaux sociaux. Pour en savoir plus et paramétrer les cookies,
OK